Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
Mort à Devil's Acre

Mort à Devil's Acre

Titel: Mort à Devil's Acre Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Anne Perry
Vom Netzwerk:
sentait tenu. Une fille ne doit pas manquer de
respect à son père !
    — Dans ce cas, Sir Bertram ne s’est pas rendu à Devil’s
Acre pour les motifs que nous lui prêtons. Ou alors, il avait des goûts très
divers, conclut-il sèchement.
    Christina éclata de rire et saisit le bibelot entre ses
doigts fins et délicats.
    — Vous savez, papa, je m’attendais à ce que vous soyez
furieux ! Mais apparemment, vous ne manquez pas d’un certain humour.
    — Plutôt d’un sens de la dérision, corrigea-t-il, non
sans plaisir. Si Bertie Astley poursuivait Miss Woolmer de ses assiduités, il m’est
difficile de croire qu’il avait besoin d’assouvir des appétits pervers à Devil’s
Acre. À moins que Miss Woolmer ne l’ait éconduit ?
    Elle eut un petit reniflement méprisant.
    — Au contraire, elle s’accrochait à lui comme une noyée !
Et sa mère, un vrai crampon, celle-là ! La connaissant, j’imagine qu’elle
va chercher à mettre le grappin sur ce pauvre Beau ! May est plutôt
mollassonne. Elle donne l’impression d’être faite en crème Chantilly !
    — Et le « pauvre Beau » n’est pas consentant ?
    Christina eut de nouveau un instant d’hésitation avant de
répondre. Ses doigts se crispèrent sur la porcelaine.
    — Je l’ignore. Comme je vous l’ai déjà dit, je connais
fort peu les Astley. Je ne me sens guère concernée par leurs affaires
sentimentales.
    Elle reposa le bibelot et se dirigea vers la cheminée, le
sourire aux lèvres. La lumière des flammes illuminait par intermittence le
riche satin de sa robe qui se trouvait tantôt violemment éclairée, tantôt
plongée dans la pénombre.
    — As-tu entendu parler des autres victimes ?
    À peine avait-il posé la question qu’il en comprit la
stupidité et regretta de l’avoir posée.
    — En dehors de Max, bien entendu ! ajouta-t-il
pour que sa phrase paraisse au moins logique.
    Christina parut troublée. Se remémorait-elle certains
épisodes liés à la présence de Max Burton dans la maison [7]  ?
Il se sentit coupable d’avoir mentionné le nom de leur ancien valet.
    — Oh, très peu, fit-elle avec désinvolture. Un médecin
et un professeur, je crois ? Ces gens-là ne font pas partie de mon cercle
de relations, papa. N’y a-t-il pas un dicton qui dit que la nécessité fait
naître d’étranges associations, ou quelque chose d’approchant ?
    Elle partit d’un petit rire dur.
    — S’ils étaient tous possédés par le même vice, le démon
du jeu, par exemple, ils sont peut-être allés jouer dans un tripot de Devil’s Acre
où ils ont perdu leur mise. J’ai entendu dire que Bertie Astley était un joueur
invétéré. Ne pas payer ses dettes de jeu est une faute qui peut prendre des
proportions démesurées. Ne vous a-t-on pas appris cela au mess des officiers, papa ?
    — À l’armée, on bannit ceux qui ne paient pas leurs
dettes, répondit-il gravement, sans la quitter des yeux. On ne les poignarde
pas dans le dos avant de les…
    Il hésita à employer une expression trop crue, puis se
sentit gêné de son propre embarras. Pourquoi se sentait-il obligé d’user d’euphémismes,
comme une vieille dame, et de murmurer ces mots-là voix basse ?
    — … de les émasculer, conclut-il.
    Christina ne parut pas s’offusquer de l’expression. La
chaleur du feu ayant déjà rosi ses joues, il ne put voir si elle avait rougi.
    — Les officiers et les gentlemen ne fréquentent guère
Devil’s Acre, papa, lui fit-elle remarquer avec une pointe de sarcasme. Les
bannir ne servirait pas à grand-chose.
    Elle avait raison, bien sûr. La menace d’une exclusion
serait inutile. Le perdant ne rembourserait pas ses dettes pour autant. Il
irait tout bonnement jouer ailleurs, dans l’arrière-salle du tripot d’un autre
quartier. Et son créancier ne crierait pas sur les toits qu’on l’avait escroqué,
par crainte de perdre la face et de ne jamais plus se faire rembourser par
quiconque.
    — En fait, poursuivit-elle en se tournant vers lui, je
m’étonne qu’il ait fallu quatre morts pour que l’on prenne la chose au sérieux.
J’aurais cru la méthode plus efficace.
    — C’est plus qu’étonnant, à mon avis, dit-il en
réfléchissant à voix haute. En fait, c’est absolument incroyable, ajouta-t-il, soudain
parcouru d’un frisson glacé.
    Christina ne le regardait plus. Les lueurs des flammes qui
dansaient sur sa robe accentuaient la finesse de ses courbes gracieuses.

Weitere Kostenlose Bücher