Marilyn, le dernier secret
fil des jours, la quantité diminuait, tout le monde espérant qu'on atteindrait le moment où le produit serait inutile et les insomnies de l'actrice un mauvais souvenir.
Comme le prouvaient les documents issus de la succession, Engelberg s'était bien rendu au 12305 Fifth Helena Drive le 3 août 1962. Pour effectuer une injection et dresser une ordonnance, décision pour le moins étrange tant elle contrecarrait le processus entrepris depuis des mois. Engelberg reconnaissait d'ailleurs lui-même que la précédente remontait au 30 juin 1962 et qu'aucune autre n'avait été établie durant les cinq dernières semaines.
Mais alors, pourquoi prescrire du Nembutal alors que Marilyn venait d'en recevoir une injection ? La piqûre ne signifiait-elle pas que la star n'avait aucun besoin de cette substance sous forme de comprimés ?
L'explication se révèle plus prosaïque et tient à la vie privée du médecin. Le 3 août 1962, parce que son mariage se trouvait au bord du précipice, Engelberg avait voulu accorder une dernière chance à son couple en passant les prochaines quarante-huit heures avec Esther, son épouse. Comme il ne voulait pas être dérangé pendant ces deux jours cruciaux, il avait prescrit le tube de comprimés, ce qui le dispensait de passer chez l'actrice pour lui injecter le Nembutal liquide. Autant pour rassurer sa patiente que pour remplacer le médecin si, par malheur, les insomnies revenaient hanter Monroe.
Le premier jalon de la tragédie venait, involontairement, d'être posé.
*
Le suivant fut tout aussi accidentel.
Le vendredi 3 août, Marilyn passait une partie de l'après-midi avec son amie et collaboratrice Pat Newcomb. Et depuis quelques jours, l'attachée de presse se traînait. Le rhume semblant s'être transformé en bronchite, elle avait décidé de se faire hospitaliser.
La nouvelle contraria Marilyn, les hôpitaux figurant à la première place des lieux qu'elle détestait. Elle avait même dit à son amie qu'on y entrait avec un refroidissement mais qu'on y attrapait bien pire. L'actrice avait une meilleure proposition : Pat viendrait passer les prochains jours au 12305 Fifth Helena Drive, où elle « cuirait » ses germes sous la lampe à bronzer de l'actrice.
Newcomb venait de vivre un mois fou à orchestrer le retour en grâce médiatique de Marilyn et il n'était que justice que celle-ci lui consacre quelques jours. Convaincue par la gentillesse et la compassion de la comédienne, elle avait donc cédé.
Hélas, ce ne fut pas la seule chose que l'attachée de presse accepta ce jour-là. Constatant ses difficultés à s'endormir à cause de l'infection, Marilyn lui avait proposé quelques comprimés de Nembutal. Ceux-là même que le docteur Engelberg lui avait prescrits quelques heures plus tôt.
La suite ? Pat Newcomb, sans jamais mesurer l'enjeu de sa déclaration, l'avait elle-même raconté [1] .
Après avoir avalé un comprimé, Newcomb avait commencé à réfléchir. N'ignorant rien de l'état de Marilyn et du traitement de désaccoutumance administré par Greenson et Engelberg, elle arriva à la conclusion qu'il était risqué de laisser à la disposition de l'actrice un tube presque entier de somnifères. Qui plus est de Nembutal, médicament à l'origine de ses accoutumances.
Elle se dit qu'une seule chose était sensée. Soucieuse de la santé de son amie, elle vida le contenu du tube dans les toilettes puis regarda le tourbillon d'eau emporter les pilules jaunes.
Sans le savoir, l'attachée de presse détruisait ainsi l'assurance du docteur Engelberg.
Et plus rien n'arrêterait le drame.
1 -
In Marilyn, The Last Take, op. cit.
102. Folle
L'angoisse virait à l'obsession.
L'obsession se transformait en crise.
Dans quelques heures, le soleil se coucherait et d'avance Marilyn craignait le pire. Maintenant que les comprimés prescrits par Engelberg avaient disparu, l'actrice était persuadée, convaincue, que jamais elle ne trouverait le sommeil. Sa nuit serait blanche. Une idée qui la rendait folle.
*
Le Dr Greenson avait dû se déplacer en urgence.
Monroe n'étant pas un sujet facile, la session promettait d'être longue.
Le médecin s'était donc enfermé avec l'actrice afin de l'écouter, la guider, lui parler, espérant parvenir à la rassurer.
Mais la star était un mur. Sur lequel les mots de Greenson ne faisaient que rebondir.
Marilyn n'arrivait pas à oublier la confession de Pat Newcomb. Certes, son acte partait d'une
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