Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
Mathieu et l'affaire Aurore

Mathieu et l'affaire Aurore

Titel: Mathieu et l'affaire Aurore Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jean-Pierre Charland
Vom Netzwerk:
changer de sujet.
    — La comparution a duré quelques minutes, le temps de décréter l’interdit de publication et de refuser la libération des accusés.
    — Seigneur ! Vous étiez sérieux, l’autre jour, quelqu’un voulait les faire sortir ?
    — Leur avocat. Saviez-vous que votre député plaidera pour eux ?
    Le marchand général laissa échapper un ricanement.
    — Télesphore possède quelques biens, je suppose que Francœur flaire une bonne affaire.
    — C’est un avocat, son devoir est de défendre ses clients de son mieux.
    — Sans compter que tous ensemble, les Gagnon forment un bon bloc d’électeurs.
    Les grands principes le laissaient froid. Seuls l’intérêt personnel et la petite politique lui semblaient animer les grands de ce monde.
    — Comme il a été élu par acclamation l’été dernier, rappela Mathieu, le député ne doit pas se sentir bien menacé. Je lui prête des motifs plus nobles.
    — Prêtez si vous voulez, il ne vous rendra rien.
    Des pas se rapprochaient. En tournant la tête, ils aperçurent Arthur Fitzpatrick venant vers eux, les pans de sa toge soulevés de chaque côté de lui.
    — Ah ! Picard, monsieur Mailhot, vous voilà. Nous allons entrer. Mon savant confrère ne saurait plus tarder, maintenant.
    Dans la salle d’audience, ils trouvèrent une assistance un peu plus nombreuse que la veille. Le bouche à oreille attirait les amateurs d’histoires familiales scabreuses. Les accusés se manifestèrent dans la boîte, flanqués d’un agent de la paix. Leur avocat gagnait son siège.
    Une fois les principaux protagonistes de cette mauvaise pièce à leur place respective, le juge Choquette pouvait enfin prendre place dans son fauteuil, derrière le banc.
    — Maître Fitzpatrick, je vous écoute.
    — Nous allons entendre monsieur Oréus Mailhot, le juge de paix de Sainte-Philomène-de-Fortierville.
    En parcourant la distance depuis le fond de la salle jusqu’à la barre, le marchand échangea un regard avec Mathieu, cherchant encore à être rassuré. Puis, il se retrouva debout près du magistrat. Prêter serment ne prit qu’un instant.
    — Monsieur Mailhot, commença le substitut du procureur, vous assumez la fonction de juge de paix depuis longtemps ?
    Pendant un moment, l’état civil du témoin les occupa.
    En plus de permettre au greffier de colliger à son procès-verbal tous les renseignements relatifs aux acteurs de ce drame, l’entrée en matière permit au commerçant de retrouver un peu sa contenance.
    La déposition dura longtemps, guidée par les questions d’Arthur Fitzpatrick. Le procureur s’attarda sur la visite du couple Gagnon au magasin général l’été précédent, le scepticisme de son interlocuteur à l’égard du récit concocté par les parents. Il se termina sur le dernier jour, dans la maison de ferme, avec la découverte des multiples blessures sur le corps de l’enfant.
    — Votre Honneur, j’en ai terminé, affirma le procureur en regagnant son siège.
    Maître Francœur se leva à son tour en toisant Mailhot, comme pour jauger un adversaire.
    — Monsieur, vous n’avez aucune formation médicale.

    — Non.
    — Donc vos remarques, à propos des blessures de l’enfant, n’ont aucune valeur.
    — Mais moi, je les ai vues, ces blessures. Pas vous.
    Mathieu sourit: le marchand ne se laisserait pas faire, malgré son malaise. L’autre ne dissimula pas sa frustration.
    — L’été dernier, la petite fille vous a confirmé l’histoire de ses parents.
    — Elle a menti.
    — Pourquoi aurait-elle fait cela ?
    — Elle les craignait. Aurore redoutait sans doute de recevoir une raclée, si elle les contredisait.
    De nouveau, l’avocat afficha son déplaisir. Un témoin devait relater les faits, sans se livrer à une interprétation.
    — Vous n’avez aucune preuve de cela.
    — J’ai vu l’état de son pied. Le médecin a dû la visiter six fois les semaines suivantes pour cette blessure, elle est allée à l’hôpital pendant un bon mois.
    — Vous êtes donc en mesure de constater que ses parents se sont efforcés de lui fournir de bons soins.
    — S’ils ne l’avaient pas blessée en premier, cela aurait été une meilleure façon de s’occuper d’elle, vous ne croyez pas?
    En l’absence de tout jury, il ne servait à rien de le fustiger pour avoir formulé des arguments de ce genre. L’avocat se priva de demander au juge de rappeler cet homme à l’ordre.
    — Vous avez fait enquête auprès des petits

Weitere Kostenlose Bücher