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Marseille, 1198

Marseille, 1198

Titel: Marseille, 1198 Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jean (d) Aillon
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novembre 1196.
    Entre le capitaine des routiers et le jeune comte,
le long voyage en Normandie, en plein hiver, avait fait naître une franche
camaraderie qui s’était peu à peu changée en estime et en amitié. Le mercenaire
était bien plus jeune que Raymond, mais il avait parcouru l’Europe et il avait
une grande expérience de l’art de la guerre qui fascinait le comte, homme plus
temporisateur que guerrier. Quant à Guilhem, il avait découvert à la cour de
Saint-Gilles un monde de courtoisie auquel il s’était facilement adapté. Il
avait une belle voix et jouait déjà de la viole quand il était soldat, le soir
dans les veillées. Qui mieux que lui aurait pu chanter les prouesses guerrières
et les valeurs héroïques ? La rencontre à Rouen des troubadours de la cour
de Richard Cœur de Lion lui avait appris les règles de l’amour courtois. Il avait
raboté ses rudes manières et découvert qu’il était capable de composer des
ballades où il évoquait des sentiments délicats. Son instrument de prédilection
était devenu une vielle à roue.
    Pendant quinze ans, il n’avait cherché qu’à
survivre dans un monde féroce, aussi, quand Raymond de Saint-Gilles lui avait
demandé de rester à son service, il avait accepté, désirant oublier Mercadier,
Lambert de Cadoc et son ancienne vie. Près de Raymond de Saint-Gilles, Guilhem
était tout à la fois un conseiller, un ami et un garde du corps.
    Sous une apparence souple et accommodante, le
nouveau comte dissimulait une grande ambition et rêvait de restaurer la
puissance du comté de Toulouse, perdue par son père. Habile, il était parvenu à
être associé au traité de Gaillon, signé en janvier 1196 entre Richard et
Philippe, dans lequel les deux princes se promettaient la paix [24] .
Dans ce pacte, les rois de France et d’Angleterre s’engageaient aussi à ne lui
faire ni tort ni guerre.
    Désormais déchargé de toute crainte du côté de ses
nouveaux alliés, Raymond envisageait de rappeler les droits de sa famille sur
la Provence. Si la plupart des seigneurs du Languedoc étaient ses vassaux, les
liens qu’ils avaient avec lui étaient souples et il ne voulait pas prendre le
risque d’une nouvelle guerre avec la maison de Barcelone. Il hésitait donc à
rassembler une armée quand, au début de l’année, il avait reçu en tête à tête
un mystérieux messager. Ce n’est qu’après plusieurs jours de réflexion qu’il
avait parlé de cette visite à Guilhem.
    — Que sais-tu des seigneurs des Baux ?
lui avait-il demandé.
    — Il y a quatre ou cinq ans, j’avais un
engagement à Forcalquier, seigneur. C’est là que j’ai entendu parler de Hugues
des Baux. Pas du seigneur actuel, mais de son grand-père, celui qui avait été vaincu
par la maison de Barcelone. Sa réputation de vaillant capitaine était encore
dans toutes les mémoires.
    Le comte de Toulouse avait soupiré.
    — Le père de ce Hugues des Baux et Raymond
Béranger de Barcelone avaient épousé les deux sœurs héritières du comté de
Provence. À la mort de Béranger, Raymond des Baux avait affirmé ses droits sur
le comté de Provence. Toulouse et l’empereur l’ont soutenu. Mais les armes en
ont décidé autrement. Raymond des Baux battu, notre maison le fut avec lui. Son
fils Hugues, le grand-père du Hugues actuel, a ensuite repris les
revendications de sa famille. Fidèle à ses alliances, mon père l’a aidé, mais a
aussi été battu. Finalement, c’est nous, les comtes de Toulouse, qui avons le
plus perdu dans cette guerre puisque nous avons été chassés de la basse
Provence. De surcroît, la maison de Barcelone a acquis ainsi une puissance
considérable qu’elle pourrait tourner contre moi.
    Guilhem l’avait écouté sans l’interrompre, se
demandant où il voulait en venir.
    — Tu t’en souviens, l’année dernière, quand
j’étais à Beaucaire, où mon fils est né, pour faire le siège de ce château
rebelle, j’ai entendu dire que Hugues des Baux engageait des chevaliers et des
hommes d’armes, poursuivit Raymond de Saint-Gilles. On m’avait dit qu’il aurait
même commencé la construction d’un donjon imprenable dans son nid d’aigle près
d’Arles.
    — Croyez-vous qu’il prépare une
revanche ? Espère-t-il vaincre la maison de Barcelone et le royaume
d’Aragon réunis ? avait demandé Guilhem sans cacher son scepticisme.
    — Il m’a envoyé un messager. Hugues est marié
avec la fille du vicomte de

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