Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
Marin de Gascogne

Marin de Gascogne

Titel: Marin de Gascogne Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Robert Escarpit
Vom Netzwerk:
jaune représentant une salamandre surmontée d’une couronne.  
    — Aristocratisme ! Citoyen Pierre Rapin, au nom du peuple, je te mets en état d’arrestation !  
    Perrot fut libéré le soir même après avoir été condamné à payer l’habillement d’un volontaire, mais Capdemule resta en prison. C’est seulement quand un ami de François Labat se trouva à la présidence du comité que, le soir de Noël, il fut relâché. Son père le conduisit jusqu’à une gabare de Toulouse qui appareilla au petit jour et on n’entendit plus parler de lui.  
    La semaine suivante, l’ Aurore descendit à Bordeaux avec du vin et remonta avec un chargement de salpêtre destiné à la fabrique de poudre installée dans le faubourg de Terrefort. Dès son arrivée, Hazembat appela Bernard.  
    — J’ai vu Lesbats, dit-il. La Belle de Lormont appareillera bientôt. Lesbats te prend comme apprenti timonier. C’est une faveur qu’il te fait. Ça vaut mieux que d’être, comme toi, gabier de grande hune.  
    — Quand compte-t-il appareiller ?  
    — Il ne me l’a pas dit, bien sûr, mais il faut que tu rejoignes la Belle de Lormont avant le 10 janvier. La Gigasse descend dans huit jours avec de la laine. Caprouil te laissera chez Tastet à Bordeaux.  
    Revint le temps de la tuère et le repas du cochon lut le repas d’adieu de Bernard. Il était assis entre Guitoun et Pouriquète. On mangea parcimonieusement : la ration de pain était tombée à une once par jour et par habitant. Le porc avait été mal engraissé et la fricassée manquait de liant. Se refusant à employer des pommes de terre, Hazembate avait coupé des morceaux de cruchade dans la sauce courte et la farine de maïs n’avait pas l’onctuosité du pain blanc. Bernard trouva le vin rêche et légèrement sur. Il se demanda si c’était là le goût de sang dont lui avait parlé Boyreau.  
    — Perrot, dit gravement Capulet, ton bordier de Fargues te manque. Autrefois, tu n’aurais jamais accepté un vin pareil.  
    — Que veux-tu ? C’est la Révolution, non ? Mon bordier est comme les autres paysans : il a abandonné le pourpoint de bure pour le gilet de drap et les sabots pour les souliers. Et ce n’est pas lui qu’on irait mettre en prison à cause d’une fleur de lys !  
    — Une fleur de vanille, ça ressemble à une fleur de lys ? demanda Pouriquète.  
    — C’est plus petit, répondit Guitoun, mais c’est beaucoup plus beau et ça sent bien meilleur. On en trouve à l’île Bourbon qui doit avoir changé de nom maintenant.  
    — Et aux Antilles ? demanda Hazembat.  
    — J’en ai vu à la Guadeloupe, une fois, quand nous avons fait escale à Pointe-à-Pitre. On ne nous permettait pas de débarquer, mais il y avait de belles filles qui venaient sur des canots vendre des fruits aux matelots. Certaines avaient des fleurs de vanille dans les cheveux. Diu vivant ! on s’intéressait davantage aux filles qu’aux fruits !  
    Pouriquète fit la moue.  
    — Ne t’intéresse pas trop aux filles, Hazembat. Dis-moi, Guitoun, elles sont comment, ces filles ?  
    — Il y en a de toutes sortes. Les négresses sont parfois très laides, parfois très belles, mais les plus belles de toutes, ce sont les mulâtresses, celles qui ont un père blanc et une mère noire.  
    Le lendemain fut le dernier jour. Après une période de brise d’ouest, chargée de bourrasques, le vent fraîchissait en tournant au noroît avec des alternances d’averses et de coups de soleil pâle. Par les rues désertes, Bernard et Pouriquète firent un dernier tour de ville. De temps en temps, ils croisaient les patrouilles qui allaient perquisitionner chez les gens soupçonnés de détenir encore quelque vestige de la tyrannie. On cherchait surtout les objets de métal précieux, vaisselle, timbales, couverts et même calices ou patènes mis à l’abri par quelque âme pieuse. François Labat accompagnait une des patrouilles. Il s’arrêta quelques instants quand il vit Bernard.  
    —  Adiu, goyat, dit-il. On me dit que tu vas prendre la mer ?  
    — C’est vrai, Hardit, je m’embarque la semaine prochaine sur la Belle de Lormont. Espérons qu’elle échappera aux griffes des Anglais.  
    — Il y a des griffes pires que les leurs, dit Labat en baissant la voix. Moi aussi, je vais m’en aller.  
    Il lui donna l’accolade et garda ses mains dans les siennes.  
    — Bon vent, garçon. Je vais continuer à faire mon

Weitere Kostenlose Bücher