Marilyn, le dernier secret
permettrait au missi dominici de faire au préalable le point avec Mankiewicz afin d'avoir une idée précise de l'état d'avancement du tournage.
En outre, la proximité du week-end garantissait que l'information demeurerait confidentielle jusqu'au lundi suivant. Le temps nécessaire au studio pour mettre en route sa redoutable machine à communiquer.
*
Quelques heures seulement avaient suffi à Peter Levathes pour affronter la vérité.
Et, quelle que soit la manière d'aborder le problème, le résultat était toujours le même : trop d'argent avait déjà été gaspillé, trop de décors et de costumes réalisés, trop de négatifs utilisés pour faire marche arrière.
Pour la première fois depuis sa création, la légendaire 20th Century Fox était prise au piège.
Coûte que coûte, le studio devait terminer Cléopâtre et s'accommoder des dégâts financiers et publicitaires incarnés par Elizabeth Taylor.
Quitte à mourir avec, le sort de la Fox était désormais lié à son rêve égyptien.
*
À New York, les conclusions de Levathes firent l'effet d'une bombe.
Et comme si cette mauvaise nouvelle ne suffisait pas, les déboires du studio alimentaient une série de cinq articles publiés par le New York Times . Où l'autorité même de la direction du studio, parce qu'elle cédait aux caprices de Marilyn Monroe et d'Elizabeth Taylor, était mise en cause [2] .
L'enquête, menée par Murray Schumach, se révélait d'autant plus dévastatrice que ses conclusions ne s'adressaient pas à Hollywood, mais directement au milieu de la finance.
La maison Fox était en feu.
Il fallait agir immédiatement et frapper fort.
Nous étions le 8 juin 1962.
Marilyn Monroe allait servir d'exemple.
1 -
Aujourd'hui, Cléopâtre truste la seconde place des films les plus chers de l'histoire du cinéma. La première place est occupée par l'adaptation soviétique de Guerre et Paix. Le film, sorti en 1968, nécessita sept années de tournage. Son budget, ramené à l'inflation courante, est estimé à 560 millions de dollars. Voir Forbes , 12 septembre 2005.
2 -
« The Fox dilemma : Weakness see in the film industry ». New York Times , 8 juin 1962.
38. Étape
La force d'Elizabeth Taylor était devenue la faiblesse de Marilyn Monroe.
Dans l'impossibilité de se séparer de la star aux yeux mauves, la direction de la 20th Century Fox avait opté pour le renvoi de la Blonde. Un limogeage qui dissimulait l'impuissance et les faiblesses du studio. L'assassinat médiatique de l'actrice n'était en fait qu'un écran de fumée destiné à dissimuler le vrai visage de la Fox et à la présenter dans des habits qui n'étaient pas les siens. Ceux d'une compagnie dirigée d'une main de fer, soucieuse de rassurer ses actionnaires en refusant la tyrannie du star system.
Désormais cela ne faisait aucun doute : Marilyn Monroe venait d'être sacrifiée sur le bûcher des vanités.
*
Le détour entrepris pour raconter les derniers mois de la vie professionnelle de Marilyn Monroe peut paraître long à certains, mais à mon sens il était essentiel dans la quête de la vérité. Parce qu'à son terme, il permet de remettre définitivement en cause l'idée répandue selon laquelle, à la veille de l'été 1962, la star était une actrice à la dérive, piégée par le temps et assommée par les calmants. Portrait qui offrait une légitimité à la thèse du suicide.
Raconter comment la Blonde avait été victime de circonstances qui ne la concernaient même pas se révélait donc d'autant plus capital que, plus de quarante-cinq ans après sa disparition, les mensonges de la Fox empoisonnent encore nos souvenirs. Ainsi, documentaire après documentaire, livre après livre, l'œuvre de destruction orchestrée par Harry Brand et Perry Lieber persistait à trahir les derniers mois de la biographie de Marilyn.
Le plus étonnant, c'est la manière dont certains auteurs s'étaient emparés de ce portrait falsifié. Ainsi, en toute logique, les défenseurs de la thèse officielle s'en servaient pour mettre en avant le comportement suicidaire de la star. Mais ces balivernes propagandistes étaient également utilisées par les promoteurs de la théorie de l'assassinat pour étayer leurs déductions. Selon eux, les faiblesses prétendues de l'actrice durant le tournage illustraient à merveille l'impasse émotionnelle dans laquelle elle se trouvait à cause des frères Kennedy !
Or, peint par des illusionnistes dont la
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