Marilyn, le dernier secret
des films produits en Amérique. Des classiques tels que les négatifs originaux de Ben Hur et Autant en emporte le vent comme la plus moderne Guerre des étoiles .
Une mine de sel du Kansas se montre donc essentielle à la survie de notre mémoire cinématographique, puisqu'elle permet d'éviter le triste sort connu par la moitié des films produits avant 1951, lesquels, rongés par leur émulsion chimique, sont aujourd'hui entièrement détruits [2] .
Une mine de sel du Kansas, État du centre du pays, où, au début des années 1980, la 20th Century Fox avait transféré ses bobines.
Henry Schipper, en était convaincu : s'il existait des traces du dernier film de Marilyn, c'est à Hutchinson qu'il convenait de s'adresser.
*
En moins de temps qu'il n'en faut pour l'espérer, à sa grande surprise, il eut gain de cause. Après quelques heures de recherches dans la base de donnée de la 20th Century Fox et un coup de téléphone à la mine de sel, il obtint ce qu'il voulait. Certes, il ne se faisait guère d'illusion : son statut de producteur maison l'avait aidé à franchir tous les garde-fous d'ordinaire opposés aux autres. La Fox Inc. était une entreprise bien trop importante pour que l'on vérifie si le département News, pour lequel travaillait Schipper, avait le droit de mettre son nez dans les archives du studio. Après tout, l'essentiel, c'était qu'il soit un producteur « maison ». « Il aurait été extrêmement difficile pour moi d'avoir accès au film si j'avais travaillé à l'extérieur de la compagnie », reconnut-il d'ailleurs lui-même [3] .
De fait, après quelques vérifications d'usage, l'archiviste avait tout bonnement annoncé à Schipper qu'il expédiait par Fed-Ex « ce qu'il avait ».
La quête du producteur touchait à sa fin. Bientôt, il serait le premier à diffuser le contenu de la bobine numéro 17.
Et à offrir à tous l'un des derniers sourires de Marilyn devant une caméra.
1 -
Le récit de la découverte des bandes inédites de Something's Got to Give est fondé sur le documentaire de Schipper diffusé pour la première fois en 1990, ses interviews données à différents médias américains, dont Time et New York Times ainsi que Marilyn, The Last Take, op.cit.
2 -
Une deuxième mine, de chaux, creusée dans la Iron Mountain en Pennsylvanie, abrite le reste de la production américaine.
3 -
New York Times , 13 décembre 1990.
30. Clap
Henry Schipper venait de passer deux journées entières dans l'un des studios de montage de son bureau de Los Angeles. Deux jours harassants mais passionnants. Deux jours pour visionner le « colis » de Hutchinson arrivé quarante-huit heures plus tôt.
Les prises du 14 mai 1962 découvertes par les fans de Marilyn durant l'été 1988 étaient dans le paquet. Tout comme les sept minutes utilisées par Pepe Torres pour son documentaire hommage de 1963. Mais aussi d'autres choses. Pas de doute, l'archiviste de la mine de sel du Kansas avait parfaitement fait son travail.
Alors qu'il n'en avait jamais espéré autant, Henry Schipper se retrouvait désormais en possession de six heures de bandes. Certaines gravement endommagées, d'autres sans le son, mais toutes bénéficiant d'un point commun excitant : officiellement, elles n'existaient pas !
Henry Schipper s'installa devant son écran.
Après le noir, la lumière.
*
L'image tremblait légèrement, les dépôts de poussière étaient fréquents.
Une main anonyme tenait un clap devant la caméra.
Le titre, inscrit à la craie sur l'objet en bois, venait de lever les derniers doutes du producteur.
Something's Got to Give…
Vingt-huit ans après son interruption brusque et controversée, l'ultime film de Marilyn Monroe pouvait enfin révéler sa vérité.
Quatrième partie
Manipulations
32. Confrontation
George Cukor avait joué au chat et à la souris avec la Fox durant deux ans. Vingt-quatre mois à fuir les projets improbables que lui présentait un studio à la dérive. Mais les avocats de la 20th Century Fox venaient de siffler la fin de la partie. Le metteur en scène n'avait pas le choix : son prochain film s'intitulait Something's Got to Give et on lui communiquerait le calendrier de tournage sans qu'il ait son mot à dire.
Les mauvaises nouvelles arrivant toujours par paire, non seulement le metteur en scène gaspillerait son talent à réaliser une comédie insignifiante, mais Marilyn Monroe avait hérité du premier rôle. Bien entendu,
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