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Mathieu et l'affaire Aurore

Mathieu et l'affaire Aurore

Titel: Mathieu et l'affaire Aurore Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jean-Pierre Charland
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le visage recueilli. « Le vieux cynique bourru fait une petite prière », songea Mathieu, disposé à lui pardonner dorénavant tous ses accrocs, nombreux, à la bienséance.
    — «J’ai fait ce jour, assisté du docteur Andronic Lafond, l’autopsie du cadavre qui fait le sujet de cette enquête... »
    Le médecin tourna la tête afin de demander :
    — Picard, vous avez eu le temps de prendre cela en note?
    — J’ai même placé des virgules là où elles sont nécessaires.
    Le vieil homme esquissa un sourire, son premier, puis chercha un ruban à mesurer, en donna un bout à son collègue.
    — « Le cadavre est celui d’une fille de dix à onze ans et de quatre pieds six pouces de taille, poursuivit-il. Les muscles sont en rigidité cadavérique et la décomposition n’est pas commencée. »
    Marois regarda de nouveau attentivement le corps, prit un bras entre le pouce et l’index.
    — Elle ne vous semble pas trop maigre ? demanda-t-il à son collègue.
    — Les enfants ne sont jamais bien gras, par ici. Puis, nous sommes en février, certains ne trouvent que des patates sur la table familiale depuis décembre ou janvier dernier.
    — Elle entre encore dans sa robe de première communiante, commenta le médecin légiste.
    L’observation tira un demi-sourire au docteur Lafond.
    — Cela peut aussi être celle d’une aînée, d’une voisine, d’une cousine.
    — Je la trouve tout de même particulièrement émaciée, mais cela n’ira pas dans le rapport. Si quelqu’un me pose la question au procès, je le dirai. Vous nous entendez, Picard ?
    Sans lever la tête de sa feuille, le jeune homme formula un « Oui, oui » un peu las.
    — Passons maintenant aux choses sérieuses, nous allons placer les lampes au fond, sur la table...
    Un grattement, dehors, lui fit lever la tête. Une ombre passa devant le soupirail.
    — D’abord, masquez cette ouverture avec votre manteau.
    Nous ne laisserons tout de même pas des vicieux se rincer l’œil sur elle.
    Le stagiaire obéit pendant que le médecin revêtait un long tablier en cuir. De retour sur sa chaise, Mathieu prit une longue aspiration, essaya de faire le vide dans son esprit.
    Heureusement, la fraîcheur des lieux l’aidait à contenir sa terrible envie de vomir.
    — «À l’examen, on remarque un grand nombre de blessures extérieures. »
    Le praticien enchaîna avec une interminable nomenclature de plaies,
    de
    bosses,
    d’abrasions,
    de
    décolorations
    de
    la peau, d’ecchymoses visibles sur la jambe, la cuisse et le pied droits. Penché sur un endroit où la chair semblait particulièrement meurtrie, il demanda :
    — Lafond, pouvez-vous approcher la lampe ?
    Son collègue obtempérant, il plaça un doigt près du genou.
    — D’après vous, qu’est-ce qui a produit cette marque-là?
    — Longue et étroite comme cela... Un bâton? '
    L’autre levait les yeux pour chercher ceux de son collègue, visiblement dégoûté.
    — Peut-être même la lanière d’un fouet. Ceux que l’on prend pour les chevaux, ou les attelages de bœufs.
    Le médecin regarda le stagiaire en disant :
    — Ecrivez bien mes mots exacts, jeune homme. Tout à l’heure, je mettrai même mes initiales en marge, pour souligner le constat : « On remarque également du même côté, en arrière et à la partie supéro-interne de la cuisse, une blessure de six pouces de long et de un demi à un pouce de large. Cette blessure, et d’autres présentant le même caractère, peuvent avoir été produites soit par une mise de fouet ou un objet contondant étroit. »
    Mathieu acquiesça de la tête quand il eut terminé. Une mise de fouet, c’était une lanière, souvent composée de multiples pièces de cuir de bœuf tressées ensemble. L’instrument causait
    une
    douleur
    suffisante
    pour
    soumettre
    un
    animal récalcitrant de grande taille, à la peau épaisse. Sur la cuisse d’une petite fille..
    Le médecin s’attacha ensuite à l’examen du pied, de la jambe et de la cuisse gauches, poursuivant sa litanie macabre, dont quelques évocations se révélèrent pires que les autres.
    Avec un scalpel, il soulevait parfois la peau afin de constater des dégâts internes. Il répéta cette précaution en examinant le visage :
    — «Au-dessus du sourcil droit, on remarque une grande plaque brunâtre avec dépression marquée au-dessus. Cette dépression a dû être causée par un coup direct sur le front avec un instrument contondant, causant un hématome qui a

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