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Morgennes

Morgennes

Titel: Morgennes Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: David Camus
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ayons accomplie ?
    — Sauvés ! Nous sommes sauvés ! lui dis-je.
    Pour un peu, je lui aurais sauté au cou. Mais il se déplaçait courbé en deux. Il avait froid, il tremblait !
    — Morgennes !
    À vrai dire, rien d’extraordinaire à cela, puisqu’il était entièrement nu et que le vent soufflait. Il s’était dépouillé de tout pour me le donner, et son seul habit, c’était cette chaîne immonde. Elle adhérait à mes doigts ensanglantés et lui collait à la peau. Si je continuais à tirer, j’allais l’écorcher vif. Je devais lâcher prise, mais je n’y arrivais pas. Un serpent de métal nous avait emprisonnés dans ses anneaux.
    — Morgennes !
    Il se mit à pleuvoir. Nous courûmes vers un creux de la montagne, une béance où l’on pouvait abriter des chevaux. De la paille pourrie était étalée sur le sol – et sur elle, des morts. Cadavres de chevaux, le ventre ouvert, la chair blanche – congelée. Et des dépouilles d’êtres humains. Le plus étrange, c’était l’expression de leur visage – ils avaient atrocement souffert. Leur corps, dont le froid je suppose avait contribué à ralentir la décomposition, portait des traces de boursouflures.
    La mort silencieuse était venue les visiter, et elle nous avait épargnés.
    — De quoi sont-ils morts ?
    — De la peste, me dit froidement Morgennes.
    — Comment le sais-tu ?
    Il me montra un rat crevé, dans un recoin de la caverne. Je ne comprenais pas. Quel rapport avec la peste ? Morgennes m’expliqua avoir lu dans le Livre du temps (cet antique ouvrage, qu’il avait dérobé pour Manuel Comnène) que les rats étaient, sinon à l’origine, du moins toujours reliés à la peste.
    — Et Galline ?
    Il haussa les épaules. Comme moi, il espérait qu’elle allait bien mais savait à quoi s’attendre.
    — Quant à nous, me dit Morgennes, je pense que nous n’avons plus rien à craindre. L’épidémie doit être terminée.
    Il s’approcha de l’un des cadavres, et reconnut l’officier qui nous avait arrêtés. Sans un mot, il le dépouilla de sa tunique orange.
    — Si j’arrivais à poser la main sur une arme, je pourrais faire sauter cette chaîne, et alors m’habiller…
    Nous promenâmes nos regards de tous les côtés, et finîmes par trouver le matériel d’un défunt ferronnier.
    — C’est parfait !
    Empoignant un lourd marteau, il l’abattit à plusieurs reprises sur la chaîne et finit par la briser. Libres ! Je frottai mes poignets endoloris, me massai les mollets, et envoyai à Morgennes un franc et chaleureux sourire.
    — Merci. Sans toi…
    — Sans moi, tu ne te serais jamais trouvé là. Tu serais…
    — Te serais mort, lui dis-je.
    — Mort ?
    — Oui, étripé par une foule en délire, à Arras. Ou bien en train de croupir dans une prison pire que celle dont nous venons de sortir… Rappelle-toi, l’œuf brisé !
    — Mais qu’avais-tu vu de si effrayant ? Tu peux me le dire maintenant ?
    Je regardai Morgennes et lui promis :
    — Je te le dirai, oui. Mais pas maintenant. Dès que nous serons en sécurité, dans un endroit… Ailleurs qu’ici, au chaud, auprès d’un bon repas et d’un feu de bois, je te dirai tout. Je t’en fais le serment. Je te raconterai tout ce que je sais…
    Au bout de quelque temps, la pluie s’arrêta de tomber, et nous quittâmes la caverne. Morgennes traînait encore sa chaîne.
    — Tu ne veux donc pas la quitter ?
    La faisant tournoyer dans les airs, il me dit :
    — C’est mon arme ! Tu me demandais avec quoi je comptais vaincre mon dragon ? Avec elle !
    Sa chaîne produisait un vrombissement terrifiant, semblable à celui de mille ruches en colère.
    De petites bâtisses accrochées aux parois de la montagne me faisaient penser à ces palourdes attachées aux rochers, que la marée basse dévoile. En les fouillant, nous trouvâmes d’autres cadavres. Ce village était mort.
    — Boutons-y le feu, dit Morgennes.
    Une flamme lécha le ciel, faisant fondre la neige autour d’elle. En plus de nous réchauffer, elle purgeait ces lieues de la maladie et de tout le mal qui s’y étaient installés. Morgennes et moi priâmes pour le repos des morts.
    À la tombée de la nuit, le brasier brûlait encore. Nous profitâmes de sa lumière pour continuer d’explorer ces lieux étranges. Ils n’étaient pas sans rappeler les cavernes de la Cappadoce – le pays natal de saint Georges. Des grottes reliées entre elles, des

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