Marilyn, le dernier secret
fait unique dans les annales de l'histoire du cinéma. Pour la première fois, la star principale et le réalisateur d'un film avaient été contraints d'accepter un projet par des avocats. Afin d'obtenir l'accord de Marilyn Monroe, on n'avait pas usé de séduction ou suscité son envie, mais agité la menace – réelle – de la traîner devant les tribunaux. De nouvelles méthodes indiquant clairement une équipe dirigeante aux abois et prête à tout.
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Force est de l'admettre : sur le papier, la tactique de la Fox frisait la perfection.
Le retour de Marilyn à la comédie avait éclipsé Elizabeth Taylor à la une des médias. Côté actionnaires, les perspectives d'un futur succès calmèrent les esprits. Si tout allait bien, chacun sauverait son job, donc sa peau.
Ensuite ? Eh bien ! la torpeur de l'été accorderait à tous une trêve bienvenue. Et la rentrée serait dominée par la projection aux grandes chaînes de distribution d'une première version de Something's Got to Give . Quelques journalistes et chroniqueurs, triés sur le volet, y seraient invités. La prestation de Marilyn générerait un buzz positif synonyme de prochaine victoire. Une excitation qui aiderait à attendre en toute quiétude la sortie du film quelques mois plus tard.
La vérité était aussi simple que cela : le trentième long-métrage de Marilyn serait chargé d'occuper le devant de la scène tandis qu'en coulisses on terminerait discrètement le film chargé de permettre au studio d'écrire une page de l'histoire du cinéma et de se renflouer.
Les génies de la 20th Century Fox avaient donc tout prévu.
Tout sauf la passion brûlante et médiatisée qui allait unir Elizabeth Taylor et Richard Burton.
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Rome ne ressemblait pas à Hollywood. Si à Los Angeles les studios régnaient en maîtres, en Italie, la Fox n'était pas en mesure de contrôler la presse et ses paparazzi. Or, traquant sans cesse les deux stars, les photographes s'en donnaient à cœur joie.
La relation passionnée entre les deux comédiens était un secret de polichinelle sur les plateaux de Cinecitta. Et l'histoire paraissait d'autant plus piquante que chacun d'eux était marié. Ce qui devait arriver arriva : la publication de clichés compromettants, accompagnée de rumeurs où se mêlaient consommation de drogue et d'alcool, mit le feu aux poudres en Italie comme dans le reste du monde.
Une déflagration mondiale même lorsque, sur Radio Vatican, le pape lui-même condamna Elizabeth Taylor, désormais considérée comme une briseuse de mariage, et appela au boycott pur et simple du futur Cléopâtre . Un énorme grain de sable venait de gripper la machine bien huilée de la Fox. Tous les plans et stratégies soigneusement élaborés tombaient à l'eau.
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La presse américaine embraya, criant à son tour au scandale, dénonçant elle aussi le couple illégitime Taylor-Burton à longueur de colonnes.
Si la Fox avait envisagé un torrent de publicité en engageant Elizabeth Taylor, ce n'était évidemment pas celle-là qu'elle avait en tête. D'autant qu'au scandale « moral » déclenché par leur liaison, s'ajouta la révélation d'un tournage à Rome pour le moins décadent. Avec grands crus, bonnes tables et week-ends prolongés entièrement pris en charge par la 20th Century Fox !
Or, au scandale s'ajouta la crainte. Venue d'un autre front, la « garantie » Monroe paraissait avoir du plomb dans l'aile. Du plateau de Something's Got to Give s'élevait une rumeur persistante : Marilyn manquait l'essentiel du tournage. La bouée de sauvetage se dégonflait !
Cette conjonction ne pouvait que conduire au drame. Les actionnaires du studio appelaient à la révolution : des têtes devaient tomber.
Vite.
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Le 3 juin 1962, Peter Levathes s'envolait pour Rome.
Cet avocat de formation, devenu le grand patron de la production après le départ de Darryl Zanuck, avait pour mission délicate de sauver la direction du studio et, à plus long terme, d'assurer la survie de la 20th Century Fox.
La publicité négative engendrée par l'aventure Taylor-Burton et la révélation du train de vie assuré par le studio avaient mis à bout la patience du staff de la Fox. Il fallait prendre le taureau par les cornes.
Et c'est Elizabeth Taylor que Levathes avait justement été chargé de renvoyer !
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L'ancien avocat avait prévu d'annoncer la nouvelle à la star en fin de semaine.
Une date nullement choisie au hasard, puisqu'elle
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