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Mathieu et l'affaire Aurore

Mathieu et l'affaire Aurore

Titel: Mathieu et l'affaire Aurore Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jean-Pierre Charland
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partagée par les citadins, de beaucoup s’en fallait.
    — Souhaitons que la jument du curé se remette sans trop de mal de votre main militaire. Vous allez reconduire ces enfants chez eux.

    Le jeune homme voulait protester, de peur de manquer son train. De toute façon, des parents ou des voisins des Gagnon se trouvaient toujours présents sur les lieux.
    N’importe qui, parmi eux, pouvait accomplir cette corvée.
    Mais un coup d’œil sur Marie-Jeanne, sur ses grands yeux bruns effarouchés, le convainquit d’accepter.
    Cette fois, les prisonniers se mirent en marche sans plus protester, le détective derrière eux. Tous les autres prirent cela comme une invitation à se disperser.
    — Bon, pourquoi veut-il un sac ? grommela Mailhot en s’approchant du traîneau.
    D’un regard, il reconnut la paillasse, le vêtement de nuit.
    Le manche de hache produisit la plus grande impression sur lui.
    — Je reviens dans un instant, conclut-il après un silence.
    Le trio resta seul, planté debout à trois pas du parvis de l’église, fouetté par un vent venu du nord. Mathieu remarqua un mouvement derrière une fenêtre du presbytère, un déplacement de rideau. Le curé avait assisté à toute la scène depuis son poste d’observation, sans se mêler de rien. Les coups de fil échangés entre le policier et le bureau du procureur général, dans l’heure précédant le début des funérailles, ne lui avaient laissé aucun doute sur la conclusion de cette affaire.

    *****
    Debout en face de l’église avec les deux enfants, Mathieu envisageait de s’affubler comme Couture afin de s’éviter de sérieuses engelures aux oreilles quand le marchand général revint, les bras chargés.
    — Si vous devez faire les commissions de votre ami de Québec, ce ne serait pas chrétien de vous laisser attraper la mort.
    Mettez ça. Vous serez peut-être un peu moins élégant, mais cela vaut mieux qu’une pneumonie.
    Il lui tendit d’abord un casque fourré en lapin, en toile épaisse, avec des oreillettes s’attachant sous le menton.
    Mathieu ne se fit pas prier, son melon atterrit sur la banquette du traîneau.
    Son
    paletot
    en
    drap
    suivit
    le
    même
    chemin pour enfiler une lourde parka. Pendant ce temps, le marchand récupérait les objets rapportés de la maison des Gagnon pour les disposer dans un sac de drap blanc.
    A la fin, Mailhot récupéra aussi le vêtement et le couvre-chef abandonnés.
    — Je dépose vos habits au magasin, puis je lui apporte tout cela à la gare.
    Mathieu monta dans le traîneau, tout en invitant les enfants à venir le rejoindre. Les rênes étaient attachées à un anneau situé à l’avant de la voiture. Cela suffisait à décourager tout à fait la jument de bouger. Marie-Jeanne se retrouva à sa gauche et Georges, à sa droite. Ils seraient bien à l’étroit sur le siège. Lassés de se tenir ainsi immobiles dans le froid depuis de longues minutes, ils remontèrent la robe de la carriole sur leurs jambes.
    — Allez, avance ! encouragea le jeune homme en secouant un peu les guides en cuir.
    Le cheval agita la tête, bougea ses sabots, sans toutefois obéir.
    — Pas comme cela, intervint la fillette en tendant la main.
    Elle saisit une des courroies, fit un geste vif de tout l’avant-bras pour la faire claquer sur le dos de la bête en répétant «Avance» d’une voix forte. Cette fois, un peu à contrecœur, l’animal se mit en route. Mathieu reprit les rênes pour le diriger vers l’est dans la rue Principale.
    — Vous savez conduire des chevaux, remarqua le citadin.
    — J’ai regardé faire papa. Elle doit savoir qui est le maître, sinon elle n’en fera qu’à sa tête.
    «Ces gens gagnent leur vie avec des animaux capables de les estropier d’un coup de sabot, songea le jeune homme.
    Ils doivent imposer leur volonté. » Dans d’autres domaines, la fillette à ses côtés présentait une moins grande assurance.
    Pendant que le traîneau s’engageait dans le chemin de traverse, elle demanda à voix basse :
    — Maintenant, que va-t-il nous arriver ?
    — Vous avez sans doute des parents capables de s’occuper de vous.
    Elle restait pensive, les yeux fixés sur la campagne environnante.
    — Pendant la maladie de maman, je suis allée dans un orphelinat à Québec, avec Aurore. Je ne veux pas y retourner.
    Elle évoquait sa mère naturelle, décédée en 1918.
    — Je ne veux pas, répéta-t-elle encore, butée.
    — ... Vous y êtes restées longtemps ?
    —

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