Marilyn, le dernier secret

l'origine des dizaines d'ouvrages apparus ensuite, professant, voire amplifiant les mêmes mensonges.
    Or, le cœur du problème est là.
    Car, jetant aux oubliettes le très embarrassant Frank Capell, la littérature conspirationniste préféra désormais citer Slatzer qui, nous l'avons vu, s'était contenté de réécrire le petit livre rouge de l'extrémiste de Statten Island. Derrière la prétendue rigueur de l'investigation de Anthony Summers se cachaient en effet Robert Slatzer et ses disciples. Lesquels demeuraient bien présents lorsque Don Wolfe parvint à convaincre des maisons d'édition pourtant réputées que son propre travail était le fruit de quinze ans d'enquête.
    *
    En somme, Robert Slatzer avait agi comme un virus. Dont les inventions contaminaient l'univers de Marilyn.
    La liste de ses ravages est fort longue.
    Qu'on s'en souvienne : c'est l'ancien journaliste de l'Ohio qui fut à l'origine du récit sur l'absence de verre d'eau, qui évoqua les comprimés jaunes ne déteignant pas, la disparition mystérieuse des organes de la star, les coups de fils de harcèlement sur la ligne privée de RFK ; c'est lui qui avança l'existence de menaces de divorce de Jackie, de promesses de mariage de RFK, assura que Marilyn s'apprêtait à tenir une conférence de presse, que les Kennedy étaient des goujats se passant la Blonde comme s'il s'agissait d'un bout de viande [7] …
    Mais son plus beau fait d'arme, le plus lucratif aussi, méritait que l'on s'y arrête plus longuement. Après tout, n'avait-il pas annoncé l'existence d'un journal intime de Marilyn Monroe ?
    1 -
    The Life and Curious Death of Marilyn Monroe, Robert Slatzer, Pinnacle, 1974.
    2 -
    In The DD Group, op. cit .
    3 -
    In Marilyn Monroe : The Biography, op. cit .
    4 -
    On peut remarquer, que conformément au code de l'amitié édicté par Marilyn, la parution de cet article aurait dû, si l'idylle avait été réelle, mettre un terme à sa relation avec Slatzer.
    5 -
    Fowler fut le premier journaliste sur le lieu du crime de la célèbre affaire du Black Dahlia. Voir http ://www.laobserved.com/archive/2004/04/will_fowler_old.php
    6 -
    In Reporters, Memoirs of a Young Newspaperman, Will Fowler, Roundtable Publishing, 1991.
    7 -
    Il ne s'est pas arrêté là puisqu'il a aussi avancé l'idée que le téléphone de Marilyn était sur écoute, obligeant la star à utiliser des cabines publiques. Une astuce qui lui permettait d'expliquer pourquoi le numéro de téléphone n'apparaissait sur aucun relevé de la star alors que Slatzer prétendait avoir des communications quotidiennes avec elle.

66. Secrets
    En octobre 1975, le magazine pour adultes Oui proposait, sous la plume d'Anthony Scaduto, un dossier spécial consacré à la mort de Marilyn Monroe.
    Où la thèse du suicide était présentée comme une manipulation de la vérité. Où les Kennedy étaient nommément impliqués dans l'assassinat de la star. La transformation de la réalité poursuivait son chemin.
    Et pour cause : l'essentiel de l'article recyclait sous une autre forme la plupart des éléments publiés un an plus tôt par Robert Slatzer. L'auteur avait d'ailleurs largement contribué au travail de Scaduto puisqu'il accordait une longue interview au magazine. Un entretien intéressant puisque ses « révélations » allaient bien plus loin que dans son propre livre.
    Pour la première fois, il annonçait l'existence d'un carnet rouge aux pages noircies de la fine écriture de Marilyn elle-même.
    *
    Selon Robert Slatzer, Monroe aurait acheté ce cahier afin d'y noter précisément la teneur de ses conversations avec John et Robert Kennedy. Déjà présentée comme la maîtresse des deux hommes, la comédienne glissait dorénavant, par l'inventivité du journaliste à l'imaginaire débridé, dans la peau d'une secrétaire compilant consciencieusement les propos d'hommes forcément plus intelligents qu'elle. Après tout, ne l'oublions pas, Marilyn était blonde…
    Quoi qu'il en soit, le contenu du carnet aurait gagné en importance lorsque le Président et son frère se seraient mis à multiplier les confidences classées secret défense. Parmi les plus dévastatrices auraient même figuré celles relatives à des tentatives d'assassinat contre Fidel Castro menées – il fallait bien pimenter la chose – en collaboration avec la Mafia.
    Ce mystérieux journal, à en croire Slatzer, plaçait donc Marilyn au centre d'une guerre opposant la Maison Blanche, le