Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
Montségur, 1201

Montségur, 1201

Titel: Montségur, 1201 Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jean (d) Aillon
Vom Netzwerk:
ordinairement pas sur
les hommes, confirma le comte, mais l’autre hiver, une de ces bêtes s’est
comportée de façon terrifiante. Je me demande parfois si le Malin ne leur a pas
donné autant d’esprit qu’à nous. Nous l’avions acculée au sommet d’une falaise.
L’animal avait éventré plusieurs chiens, ainsi qu’un cheval, mais il était
blessé. Nous l’entourions avec nos épieux. Alors, il s’est dressé et s’est
tourné vers nous. Dans un grognement à glacer le sang, et avec une rapidité
incroyable, il a écarté l’épieu que tenait un de mes amis et s’est saisi de lui
avec ses deux pattes avant.
    En parlant, le comte mimait la scène avec un tel
réalisme qu’on aurait pu croire qu’il était lui-même l’ours.
    — Il l’a étreint comme pour l’étouffer, puis
il s’est retourné vers le précipice et s’y est jeté, roulant jusqu’en bas en
utilisant le corps de mon ami comme un matelas ou un édredon !
    — Et alors ? demanda Wolfram, ébahi.
    — Croyez-moi si vous le voulez, sire
chevalier, mais arrivé en bas, l’ours s’en est allé tranquillement, n’ayant
apparemment aucune autre blessure que celles qu’on lui avait faites.
    — Et votre ami ?
    — Brisé, déchiqueté et meurtri, il est mort
peu après dans d’affreuses souffrances.
     
    Le lundi matin, Guilhem, Wolfram et Sanceline
descendirent en ville pour se renseigner sur Enguerrand. Alaric était resté au
château pour soigner un cheval.
    Un grand marché avait lieu le vendredi devant
l’abbaye et les boutiques d’artisans étaient nombreuses dans les ruelles. Après
être passés devant une potence où était suspendu un voleur essorillé et à la
main tranchée, ils commencèrent leur recherche par une rue où se trouvaient des
mégissiers, des marchands de ceintures et des pellicers [53] . À chaque échoppe, Sanceline
expliquait chercher son père, le Parfait Enguerrand dont elle n’avait plus de
nouvelles depuis deux mois.
    C’est un des mégissiers qui se souvint de lui.
    — Il voulait du cuir pour réparer lui-même
ses chaussures, leur dit-il. Je lui ai offert l’hospitalité. Il m’a béni, ainsi
que toute ma famille, puis a passé la nuit dans ma maison avant de repartir le
lendemain.
    — Quand était-ce ? demanda Guilhem.
    — Il y aura cinq semaines demain, seigneur.
    — A-t-il dit où il allait ? interrogea
Sanceline.
    — Non, jeune femme, mais il a pris le pont
sur l’Ariège. Je lui ai déconseillé d’aller dans la montagne avec le froid,
mais il m’a répondu que le Seigneur pourvoirait à tout.
    — Seul, c’était folie ! intervint un
marchand de ceintures et de baudriers qui tenait la boutique voisine. Les loups
sont affamés là-haut.
    — Je lui ai donné du pain et de l’orge, dit
le mégissier. Il avait de quoi se nourrir trois jours, mais pas plus.
    — Il est peut-être seulement allé à
Castelsarrasin [54] ,
suggéra le marchand.
    Soudain ils entendirent les éclats de voix d’une
altercation. Elles venaient de la place où avait lieu le marché, en face de
l’entrée de l’abbaye de Saint-Volusien. Par curiosité, ils s’y rendirent.
    Un sergent à pied du comte de Foix et trois hommes
d’armes, reconnaissables aux pals d’Aragon sur leurs surcots, se disputaient
avec trois moines cisterciens, en tunique de laine écrue aux larges manches.
Les frocarts paraissaient être protégés par une poignée d’augustins de
l’abbaye.
    — Il y a au moins dix témoins, père
prieur ! cria le sergent. Si vous m’empêchez de l’emmener au château, je
le saisirai de force !
    — Ces moines sont mes hôtes, et l’abbaye ne
dépend pas du château ! répliqua celui qui avait été interpellé sous le
titre de prieur.
    Il désigna l’un d’eux, petit et
grassouillet :
    — Frère Gui est légat de notre Saint-Père, et
Pierre de Castelnau est envoyé ici par l’abbé de Cîteaux pour combattre
l’hérésie.
    Il avait montré du doigt un autre moine, le plus
grand des trois.
    Si le sergent parut un instant déconcerté par les
titres des religieux, il désigna pourtant le troisième religieux.
    — Celui-ci a maudit notre comte, père
prieur ! Et il n’est ni légat ni envoyé par Cîteaux.
    — Est-ce vrai, Bernard d’Urgio ? demanda
le prieur au dernier, un homme au regard de braise.
    — Certainement pas ! répliqua celui
qu’on accusait. J’ai simplement dit que le seigneur comte avait ravagé Urgel et
sa cathédrale, et

Weitere Kostenlose Bücher