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Marseille, 1198

Marseille, 1198

Titel: Marseille, 1198 Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jean (d) Aillon
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Marseille. À la mort du vicomte, il aurait dû
prendre sa place si, par un honteux stratagème, les consuls marseillais,
dominés par le viguier, n’étaient pas allés chercher un moine défroqué, frère
du comte décédé, pour le remplacer. Hugues me fait savoir que cet imposteur,
qui se nomme Roncelin, est désormais d’accord pour lui céder ses droits.
Confortée par la richesse de Marseille, la famille des Baux ferait puissance
égale avec le comte de Provence.
    — Il vous demande votre aide ?
    — Pas directement, mais il souhaite connaître
ma position si un conflit éclatait. En échange de mon soutien, il reconnaîtrait
ma suzeraineté sur la Provence une fois qu’il aurait chassé la maison de Barcelone,
ce qui me mettrait dans une position de force. Toulouse s’étendrait alors sur
tout le Midi.
    — Sans doute… mais vous pourriez aussi perdre
beaucoup si Barcelone se retournait contre vous.
    — Je le sais. C’est pour cela que je t’en
parle. Il y a peut-être une opportunité pour que je retrouve les droits de ma
famille sur la Provence, mais je n’ai aucun désir d’entrer en guerre contre
Barcelone. Ce sera à Hugues de se battre, s’il y a querelle. Seulement, a-t-il
les moyens de ses ambitions ? C’est ce que j’ai besoin de savoir. Je veux
que tu partes là-bas, que tu observes, que tu te renseignes. Je n’ai personne
ici capable de faire ça.
    — Ça me plairait, avait souri Guilhem
d’Ussel. Je me rouille à Saint-Gilles. Peut-être aurai-je aussi l’occasion de
revoir Marseille.
    Il n’avait pas ajouté qu’il voulait aussi
s’éloigner de sa maîtresse, Amicie de Villemur. Riche héritière, Amicie le
menait à sa guise en lui faisant miroiter un mariage, mais il avait appris
qu’elle avait accepté d’épouser un proche de son père et qu’elle n’avait jamais
envisagé une mésalliance avec un chevalier errant.
    C’est ainsi qu’il était parti, se faisant passer
pour un troubadour.
     

Chapitre 6
    G uilhem
fut tiré de ses souvenirs par le bruit sourd d’une cavalcade. Une troupe
approchait. Un hennissement lointain retentit. Saisissant son épée, il
descendit l’échelle et sortit.
    Antoine était devant le portail de la ferme avec
le prêtre et une femme. Ils ne paraissaient pas inquiets.
    — Qui arrive ? demanda Guilhem en
s’approchant.
    — Notre seigneur, ou plutôt son cousin
Rostang de Castillon. J’ai vu passer le messager chargé de prévenir les gens du
château pour qu’on baisse le pont-levis.
    Dans un assourdissant fracas de sabots, une troupe
de cavaliers déboucha du coin du prieuré Saint-Martin. Pressés de rentrer, ils
faisaient avancer leurs bêtes à grand train.
    — Mon frère est avec eux ! déclara
fièrement Antoine, désignant du doigt un cavalier.
    Suivis de quelques chevaux chargés de bagages, ils
étaient une grosse douzaine, revêtus de broignes de peau ou de toile avec des
maillons de fer cousus. Peu étaient protégés de camail et de cervelière. Le
seul qui portait un haubert avait aussi un bassinet qui cachait ses traits et
une bardiche était pendue à sa selle. Ce devait être leur chef, le seigneur Rostang
de Castillon. Un écuyer le précédait, tenant haut son guidon sur lequel Guilhem
eut juste le temps de lire la devise : À l’Azard Beautezard ! Il portait aussi le pavois de son maître sur lequel était peinte une comète. À
côté d’eux chevauchait un troisième homme n’ayant ni haubert, ni casque, ni
arme de selle. Un épais et lourd manteau de laine turquoise avec un chaperon
lui couvrait la tête. Guilhem ne put distinguer ses traits.
    Quand ils passèrent devant la porte, un homme
d’armes coiffé d’un chapel, un fauchard en main et une arbalète attachée à sa
selle, leur fit un signe amical.
    Guilhem étudiait la force de la troupe comme le
capitaine de routiers qu’il avait été. Équipés de fléaux, de marteaux d’arme et
de haches, ses membres ressemblaient plus à des ribauds et des pillards qu’à
des soldats. Les rares épées n’étaient que de courtes lames, des couteaux de
boucher. Deux avaient de lourdes arbalètes, mais aucun n’avait d’arc. C’étaient
des bandouliers, capables de massacrer et de piller mais qui ne tiendraient
jamais devant des combattants éprouvés et disciplinés. Hugues des Baux
voulait-il bouter de la Provence la maison de Barcelone avec ce genre de
guerriers ?
    Comme la bande s’éloignait, il eut l’impression
que l’un des

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