Mon témoignage devant le monde-Histoire d'un Etat clandestin
être un jour d’hommage à Staline et à Hitler, mais un jour de mobilisation pour une lutte intrépide. La Pologne a été vaincue. L’attaque meurtrière de l’armée allemande n’a pas rencontré une résistance appropriée. […]
L’Histoire a asséné à la nation polonaise une terrible leçon.
Pour nous, aujourd’hui, le chemin de la liberté passe par les chambres de torture de la Gestapo et du Guépéou, par la prison et les camps de concentration, au milieu des déportations et des exécutions de masse.
Opprimés, persécutés et spoliés, nous saisissons enfin l’amère vérité. Les destinées de notre pays ne peuvent plus être confiées aux représentants des classes qui se sont montrées incapables de faire de la Pologne un pays grand, puissant et juste. Une Pologne des grands propriétaires terriens, des capitalistes et des banquiers ne peut plus exister ; ce sont les ouvriers, les paysans et les intellectuels qui rebâtiront le pays.
À l’ouest, l’Angleterre et la France combattent l’Allemagne. La nouvelle armée polonaise se bat au coude à coude avec nos Alliés. Mais nous devons comprendre que le destin de la Pologne ne se joue pas sur la ligne Maginot ou sur la ligne Siegfried. L’heure décisive sonnera pour la Pologne lorsque le peuple polonais lui-même sera aux prises avec l’envahisseur. Avec une patience obstinée nous attendrons cette heure. Nous devons aiguiser pour cette heure notre finesse et notre sagesse politiques. Il faut accumuler des armes et entraîner nos combattants.
Dans la nouvelle Pologne, il faut que le pouvoir appartienne au peuple. Il faut que la nouvelle Pologne soit la patrie de la liberté, de la justice et de la démocratie. Le peuple souverain fera des lois qui établiront un nouveau régime – le socialisme.
Il faut que la nouvelle Pologne répare les erreurs du passé. Il faut que la terre soit partagée entre les paysans, sans indemnité aux propriétaires. Il faut que les mines, les banques, les usines soient soumises au contrôle de la société. Il faut décréter la liberté de parole, de religion et de conscience lxviii . Les écoles et les universités doivent s’ouvrir aux enfants du peuple.
Les épreuves du peuple juif dont nous sommes chaque jour les témoins doivent nous apprendre à vivre en bonne harmonie avec ceux qui sont persécutés par notre ennemi commun lxix . Privés de notre propre État, nous devons apprendre à respecter les aspirations des peuples ukrainien et biélorusse.
Lorsque nous aurons établi dans une Pologne libérée un gouvernement du peuple, ce sera notre devoir d’édifier une Pologne de justice, de liberté, de prospérité.
Dans cette période d’oppression sans précédent dans l’histoire de la Pologne et même du monde, nous venons stimuler votre esprit de lutte et de persévérance.
En ce 1 er jour de mai, que les anciens mots d’ordre révolutionnaires retentissent dans toute la Pologne. »
Je distribuai une centaine de tracts et en gardai un pour moi.
Des quatre partis politiques engagés dans la Résistance, celui qui exerçait l’influence la plus forte sur l’opinion polonaise de ce temps était le mouvement socialiste, représenté par le PPS . Ce parti possédait les traditions les plus riches de la lutte pour l’indépendance. C’est ce qui avait achevé de le rendre si influent parmi les ouvriers polonais qui constituaient l’avant-garde des combattants pour l’indépendance.
Les combattants les plus courageux et les plus désintéressés sortaient de leurs rangs. En 1905, le PPS multiplia les attentats contre les dignitaires du tsar, ce que nombre de ses membres ont payé de leur vie. La presse clandestine de la Résistance est l’héritière de la tradition du Robotnik (L’Ouvrier), le journal du PPS qui, avant la Première Guerre mondiale, a su braver la police du tsar et appeler la nation polonaise à résister à ses oppresseurs. Les ouvriers jouèrent un rôle capital dans la défense de Warszawa sous les ordres de feu Mieczyslaw Niedzialkowski. Quand Warszawa tomba, Niedzialkowski non seulement refusa de signer la capitulation, mais refusa de la reconnaître comme un fait accompli. Lorsque les Allemands entrèrent dans la ville, au lieu de se cacher ou d’essayer de fuir, il continua à vivre chez lui, sous son nom. Au cours d’un interrogatoire de la Gestapo, Himmler en personne l’interrogea :
— Que voulez-vous de nous ? Qu’attendez-vous ? lui
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