Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
Marin de Gascogne

Marin de Gascogne

Titel: Marin de Gascogne Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Robert Escarpit
Vom Netzwerk:
comme si l’on avait tiré un coup de canon. Au même instant, la voix de la vigie de grand hune perça l’air comme un cri de mouette :  
    — Ohé du pont ! Le sémaphore du Conguel fait des signaux !  
    Trente secondes plus tard, Bottereaux escaladait les enfléchures, son télescope en bandoulière. En descendant, il cria à Guillotin qui était apparu sur la dunette :  
    — C’est notre numéro d’identification, commandant, mais on ne distingue pas bien les pavillons !  
    — Faites tirer un coup de canon, dit Guillotin à l’officier de quart, et mettez le cap sur Conguel.  
    Le coup de canon réveilla le navire et Verdier rejoignit Hazembat sur le pont. Au bout d’une vingtaine de minutes, les pavillons étaient visibles à l’œil nu. Sous la dictée de Bottereaux, un aspirant les transcrivait en clair sur l’ardoise.  
    — J’espère qu’on nous envoie enfin quelque part, dit Verdier. Depuis que nous sommes à bord de ce vaisseau, rîbus avons trois fois plus de travail que sur le lougre et c’est tout juste si nous avons perdu la côte de vue !  
    Une boule noire monta en grinçant à la corne d’artimon et s’ouvrit pour laisser se déployer un pavillon rouge et blanc.  
    — Message reçu, traduisit Hazembat. Nous n’allons pas tarder à être fixés.  
    L’instant d’après, l’officier de quart fit mettre toute la voile. L’ Argonaute tira un bord jusqu’à l’entrée de la Teignouse qui fut passée sans anicroche, puis, par grand largue, tribord amures, mit le cap est-nord-est.  
    — En tout cas, dit Verdier, nous ne rentrons pas à Lorient.  
    — Avec ce cap, c’est peu probable. Nous irions plutôt doubler la pointe de la Bretagne.  
    Cette nuit-là, Hazembat fut réveillé par une légère poussée sur son hamac. A la lumière avare du quinquet d’entrepont, il distingua une silhouette qui lui faisait signe.  
    — Hazembat ? souffla une voix, tais-toi et suis-moi. En silence, il se laissa glisser hors du hamac et s’engagea sur la coursive. L’autre, qu’il reconnaissait maintenant pour être un gabier de misaine, lui montra l’échelle qui descendait vers le faux-pont. Là, il démasqua une lanterne sourde et tira un bandeau de sa poche.  
    — Il vaut mieux que tu ne saches pas où nous allons. Hazembat aurait pu l’assommer d’une manchette, mais la curiosité l’emporta et il se laissa faire.  
    Le trajet fut long et compliqué mais, à l’odeur de sentine et aux trottements menus des rats qui s’enfuyaient, il comprit que son compagnon l’entraînait dans les tréfonds du navire, probablement vers la fosse aux lions, domaine secret du maître d’équipage. Le silence des profondeurs donnait aux craquements et aux grincements familiers de la grande coque de bois une omniprésence quasi surnaturelle.  
    Quand ils s’arrêtèrent enfin, il eut le sentiment d’entendre des respirations étouffées autour de lui, comme s’il était au milieu d’une assemblée. Il sentait des regards qui pesaient sur son corps et son visage. L’angoisse qui lui montait à la gorge fut soudain dénouée par la voix de Papounet :  
    — Matelot Hazembat, es-tu bon républicain ? Machinalement, il répondit :  
    — Oui.  
    — Devant l’Etre Suprême, es-tu prêt à donner ton sang pour défendre les droits du peuple et pour venger les torts qui lui sont faits ?  
    — Oui.  
    — Désires-tu voir la lumière ?  
    — Oui.  
    — Quand on t’ôtera ce bandeau, jures-tu sur ta vie de garder le silence sur tout ce que tu verras ou entendras ici ?  
    — Je le jure.  
    Une main dénoua le lacet qui maintenait le bandeau et Hazembat cligna des yeux, ébloui par la lanterne qui éclairait la soute. Une vingtaine d’hommes étaient assis en rond sur les sacs et les coffres.  
    — Tu es admis à la loge des Vengeurs du Peuple, dit solennellement Papounet. Tu peux prendre place. C’est un peu rapide comme initiation, ajouta-t-il d’un ton plus familier, mais nous n’avons guère de temps pour les cérémonies.  
    Hazembat distinguait maintenant des visages connus : Guirrec, quelques gabiers et officiers mariniers et, à sa grande surprise, Bottereaux.  
    — Grâce au Frère Bottereaux, dit Papounet, nous savons maintenant ce que contenait le message transmis par le sémaphore. Guillotin a ordre de rallier Brest sans délai pour s’y mettre à la disposition de l’amiral Bruix.  
    — Qui c’est, ce Bruix ?

Weitere Kostenlose Bücher