Marilyn, le dernier secret
d'un séjour new-yorkais où, à l'Actors Studio, elle avait répété des scènes de son futur rôle. Le climat californien, bien plus clément, n'avait pas été d'un grand secours. À quelques jours du tournage, elle avait été hospitalisée une journée afin d'effectuer une série d'examens. Aux résultats alarmants.
Ce qui avait débuté comme une simple sinusite s'était transformé au fil des jours en infection massive des sinus. Le laboratoire de l'hôpital avait même isolé la présence de streptocoques dans son système respiratoire. Un état de santé qui nécessitait un mois complet de traitement à base d'antibiotiques.
Monroe ayant un lourd passif qui jouait contre elle, le studio avait reçu la nouvelle avec suspicion. Qui plus est dans le contexte d'alors, tant elle n'avait pas manqué d'exprimer ses doutes sur le scénario et le metteur en scène. Aussi, afin de vérifier le mal de Marilyn, la 20th Century Fox avait-elle envoyé Lee Siegel cette fois encore.
*
Le rapport du médecin – engagé par le studio, insistons – ne laissait planer aucun doute quant aux informations possédées par la Fox au long de ce printemps 1962.
La température de la star oscillait constamment entre trente-huit et quarante degrés. Ses bronches étaient obstruées, sa faiblesse, accentuée par un terrible régime basses calories, préoccupante. Soucieux d'offrir à son employeur une estimation précise de la durée de la maladie, Siegel avait expliqué « qu'il faudrait des semaines à Marilyn pour soigner son infection ».
Mais c'était surtout sa recommandation finale qui donnait le frisson. Un conseil ferme découvert par Henry Schipper en préparant son documentaire. Fixée sur microfilm dans les archives du studio, elle changeait la donne. Ainsi, après avoir proposé de reporter d'au moins un mois le début du tournage de Something's Got to Give , le docteur Lee Siegel prévenait : « Si ce report n'a pas lieu, alors c'est tout le film qui pourrait s'effondrer sous le poids des conséquences de la maladie de Marilyn. »
*
Marilyn était réellement malade. Sérieusement même.
Et contrairement aux affirmations des services de communication de la Fox, chacune de ses absences avait été confirmée, validée et excusée par le médecin salarié du studio.
Pis, prévoyant le désastre, Lee Siegel avait mis en garde la direction de la 20th Century Fox contre les risques majeurs encourus si le tournage débutait trop tôt.
Aucun doute donc : le studio savait.
Ce qui n'empêcha pas ses responsables de lancer la machine et de la laisser se diriger vers une catastrophe annoncée. Une fois qu'il fut trop tard, lorsque tout l'édifice se mit à tanguer dangereusement, ils firent tout pour se dédouaner en trouvant le plus facile des boucs émissaires.
1 -
Marilyn, The Last Take, op. cit.
2 -
Ibid .
3 -
Hollywood Citizen-News , 2 juin 1962.
4 -
Marilyn, The Last Take , op. cit.
36. Financiers
Désormais, il fallait comprendre.
Découvrir pourquoi et comment la 20th Century Fox avait, malgré l'avis de son propre expert, validé le projet Something's Got to Give . Et, surtout, révéler les raisons ayant conduit le studio à brûler en place publique son idole.
Après tout, film après film, Marilyn n'avait-elle pas été une valeur sûre au box-office ?
La réponse se révélait purement déconcertante. Parce qu'elle matérialisait la frontière entre l'art et les affaires.
*
La crise économique de 1929 ayant poussé l'Amérique dans les salles obscures, chacun voulant se changer les idées, le septième art constitua un puissant remède contre la misère quotidienne.
Historiquement basée dans le New Jersey, la production de films avait rejoint l'Ouest du pays, la Californie offrant des décors naturels à bon marché et un climat idéal. L'âge d'or d'Hollywood pouvait débuter. Et la 20th Century Fox bouscula ce secteur en 1935.
Le futur studio de Marilyn était né de l'union entre deux sociétés illustrant le passé et le futur du cinéma américain. La première, la Fox Film Corporation, appartenait à un propriétaire de salles disséminées sur la côte Est ; quant à la seconde, la Twentieth Century Pictures, elle rassemblait depuis Los Angeles de nombreux talents. Avec des associés qui, menés par Darryl Zanuck, venaient tous du métier, et plus précisément de la production.
Le mariage des deux compagnies, puis la Seconde Guerre mondiale créèrent un géant. En
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