Marilyn, le dernier secret
souterrain, certains assumant publiquement l'idée que l'affaire du Watergate les avait conduits à revoir le rôle du président et à visiter d'un œil critique le mandat de JFK. Norman Mailer en faisait partie.
*
Norman Mailer se nourrissait déjà de l'air du temps.
Puisque l'époque rappelait la chute de l'Empire romain et que le public semblait avide de connaître les moindres détails des coulisses du pouvoir, il allait regarder le récent passé autrement. Et comme s'attaquer au mythe Kennedy garantissait de bons chiffres de vente, il transforma un album de photos classique en livre à charge.
Norman Mailer, sous couvert de licence romantique, laissa glisser sa plume. En écrivain de talent captant à merveille l'air du temps, il ajouta sa propre touche aux événements, imaginant qu'une équipe du type de celle des plombiers du Watergate, formée d'agents du FBI ou de la CIA, avait pu assassiner Marilyn pour faire chanter Bobby.
Avec sa signature, un texte aussi virulent – puisé notamment dans Capell – fut un best-seller, offrant à la thèse de l'homme de Statten Island une notoriété que son extrémisme ne lui aurait jamais permis d'atteindre. Bien que laminé par la presse, qui remarqua combien les accusations de Mailer mettant Bobby au cœur du mystère Monroe n'étaient fondées sur rien, le grand auteur n'en eut cure. De fait, il ne dissimulait même pas sa motivation profonde.
Poursuivi par le fisc américain, l'écrivain confessa ainsi que la raison qui l'avait conduit à massacrer RFK, alors que lui-même était convaincu par la thèse du suicide accidentel, tenait à ses ennuis financiers : « J'avais vraiment besoin d'argent [1] , dit-il sans vergogne.
Cette remarque n'était pas tombée dans l'oreille d'un sourd. Norman Mailer avait ouvert une brèche et Robert Slatzer allait s'y engouffrer.
Une industrie était née.
1 -
In 60 minutes, CBS, entretien avec Mike Wallace, 13 juillet 1973.
65. Mari
Robert Slatzer n'appartenait pas à la cohorte de ceux qui tentaient de capter les miettes du gâteau Monroe.
Lui, claironnait-il, entrait en croisade. Slatzer était un chevalier luttant pour la vérité.
Son combat avait la nature d'une quête personnelle. Après tout, n'avait-il pas été le mari de Marilyn ?
*
L'histoire avait débuté comme un conte de fées arrangé à la sauce hollywoodienne.
Robert Slatzer, apprenti journaliste originaire de l'Ohio, aurait rencontré Marilyn durant l'été 1946. La guerre venait de s'achever et Norma Jean tentait sa chance à la 20th Century Fox tandis que lui cherchait un emploi dans l'un des magazines de Los Angeles dédiés au septième art. Face à un monde terriblement cruel, les deux débutants allaient forcément s'aimer.
La suite ?
Selon Slatzer, le début d'une romance secrète et d'une longue amitié dont l'apogée serait survenu le 4 octobre 1952 à Tijuana, au Mexique. Quand Marilyn Monroe l'aurait épousé.
Pas pour longtemps toutefois.
Car trois jours plus tard, pressé par Darryl Zanuck ou Joe Di Maggio – cela n'est pas clair – le couple aurait à nouveau effectué le voyage vers Mexico afin de corrompre, grâce à une poignée de dollars, un avocat local et détruire le certificat de mariage.
Ce détail a son importance. Car, il signifie que l'histoire que Robert Slatzer défendait et vendit jusqu'à son décès, le 28 mars 2005, n'était fondée sur aucune preuve matérielle.
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En vérité, Robert Slatzer n'a jamais épousé Marilyn.
L'épisode mexicain était le fruit de son imagination. Pis, il se résumait à un banal objectif commercial.
Différents arguments permettent de démonter cette prétendue union éphémère.
On pourrait commencer par oublier la rencontre symbolique et romantique de 1946.
Car, comme l'ont raconté à la fois Allan Snyder et Kay Eicher, qui fut la (vraie) épouse de Slatzer entre 1954 et 1956, le journaliste n'était rien d'autre qu'un fan. Un admirateur assistant au tournage de Niagara qui avait osé approcher la star pour lui demander de poser en sa compagnie devant l'objectif. C'est d'ailleurs ce cliché que, durant plus de trente ans, Slatzer exhiba comme la preuve de sa relation avec Marilyn.
Ensuite, il faudrait souligner le fait qu'aucun vrai proche de Marilyn n'a jamais été mis au courant du fiasco de Tijuana, ni même entendu parler de Robert Slatzer, qui prétendait pourtant être resté le confident de l'actrice jusqu'à la nuit de son décès, au point
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