Montségur et l'enigme cathare
finalement comme
dualiste.
Aux environs de 660, un Arménien du nom de Constantin fonde,
dans ce pays soumis à différents conflits de cultures et de religions, une
nouvelle secte qui se distingue par l’admiration particulière qu’elle manifeste
pour l’apôtre Paul. Ce seront les Pauliciens qui, pendant près d’un siècle, constitueront
un groupe de guerriers farouches contre lesquels Byzance devra lutter en même
temps que contre les Arabes. Vers la fin du VIII e siècle,
leurs missionnaires, fort actifs, atteignirent la Bulgarie, et jusqu’au XII e siècle, cette secte demeura très influente
dans les Balkans.
La doctrine des Pauliciens est mal connue parce qu’ils évitaient
de la divulguer aux non-initiés et allaient même jusqu’à se conformer
extérieurement aux cultes et aux règlements de l’Église chrétienne pour donner
le change et éviter des répercutions. Mais cette doctrine, on le sait, repose
sur la croyance en deux principes antagonistes. Pour les Pauliciens, c’est le Démiurge,
c’est-à-dire le Prince des Ténèbres, qui a créé le monde et les êtres vivants. Ils
rejetaient absolument l’Ancien Testament et considéraient l’Eucharistie comme
un geste vide de sens. Pour eux, la Croix, qu’elle soit l’instrument du
supplice infligé à Jésus, ou un symbole solaire, n’offrait aucune valeur
particulière. Malgré tout, ils ont cherché à se rapprocher du Christianisme, ne
serait-ce que pour le « noyauter », et aussi pour découvrir dans les
Écritures des arguments en faveur de leurs thèses. C’était une façon commode de
faire du prosélytisme sans trop se marginaliser, et surtout de constituer une
force d’autant plus agissante qu’elle se tenait dans l’ombre. De cette manière,
les Pauliciens étaient suffisamment nombreux au début du VIII e siècle pour influer sur la politique des
royaumes où ils se trouvaient. Sur le cours de l’Euphrate supérieur, ils
avaient même fondé une colonie qui se maintint longtemps par la force des armes,
à l’intérieur d’un pays déjà musulman. Vaincus en 878 par les Byzantins, bon
nombre d’entre eux se retrouvèrent soldats dans les armées impériales, et d’autres
furent déportés dans les Balkans. C’est là que les Pauliciens allaient trouver
un terrain favorable à l’expansion de la doctrine dualiste.
Les Slaves avaient commencé à s’établir dans la péninsule
balkanique à partir du VI e siècle, y
fondant des colonies dispersées et sans unité. Ce furent les Bulgares qui
assurèrent plus tard la cohésion entre les différents établissements slaves et
qui imposèrent leur nom au pays ainsi créé, au sud du Danube. Au milieu du IX e siècle, des missionnaires chrétiens envoyés
par Rome se mirent à évangéliser la Bulgarie qui, jusque-là, était demeurée au
stade d’un néo-paganisme slave. Mais, pour des raisons évidemment politiques, le
patriarche de Byzance, mécontent de voir que Rome s’intéressait à des régions
qu’il considérait comme relevant de son autorité, envoya ses propres missionnaires.
Il y eut donc une rivalité affirmée entre les Chrétiens de rite romain et les
Chrétiens de rite grec (il n’y avait pas encore eu le schisme), et les sectes à
tendances manichéennes profitèrent de la situation, les Pauliciens les premiers.
Dans ce nouveau brassage de traditions, et compte tenu des influences
hétéroclites issues de Byzance, refuge plus ou moins avoué de tous les
hérétiques du moment, une secte nouvelle fit son apparition, celle des Bogomiles .
Pendant le deuxième quart du X e siècle,
en Bulgarie, dans un district montagneux et inaccessible de la Macédoine, un prêtre
de village nommé Bogomil se mit à prêcher devant la petite noblesse, le bas
clergé et les paysans. Il ne prônait pas la révolte contre les grands nobles ou
le haut clergé, mais au contraire la résignation et une recherche de la
sérénité par une vie monastique, seul moyen de trouver la consolation en ce bas
monde troublé et en proie aux forces du Mal. C’est ce premier précepte que les
disciples de ce prêtre, appelés les Bogomiles du nom de leur maître, allaient s’efforcer
d’appliquer : les témoignages concordent pour affirmer que les Bogomiles, dans
les premiers temps, furent des ascètes et des ermites revêtus de vêtements
simples, prêchant l’humilité et la douceur, accomplissant de nombreuses prières
et de longues méditations. Ils rejetaient
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