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Moi, Claude

Moi, Claude

Titel: Moi, Claude Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Robert Graves
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punis en fermant les greniers publics pendant dix jours ; mais sans doute leur avait-il pardonné depuis, car il venait de faire jeter de l’argent du haut des toits du palais. Un cri joyeux s’éleva : « Plus de pain et moins d’impôts, César ! Plus de pain et moins d’impôts ! » Caligula était furieux. Il envoya un peloton de Germains le long des bancs, et une centaine de têtes tombèrent.
    L’incident troubla les conspirateurs en leur rappelant la brutalité des Germains et leur dévouement extraordinaire à Caligula. À cette époque, il n’y avait pas un citoyen romain qui ne souhaitât la mort de l’Empereur et n’eût volontiers, comme on dit, mangé de sa chair. Mais pour ces Germains, c’était le plus glorieux héros du monde. Qu’il s’habillât en femme, qu’il abandonnât au galop son armée en marche, qu’il leur présentât Césonie nue en se vantant de sa beauté, qu’il brûlât sa plus belle villa d’Herculanum sous prétexte que sa mère Agrippine y avait été emprisonnée deux jours en se rendant dans l’île où elle était morte – toutes ces actions incompréhensibles ne le rendaient que plus digne à leurs yeux d’être adoré comme un être divin. Ils hochaient la tête d’un air entendu : « Oui, les dieux sont ainsi. On ne sait jamais ce qu’ils vont faire. Tuisco et Mann, là-bas, dans notre patrie bien-aimée, sont tout à fait pareils. »
    Cassius méprisait le danger et se souciait peu de ce qui pouvait lui arriver à lui-même, du moment que Caligula était assassiné ; mais les autres conjurés, moins ardents, se demandaient quelle vengeance tireraient les Germains du meurtre de leur héros. Ils commencèrent à se dérober : Cassius n’arrivait pas à les mettre d’accord sur le plan d’action convenable. Ils proposaient de s’en remettre au hasard. Cassius les traita de lâches et les accusa de chercher à temporiser. « Au fond, dit-il, ce que vous voulez, c’est qu’il parte tranquillement pour l’Égypte. » Le dernier jour des fêtes arriva, et Cassius les avait décidés à grand-peine à convenir d’un plan acceptable, quand Caligula annonça tout à coup qu’il prolongeait la fête de trois jours. Il voulait jouer et chanter une pièce allégorique qu’il avait composée lui-même pour en régaler les Alexandrins, mais qu’il trouvait juste de montrer d’abord à ses compatriotes.
    Les plus timorés des conspirateurs trouvèrent là un nouveau prétexte pour biaiser. « Oh ! mais, Cassius, voilà qui change tout. Tout devient beaucoup plus facile. Nous pouvons le tuer le dernier jour, quand il quittera la scène. C’est beaucoup mieux. Ou quand il y montera. Comme tu veux. »
    Cassius répondit : « Nous avons fait un plan en jurant de nous y tenir, et nous nous y tiendrons. C’est un plan excellent. Pas un défaut.
    — Mais maintenant nous avons tout le temps. Pourquoi ne pas attendre encore trois jours ?
    — Bien, dit Cassius. Si vous ne voulez pas exécuter ce plan aujourd’hui, comme vous l’avez juré, je m’en chargerai seul. Je n’aurai pas beaucoup de chances contre les Germains – mais je ferai de mon mieux. S’ils sont trop forts pour moi, j’appellerai : « Vinicius, Asprenas, Bubo, Aquila, Tigre ! pourquoi n’êtes-vous pas là comme vous l’aviez promis ? »
    Là-dessus ils acceptèrent de s’en tenir au plan original. Vinicius et Asprenas devaient décider Caligula à quitter le théâtre vers midi pour aller faire un plongeon dans la piscine et prendre une collation rapide. Quelques minutes plus tôt Cassius, le Tigre et les autres capitaines conjurés se seraient glissés sans bruit par la porte des coulisses et postés à l’entrée du passage couvert qui menait du théâtre au palais neuf. Asprenas et Vinicius feraient passer Caligula par ce raccourci.
    La pièce annoncée ce jour-là était Ulysse et Circé. Caligula avait promis qu’à la fin il jetterait des fruits, des gâteaux et de l’argent à la foule. Il les jetterait naturellement de l’extrémité voisine de la porte, où se trouvait sa loge : aussi, à peine les portes ouvertes, la foule s’engouffra-t-elle dans le théâtre et se précipita-t-elle vers les places les plus rapprochées. En général les femmes se mettaient à part, ainsi que les chevaliers et les sénateurs. Mais ce jour-là tout le monde était mélangé. Je vis un sénateur qui était arrivé en retard obligé de s’asseoir entre un esclave

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