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Moi, Claude

Moi, Claude

Titel: Moi, Claude Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Robert Graves
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Elle ne serait pas humaine…
    — Je ne crois pas qu’elle le soit, dit Postumus.
    — Et quand Auguste s’apercevra tout à coup qu’elle l’a trompé, ne crois-tu pas qu’il sera aussi impitoyable envers elle qu’il l’a été envers ta mère ?
    — Elle l’empoisonnera avant.
    — Germanicus et moi l’en empêcherons. Nous avertirons Auguste. Ne désespère pas, Postumus. Tout finira bien. Je t’écrirai aussi souvent que je pourrai ; je t’enverrai des livres. Je n’ai pas peur de Livie. Si tu ne reçois pas mes lettres tu sauras qu’on les intercepte. Regarde avec soin la septième page de tous les livres cousus que tu recevras de moi : si j’ai quelque chose de particulier à te dire je l’écrirai là avec du lait. C’est un procédé égyptien : l’écriture reste invisible jusqu’à ce qu’on la chauffe devant une flamme. Oh ! écoute battre les portes ! Il faut t’en aller. Ils sont au bout du corridor.
    Les larmes aux yeux, il m’embrassa tendrement, en silence, et sortit vivement sur le balcon. Il enjamba le rebord, agita la main en signe d’adieu et se laissa glisser le long de la vieille treille qui l’avait aidé à monter. J’entendis sa course à travers le jardin, puis un instant plus tard les cris des Gardes.
     
    Je ne me rappelle rien de ce qui se passa le mois suivant. Je fus malade – si malade qu’on parlait déjà de moi comme d’un mort. Quand je commençai à me rétablir Germanicus était à la guerre, Postumus déshérité et exilé pour la vie. On avait choisi pour l’y reléguer l’île de Planasie, située à douze milles de l’île d’Elbe dans la direction de la Corse. De mémoire d’homme elle n’avait été habitée, mais on y trouva des huttes de pierre préhistoriques dont on fit un quartier pour la Garde et une maison d’habitation pour Postumus. L’île avait à peu près la forme d’un triangle ; le côté le plus long mesurait environ deux lieues et demie. Elle était rocailleuse, sans un arbre ; les pêcheurs de l’île d’Elbe y venaient l’été pour poser leurs casiers à homards. Mais Auguste le leur fit interdire, de peur que Postumus n’en corrompît un et ne réussît à s’évader.
    Tibère restait le seul héritier d’Auguste, avec Germanicus et Castor pour perpétuer la lignée – celle de Livie.

12
     
     
    Postumus exilé, Germanicus à la guerre, Athénodore était le seul ami qui me restât. Bientôt il me quitta aussi pour retourner à Tarse, sa ville natale. Je correspondis régulièrement avec lui pendant deux ans, au bout desquels il mourut. Tarse institua une fête et un sacrifice annuels à sa mémoire : les principaux citoyens s’y relayaient pour lire d’un bout à l’autre sa Courte Histoire de Tarse : on commençait à l’aube et on finissait après le coucher du soleil.
    Germanicus m’écrivait de temps en temps – des lettres aussi courtes qu’affectueuses. Un bon chef d’armée n’a pas le loisir d’écrire longuement aux siens. Je fus très fier quand il me pria de lui résumer, aussi vite et aussi complètement que possible, tous les rapports sérieux que je pourrais trouver dans les bibliothèques sur les coutumes des différentes tribus balkaniques qu’il combattait, la force et la position de leurs villes, leur tactique et leurs ruses de guerre traditionnelles. Avec l’aide de Sulpicius et d’un petit groupe de chercheurs que je faisais travailler jour et nuit, je réussis à rassembler exactement ce qu’il voulait et à lui en envoyer un exemplaire en moins d’un mois. À ma grande fierté, il m’écrivit presque aussitôt pour me réclamer une édition de vingt exemplaires, qu’il voulait faire circuler parmi ses officiers supérieurs. Le livre lui avait déjà été d’un grand secours. J’y exposais en détail l’extraordinaire fraternité militaire secrète qui existait entre les tribus ; j’y parlais aussi des arbres et buissons sacrés, différents pour chacune, sous lesquels les habitants des villages avaient coutume d’enterrer leurs réserves de blé, d’argent et d’armes lorsqu’ils devaient s’enfuir à la hâte.
    Germanicus me promit de signaler à Auguste et à Tibère les services que je lui avais rendus. Cependant on ne fit pas mention officielle de mon livre, de peur que l’ennemi, en entendant parler, ne modifiât ses dispositions. Auguste me récompensa officieusement en me nommant membre du collège des Augures, mais il était

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