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Mathilde - III

Titel: Mathilde - III Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Alain Pecunia
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son secours, dit le
préfet en se dressant sur ses ergots.
    – Mais racontez-nous cela, mon cousin, le pressa
Mme Dulong.
    – M’y autorisez-vous, comtesse ? demanda le préfet en
s’inclinant devant Mathilde qui déjà souffrait mille morts de cette
visite importune et s’apprêta à boire le calice jusqu’à la lie.
    Le préfet s’exécuta. Longuement, suscitant des
« oh ! » et des « ah ! » de ces
dames. Lorsqu’il eut fini, la timide Mireille Dupuis, bouleversée
par ce récit, apostropha Mathilde sur un ton de reproche :
    – Vous avez repoussé ce pauvre homme ?
    Pour Mme de La Joyette, dont la patience était largement
épuisée, cette phrase était de trop.
    – Je vous prie de me pardonner, dit-elle en inclinant joliment
son visage si gracieux. Sur le coup, j’avais oublié qu’il pût vous
intéresser, ma chère.
    – Comme tout borgne, manchot ou cul-de-jatte pourrait intéresser
notre petite Mireille, gloussa Germaine Choissou, du moment
que…
    – Je vous en prie ! la coupa sèchement le préfet Mafouin,
qui partageait à la fois les faveurs de Mireille Dupuis et de sa
cousine lorsqu’il logeait chez cette dernière et les avait initiées
toutes deux aux commodités du triolisme en pareille circonstance,
vexé d’être assimilé à l’un des infirmes énumérés par Germaine
Choissou.
    – Excusez-moi, baron, fit cette dernière en s’inclinant de
nouveau généreusement devant le père de son hôtesse, mais nous
avons fait bonne chère ce midi et j’ai légèrement bu.
    – Ah ! chère madame…
    – Appelez-moi Germaine, sans façon, dit Mme Choissou en émettant
un rire de crécelle.
    – Germaine, reprit le baron Stern avec emphase, une femme qui
aime la chère ne peut qu’aimer l’amour !
    Germaine Choissou gloussa de plus belle.
    Mme de La Joyette était consternée.
    Pour donner le change, elle sonna sa domesticité.
    – Du café, fort, pour tout le monde ! ordonna-t-elle
lorsque Jeannette apparut pour prendre ses ordres.
    Fort heureusement, alertées par Louison, Éléonore et Miss Sarah
vinrent à son secours.
    – Ainsi, vous avez eu la gentillesse de venir présenter ensemble
vos condoléances à ma belle-sœur ? lança d’un air faussement
ingénu Éléonore Bouteux.
    – Oui, répondirent en chœur les trois dames en tentant en vain
de reprendre une mine de circonstance.
    – Et rien d’autre ? fit-elle.
    – Non ! s’étonnèrent les trois dames en se regardant les
unes les autres.
    – Pourtant, j’aurais pensé, même si les circonstances ne s’y
prêtent pas, que notre cher préfet avait une grande nouvelle à nous
annoncer.
    – Ah ! firent les trois dames en tournant leurs regards
ébahis vers Marcellin Mafouin qui en avala son petit four de
travers et se mit à tousser.
    Ce dernier ne pouvant répondre à ces dames, celles-ci tournèrent
de nouveau leurs regards affamés de réponse vers Éléonore.
    – Quoi ? demandèrent-elles à l’unisson.
    – Essayez de deviner, intervint perfidement l’Américaine.
    – Deviner ? Mais quoi ? fit Mireille Dupuis à
l’entendement dépassé par la situation et ouvrant des yeux grands
comme des soucoupes.
    – Ne me dites pas… ? fit Mme Choissou, l’air effaré, après
un instant de réflexion.
    – Non ! se récria à son tour la veuve du notaire.
    – Si ! fit Éléonore tout sourire.
    – Mais avec qui ? demanda Germaine Choissou.
    – Mais de quoi parlez-vous ? s’étonna Mireille Dupuis de
plus en plus dépassée.
    – Oui, avec qui, mon cousin ? interrogea d’une voix blanche
Mme Dulong.
    – Léonie, je vous en prie, répondit celui-ci, ce n’est qu’un
projet…
    – Un projet de quoi ? fit Mireille Dupuis au bord des
larmes.
    – De mariage, petite idiote, lui lança Mme Dulong, sa
« bienfaitrice », d’une voix cinglante.
    – Juste de fiançailles, se défendit le préfet.
    – Et qui est l’heureuse élue ? interrogea Mme de La Joyette
qui se délectait de la scène avec ravissement depuis l’intervention
de sa belle-sœur.
    – Cela n’est pas encore officiel, protesta Marcellin Mafouin
sous le regard peu amène de sa cousine.
    – Mais ce le sera dimanche prochain, quasiment demain, minauda
Éléonore.
    – Alors, Marcellin ? jeta Mme Dulong d’une voix froide. Ne
soyez pas plus grossier personnage que vous ne l’êtes déjà.
Répondez à notre légitime question et mettez fin à cette ignoble
cachotterie.
    – Non ! se rebiffa le préfet. Il n’en est

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