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Mélancolie française

Mélancolie française

Titel: Mélancolie française Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Eric Zemmour
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céder devant Hitler ou s’aliéner l’alliance anglaise et lui déclarer la guerre, seule ; comme en 1870.
    Les Britanniques n’eurent pas ces états d’âme. Travaillés par un pacifisme aussi puissant que le nôtre, et par la fascination des élites britanniques pour le cousin « germain », ils avaient signé en 1935 un accord de réarmement naval avec l’Allemagne, en violation des clauses du traité de Versailles. Sans se soucier de l’avis français. La même année, les Français renoncèrent à faire campagne lors du référendum sur le retour de la Sarre dans le Reich. Après Munich, les milieux d’affaires anglais convainquirent le pouvoir britannique que la concurrence germanique mettait une nouvelle fois en danger – à l’instar de la situation du début du siècle – leur domination commerciale. Le gouvernement britannique profita du répit « munichois » pour édifier, en quelques mois d’une activité acharnée, une magnifique aviation de combat, tous ces Hurricane et Spitfire qui gagnèrent la bataille d’Angleterre de 1940 et sauvèrent Londres de l’invasion allemande. Depuis Waterloo, la France ne maîtrisait plus son destin. Elle avait accepté d’être le fidèle second de l’Angleterre. Le soldat qui se bat – ou pas – en fonction des intérêts de l’empire de Sa Gracieuse Majesté.
    En 1940, Pétain n’avait pas changé. Attendre, toujours attendre. Qui ? Les Américains, que diable ! Sauf que, cette fois-ci, l’état-major français ne serait pas sauvé par les Russes. On peut estimer avec Raymond Aron que la France, en déclin démographique depuis le XIX e siècle, n’aurait pas survécu à une seconde saignée égale à celle de 1914. En quelques semaines de l’offensive allemande, les Français, contrairement à la légende, se battirent valeureusement et eurent autant de pertes – proportionnellement – qu’en 1914. Cent mille morts dont on ne parle jamais. La France, « tuée » par sa victoire de 1916, avait été « sauvée » par sa défaite de 1940. La courbe des naissances, de manière inexplicable, remonta à partir de 1942, alors qu’elle ne s’était jamais redressée depuis la chute de 1812. L’armistice tant vilipendé par de Gaulle et les siens, depuis soixante ans, aurait permis à un pays moribond de refaire ses forces.
    Je ne parviens pas à savoir comment mon destin et celui des miens a été affecté par cet armistice : lorsqu’il arrêta l’avancée des chars allemands, Pétain sauva la vie de tous les Français d’Algérie de confession juive ; mais quand il supprima ensuite le décret Crémieux, ôtant la nationalité française à des Juifs redevenus indigènes malgré leur patriotisme flamboyant, il les transformait en gibier de camp dès que la zone libre fut occupée et que l’armée allemande, alliée à l’Italie, menaça l’Algérie par la Tunisie.
    L’armistice de juin 1940 a arrêté les Allemands an moment où ils ne l’étaient pas. L’empire français et toute l’Afrique leur tendaient les bras. Les Anglais de Montgomery étaient encore loin. Deux ans plus tard, il n’en sera plus de même. Goering prétendait même que cet « armistice avait été la pire erreur d’Hitler ». Churchill ne dira pas autre chose en 1944: « L’armistice nous a en somme rendu service. Hitler a commis une faute en l’accordant. Il aurait dû aller en Afrique du Nord, s’en emparer pour continuer sur l’Égypte. Nous aurions eu alors une tache plus difficile. » De Gaulle confiera lui-même au général Robert Odic, qui était en 1940 chef d’état-major de l’armée de l’air : « N’avouez jamais que l’armistice ne pouvait pas être évité. »
    Dès son arrivée au pouvoir, Pétain voulut rendre à l’Allemagne la monnaie de sa pièce ; imiter la conduite souterraine de la république de Weimar après l’armistice du 11 novembre 1918 ; préparer en douce une armée pour la revanche de la revanche de la revanche ; et en attendant, « f inassieren »… Le 7 septembre 1940, le général Weygand était nommé délégué général en Afrique, pour « rétablir la confiance, l’espoir, l’unité de vues, rassurer les populations et les préserver contre toute tentative d’agression ». Weygand forma de nouvelles troupes, rajeunit et renouvela les cadres, dissimula du matériel, dans des fermes, des grottes, des forêts, fabriqua clandestinement des armements. Les Allemands finirent par s’en apercevoir, exigèrent et

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