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Mathieu et l'affaire Aurore

Mathieu et l'affaire Aurore

Titel: Mathieu et l'affaire Aurore Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jean-Pierre Charland
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heures avant le décès, laisserait l’impression d’une horrible fureur dans l’esprit des jurés.
    — N’est-il pas vrai, Marie-Jeanne, que ce matin-là votre mère est montée pour dire à Aurore de se lever, pour la nettoyer, parce qu’elle avait fait au lit comme d’habitude ?
    — Non. Maman a dit qu’elle ne resterait pas couchée toute la journée. Elle lui a dit de descendre, puis elle est descendue derrière elle. Elle n’y a pas touché, mais rendue contre le poêle, Aurore est tombée par terre. Maman a dit qu’elle faisait des « gestes », avant de lui avancer trois coups sur le dos.
    La gamine ne dérogeait pas à son récit. La conversation porta longtemps sur les tortures infligées avec le fer à friser, puis Francœur revint encore en arrière, fidèle à son cloaque.
    — Est-ce arrivé souvent qu’Aurore fasse ses besoins dans la maison, pour mettre ça dans les habits de ton père ?
    — Moi, j’ai vu maman mettre «ça» dans les habits de papa une fois. Les autres fois, je ne sais pas.
    — Dans quoi ?
    — Dans un capot.
    — C’est vraiment votre mère qui a fait ça ?
    — Elle a pris des saletés, elle les a mis dans le capot.
    L’avocat lui fit décrire l’événement trois fois, puis il chercha à lui en faire établir la date, sans succès. Cet entêtement convaincrait toutefois les jurés que depuis décembre, la victime avait subi de nombreux mauvais traitements. Tout le long du mois précédant sa mort, la fréquence et la brutalité de ceux-ci s’étaient accrues.
    — N’est-il pas vrai qu’une fois, Aurore a «fait» dans le chapeau de ton père et qu’elle a mis ça dans ses habits ?
    — Ça, je ne l’ai pas vu.
    — Dites-vous que ce n’est pas vrai ?
    — Je ne peux pas dire si c’est vrai ou non, je ne l’ai pas vu.
    Francœur laissa échapper un soupir lassé. En quatre heures dans la boîte des témoins, la petite fille de douze ans avait appris à doser ses effets et à s’exprimer avec assez de prudence pour ne plus lui donner de prise.
    — Votre Honneur, déclara-t-il en se tournant vers le juge, j’ai terminé.
    Après un pareil acharnement, la finale paraissait bien abrupte. Le magistrat regarda en direction du substitut du procureur général. Celui-ci secoua la tête pour signifier qu’il ne poserait
    aucune
    question
    supplémentaire
    à
    ce
    témoin.
    Marie-Jeanne prit un certain temps avant de comprendre qu’on en avait fini avec elle. Elle chercha Mathieu des yeux, celui-ci prit sur lui de la conduire hors de la salle.

    Chapitre 21

    En revenant dans la pièce du fond du couloir, Marie-Jeanne leva des yeux anxieux tout en demandant:
    — Ai-je bien fait?
    — Tu as été exceptionnelle.
    — Maman doit être fâchée.
    — Oui, mais elle ne pourra plus te faire de mal.
    Mathieu affichait une assurance un peu exagérée, dans les circonstances. Le verdict ne viendrait que dans quelques jours.
    — Ils vont la garder ?
    — Oui, je crois. De toute façon, tu ne seras plus dans la même maison, j’en suis sûr.
    Elle remua la tête, seulement à demi rassurée.
    — Tout à l’heure, je vais te conduire à l’hospice Saint-Joseph.
    D’ici là, j’aimerais entendre le témoignage de ton institutrice et de ton frère.
    La gamine accepta d’un signe de la tête, puis elle demanda, une pointe d’inquiétude dans la voix :
    — Personne ne viendra ?
    — Non. Je vais m’en assurer.
    Près de la porte, l’homme de faction à midi avait été relevé. Son remplaçant demeurait préoccupé, comme si ces deux intrus risquaient d’abîmer les jolis meubles. Le stagiaire affecta de lui parler comme à l’un des soldats de son bataillon.

    — Vous resterez ici, afin d’empêcher les curieux, ou pire, les journalistes, de venir l’embêter.
    — Ils sont tous dans la salle d’audience, ou l’oreille collée à la porte pour entendre la suite.
    — Je peux compter sur vous ? insista le jeune homme.
    — Je ne bougerai pas, assura l’employé.

    *****
Quand Mathieu retourna dans l’enceinte, il vit un membre du personnel du tribunal enlever la chaise placée dans la boîte des témoins. Une jeune femme, même jolie, ne bénéficierait pas du même avantage que Marie-Jeanne.
    Il revint à sa place en lui adressant un salut de la tête, une attention à laquelle elle répondit d’un sourire. L’avocat de la défense s’irrita une fois encore de la connivence entre le stagiaire et les témoins de l’accusation.
    —

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