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Mathieu et l'affaire Aurore

Mathieu et l'affaire Aurore

Titel: Mathieu et l'affaire Aurore Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jean-Pierre Charland
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une fois elle lui a bandé la bouche avec une courroie en cuir.
    — Pardon ?
    — Elle lui fermait la bouche avec une courroie en cuir.
    Fitzpatrick aussi savait se ménager des effets théâtraux.
    Le scénario lui était connu, Lauréat Couture s’était empressé d’aller quérir la nouvelle pièce à conviction des mains de Gédéon Gagnon.
    — Regardez cette sangle et dites-moi si vous l’avez déjà vue?
    — Oui.
    — Où l’avez-vous vue ?
    — Elle lui bandait la bouche avec ça.
    Quant à se trouver près de la table, le procureur de la Couronne s’y attarda un peu.
    — Voulez-vous regarder cette clé de poêle, de même que la poignée, et me dire si vous les avez déjà vues ?
    — Oui, elle lui brûlait les doigts avec ça.
    — Vous avez vu ça, mademoiselle ?
    — Oui.
    Un sanglot parvint de la silhouette noire. L’accusée pleurait sur elle-même.
    — L’avez-vous vue chauffer le tisonnier? Questionna encore Fitzpatrick.
    — Oui.
    — Savez-vous si c’était bien chaud, quand elle l’a brûlée ?
    — Ah oui ! Il était rouge.
    Porté à cette température, un morceau de métal marquait la chair irrémédiablement. Pour ne laisser aucun doute à ce propos, il demanda encore :
    — Sentiez-vous quelque chose dans la chambre ?

    — Ça sentait le chauffé, la peau brûlée, dans toute la maison.
    — Où la brûlait-elle comme ça ?
    — Partout.
    La réponse demeurant vague, l’homme voulut des éclaircissements.
    — Partout, où ?
    — Sur les jambes, sur les pieds, sur les cuisses.
    — Et ce fer à friser, mademoiselle, vous le connaissez ?
    — Oui. Maman lui arrachait les cheveux...
    La révélation s’accompagna d’une rumeur effarée. Tous les instruments découverts par l’assistance le premier jour du procès prenaient un sens lugubre.
    — A qui appartenait-il ?
    — C’était à maman.
    — Vous l’avez remis à la justice ?
    — Je l’ai donné à monsieur Couture.
    Francœur se doutait qu’elle remettait des objets au policier. Il avait pourtant souhaité jusque-là la voir maintenir la version des faits présentée à l’enquête du coroner.
    — Comment s’en servait-elle ?
    — Elle arrachait les cheveux de ma petite sœur avec ça.
    — Quand est-ce arrivé ?
    — Quinze jours avant sa mort.
    Le procureur de la Couronne changea de sujet abruptement.
    — Maintenant, couchiez-vous dans la même chambre que votre petite sœur ?
    — ... Oui.
    Mathieu comprenait l’hésitation. Fitzpatrick approchait un peu trop de réalités... délicates, honteuses.
    — Comment se conduisait-elle ?

    — Je trouvais qu’elle se conduisait bien... excepté pour le pot.
    — Qu’est-ce qu’il y avait, pour le pot?
    — Maman ne voulait pas lui donner, ensuite, elle disait à tout le monde qu’elle était malpropre.
    Fitzpatrick affecta de prendre la défense de la victime.
    Au fond, n’était-ce pas son véritable rôle ?
    — Pour le pot, ce n’était pas sa faute.
    — Non.
    Cette question réglée, il demanda :
    — Où couchait-elle ?
    — En haut.
    — Dans un lit ?
    — Elle a eu un lit rien que deux jours avant sa mort.
    Les gens étaient partagés entre l’envie de lyncher cette femme sur-le-champ et leur désir d’entendre toute cette histoire.
    — Aviez-vous un lit, vous ? Les autres enfants avaient-ils un lit ?
    — Oui.
    — Où couchait-elle donc ?
    — Par terre, dans sa chambre.
    — Est-ce qu’elle avait des couvertures ?
    — Non.
    Fitzpatrick l’interrogea longtemps sur la pauvreté de l’alimentation de la victime. La belle-mère pouvait la laisser quelques jours d’affilée sans manger. Après avoir tracé un tableau aussi sombre, il en arriva à l’élément qui hantait tous les esprits.
    — Pourquoi ne parliez-vous à personne de tout cela ?
    — Elle ne voulait pas qu’on en parle. Elle disait qu’on aurait une bonne volée.
    — Avez-vous déjà eu une volée ?

    — Oui. Trois fois.
    Chacun se rappelait que dans le cas de la victime, c’était presque tous les jours.
    — Avec quoi ?
    — Une fois avec le tisonnier et une autre fois, avec un éclat.
    Après avoir établi combien la menace de violence s’avérait suffisamment plausible pour réduire les enfants au silence, l’avocat s’intéressa aux derniers jours d’Aurore.
    — Quand elle est morte, votre petite sœur avait quelque chose à la tête ?
    — Elle avait la tête enflée.
    — Pourquoi donc ?
    — Quinze jours avant sa mort, maman lui a donné un coup sur la tête

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