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Mort à Devil's Acre

Mort à Devil's Acre

Titel: Mort à Devil's Acre Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Anne Perry
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qu’il avait d’elle. Toute personne chère à son cœur méritait
d’être défendue.
    — Miss Ellison n’était pas vraiment une femme de
chambre. En fait, elle n’était pas du tout une domestique…
    — Mais certainement pas une dame, riposta un peu trop
vivement Christina. Moi, je sais faire la différence, si Brandy en est
incapable. Vraiment, dès qu’ils aperçoivent un joli jupon, certains hommes
perdent toute capacité de jugement !
    — Christina !
    La voix d’Augusta résonna, sèche et glaciale ; jamais
Balantyne n’avait vu son épouse aussi pâle. Était-elle en colère parce que sa
fille avait insulté son père à sa propre table, ou parce qu’elle avait mis en
cause Jemima, autrefois gouvernante dans une maison voisine ? Curieusement,
Balantyne songea qu’il aurait préféré que ce fût pour la défense de Jemima.
    Il se tourna vers sa fille et la regarda droit dans les yeux.
    — L’une des qualités d’une vraie dame, dit-il avec
douceur, est d’avoir de bonnes manières, de façon à ne pas choquer les autres
par maladresse, fût-elle involontaire.
    Christina demeura immobile, les yeux étincelants, les joues
blêmes, les poings crispés sur sa serviette.
    — À mon avis, papa, ce sont les domestiques et les
parvenus qui n’offensent jamais personne, car ils savent qu’ils ne peuvent se
le permettre.
    Il y eut une agitation embarrassée autour de la table. Ce
fut Alan Ross qui prit la parole, après avoir posé sa fourchette à côté de son
assiette. Il avait de belles mains, fortes et nerveuses.
    Il s’adressa posément à sa femme :
    — Les domestiques n’insultent personne parce qu’ils n’osent
pas, ma chère. Une dame n’y songerait même pas, par calcul. Voilà la différence.
Ceux qui offensent les autres sont les gens qui n’ont de comptes à rendre à
personne, mais qui sont incapables de se contrôler et trop insensibles pour
comprendre les sentiments d’autrui.
    — Vous savez si joliment tourner vos phrases, Alan !
lança Christina d’un ton de défi, teinté de mépris, sous-entendant qu’il n’avait
pas pris le temps de réfléchir, mais répondu par une phrase toute faite.
    Alan Ross, pétri d’un sens aigu des convenances, demeura
très digne. Le général sentit une vague de tristesse l’envahir.
    « Ce garçon ne méritait pas un tel camouflet », songea-t-il,
en repoussant son assiette. La beauté seule ne suffit pas ; peu importe qu’elle
ait de l’esprit, un joli minois ou un corps splendide, c’est la douceur et la
compréhension qu’un homme recherche avant tout chez une épouse. Christina avait
intérêt à l’apprendre avant qu’il ne soit trop tard et qu’elle ne perde
définitivement l’affection de son mari. Quelqu’un devait la prévenir. Il
convaincrait Augusta de lui parler.
    La voix de Brandy le ramena à une réalité encore plus
déplaisante.
    — C’est bien Max Burton, notre ancien valet de pied, qui
a été tué à Devil’s Acre, si je ne me trompe ? dit-il en les regardant
chacun à tour de rôle.
    Sa remarque obtint l’effet désiré, à savoir stopper net la
conversation. Augusta, saisie, garda les mains suspendues au-dessus de son
assiette. Christina laissa choir son couteau. Alan Ross ne broncha pas.
    Un pétale de fleur tomba sur la table, d’une blancheur plus
immaculée que celle de la nappe amidonnée.
    Christina avala sa salive.
    — Vraiment, Brandy, qu’en savons-nous ? Et puis, d’ailleurs,
quelle importance ? Max a quitté cette maison depuis des années ! Toute
cette histoire est répugnante.
    — La vie des habitants de Devil’s Acre ne nous concerne
pas, renchérit Augusta d’une voix rauque. Je refuse d’entendre évoquer un sujet
aussi indécent à ma table.
    — Je ne suis pas d’accord, maman, riposta Brandy, nullement
impressionné. Tant que tout le monde refusera d’en parler…
    Augusta ne lui laissa pas le temps de finir sa phrase.
    — J’imagine que la moitié de la capitale n’a que cela à
la bouche ! Quantité de gens adorent se vautrer dans l’ignoble. Je ne
tiens pas à faire partie de ceux-là. Et tant que tu seras sous mon toit, Brandy,
je t’interdis d’en parler !
    Celui-ci se pencha en avant, le visage sérieux.
    — Je ne voulais pas évoquer des détails sordides, mère,
mais les conditions de vie dans les taudis surpeuplés. Apparemment, notre cher
Max était devenu proxénète…
    — Brandon !
    Il ignora

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