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Marin de Gascogne

Marin de Gascogne

Titel: Marin de Gascogne Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Robert Escarpit
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Bernard fut enfermé. Nègres et Blancs mêlés, la plupart étaient affalés le long des murs et à demi assoupis. En voyant Bernard, un homme d’une cinquantaine d’années se leva et vint le rejoindre.  
    — C’est sans doute vous le garçon qui étiez avec Claude O’Quin ?  
    — Comment le savez-vous ? demanda Bernard, méfiant.  
    — Les nouvelles circulent vite en prison. C’est chez moi que Claude logeait lors de votre escale. Comment va-t-il ?  
    — Bien. Il est à Baltimore.  
    — Vous y étiez aussi ?  
    — Je travaillais chez M. Prunes Duvivier.  
    — C’est un malin, celui-là ! Je suis sûr qu’il prospère. J’aurais dû faire comme lui : je ne serais pas ici, maintenant.  
    — On va vous guillotiner ?  
    — Cournod voudrait bien, mais Hugues retarde l’affaire. Il sait que j’ai des amis haut placés parmi les nouveaux maîtres de la France.  
    Bernard allait demander qui étaient les nouveaux maîtres de la France quand la grille s’ouvrit. Un soldat avança d’un pas dans la pièce.  
    — Le p’isonnier Bé’na’Hazembat à l’inté’ogatoi’e ! Le soldat le précéda dans le couloir puis, quand ils furent hors de vue de la sentinelle, tourna son visage vers lui.  
    — Céleste Laprune !  
    — Lui-même, citoyen ! Ne pé’dons pas de temps. Belle t’attend dé’iè’e la p’ison !  
    A grands pas, il le conduisit à travers un dédale de couloirs jusqu’à une poterne dont il ouvrit la grille avec une grosse clef. Le jour commençait à baisser. Embusquée derrière un buisson, il aperçut Belle aux rênes d’un petit chariot bâché.  
    — Monte vite et cache-toi. Merci, Céleste. Nous nous retrouverons où tu sais.  
    Sans trop comprendre, Bernard obéit. Belle mit le cheval en route sur le sentier cahoteux.  
    Au bout d’un quart d’heure, à nuit tombée, elle se retourna.  
    — Tu peux venir t’asseoir à côté de moi, maintenant. Il se glissa auprès d’elle.  
    — Où m’emmènes-tu ?  
    — Près d’une crique où les Américains viendront te chercher un peu avant le jour.  
    — Les Américains ? Tu les as vus ?  
    — J’ai été vendre des fruits cet après-midi au navire et j’ai parlé à ton ami Sam. Il viendra avec un canot dès que la chaloupe de ronde sera passée.  
    — Mais je ne veux pas m’en aller !  
    — Tu préfères retomber entre les mains de Cournod ?  
    Il lui passa le bras autour des épaules.  
    — Maintenant que je t’ai retrouvée, je ne veux pas te perdre !  
    — Si tu restes, c’est la tête que tu perdras. Escanot est prêt à jurer que tu es à la solde des contre-révolutionnaires.  
    — Pourquoi Escanot me trahit-il ? C’est un pays.  
    — La jalousie, tiens ! Il est amoureux de moi.  
    — Et Céleste ? pourquoi m’a-t-il aidé à me sauver ?  
    — Parce que lui aussi est amoureux de moi.  
    — Et tu es amoureuse de lui ? Elle secoua la tête.  
    — Ce n’est pas la question. Céleste est un brave garçon. Il fera un bon mari.  
    Amèrement, Bernard remâcha la pensée, puis l’inquiétude le prit, refoulant l’amertume.  
    — C’est vous qui allez avoir des ennuis avec Cournod !  
    — Pas là où nous serons. Quand tu seras parti, j’irai retrouver mon père et Céleste dans un petit village de montagne, à la source de la Grande Rivière des Goyaves où vivent d’anciens esclaves qui ne comprennent pas la République comme le citoyen Cournod. Bien malin s’il nous y retrouve : ses soldats sont avec nous.  
    — Vous allez vous révolter ?  
    — Pas pour le moment. Hugues est encore très fort et, d’autre part, il est assez malin pour se débarrasser de Cournod et de ses sans-culottes quand le moment sera venu. Nous verrons alors ce que la Révolution nous réserve. Elle nous a donné la liberté mais, si elle veut nous la reprendre, nous nous battrons pour la conserver !  
    Le chariot allait au pas maintenant entre les cocotiers. On entendait de plus en plus distinctement le chant de la mer. La silhouette indistincte d’un carbet abandonné se profila dans une clairière sablonneuse qui descendait en pente vers la plage.  
    — Descends et attends-moi.  
    Bernard l’entendit qui conduisait le chariot derrière la bicoque, puis une porte vermoulue grinça. Par les interstices des stipes qui formaient le mur, il vit plusieurs éclairs et distingua le claquement d’un briquet. Belle

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