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Mourir pour Saragosse

Mourir pour Saragosse

Titel: Mourir pour Saragosse Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michel Peyramaure
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de Beauharnais, franchit les Alpes pour exercer sa souveraineté. Il ne pouvait se désintéresser de ma situation, d’autant que je lui avais adressé une lettre pour l’en informer. Il me fut répondu par son secrétariat que l’on ferait appel à ma troupe « en cas de besoin »…

    L’Empereur avait fait preuve de perspicacité dans sa lutte contre l’Angleterre. Pour éloigner les navires qui compromettaient le débarquement projeté, il avait envoyé une flotte conduite par le vice-amiral Villeneuve afin de menacer les colonies britanniques dans les Antilles.
    La stratégie fonctionna si mal que les nôtres sombrèrent dans le ridicule au cours d’une bataille navale, au nord de l’Espagne, au large de Trafalgar. L’amiral Nelson y perdit la vie mais nous la quasi-totalité de nos unités.
    J’appris peu après, avec stupeur, que François Fournier avait participé à cette honteuse expédition. Je me demandais pourquoi il s’était fourvoyé dans cette galère à la tête d’un régiment d’infanterie.
    Une lettre de sa main m’informa que, à la suite de cette défaite, il avait traversé l’Espagne avec son détachement, pour se mettre au service du ministère. Sommé d’attendre les ordres de ce personnage à Orléans, il allait y rester des mois à se morfondre, avant qu’on ne lui signifiât sa mutation à Naples !
    Entre-temps, l’Empereur ayant renoncé à son projet d’invasion de l’Angleterre, le camp de Boulogne devint une ville morte.

Deuxième partie

1
    Les cloches de Saragosse
    Ce n’est pas dans la grande solitude des Abruzzes que j’aurais pu prétendre faire figure de héros. Après cet interminable exil, les ordres de l’Empereur me conduisirent en Autriche.
    C’est ainsi que j’eus la joie ineffable de faire mon entrée dans Vienne à la tête de mon régiment, mais sans que l’on eût daigné dresser des arcs de triomphe en mon honneur. Pour tout dire, cet événement passa inaperçu.
    J’allais être affecté à la Grande Armée impériale, division Joachim Murat. J’étais installé au quartier depuis quelques jours quand celui-ci m’invita à une soirée dans l’hôtel particulier qu’il avait loué, un superbe palais à colonnades. Ce fut un festin digne de Lucullus, en compagnie d’une pléiade de jolies dames.

    Le 13 novembre, l’Empereur quitta le palais royal de Schönbrunn, proche de la capitale, pour se porter avec ses armées vers les territoires de l’Est, au-devant d’une colossale coalition austro-russe. Avec une joie fiévreuse, j’allais suivre cette campagne jusqu’aux confins de l’Europe centrale, en un lieu improbable : Austerlitz.
    Au cours de cette bataille de géants, j’accomplis mon devoir sans faillir. Dans une charge de cavalerie contre legénéral Bagration, un éclat d’obus m’arracha au bras gauche la valeur d’une poignée de chair. Un infirmier s’étant mis en tête de me couper le bras, je le menaçai de mon pistolet. Ce boucher consentit à m’épargner la perte d’un membre, ce qui m’aurait valu peut-être une médaille mais sûrement un congé définitif.
    Le 4 décembre, un armistice allait clore cette campagne qui avait mis à genoux l’Autriche et la Russie, grâce au génie militaire de l’Empereur.

    Rapatrié dans un convoi d’éclopés, je me retrouvai un mois plus tard en congé à Barsac pour y apprendre une nouvelle affligeante : la mort de ma mère, quelques mois auparavant. Notre métayer, Pierre Lavergne, ayant pris soin du domaine avec sa famille, je renouvelai son contrat.
    Il avait cru que je renoncerais à l’armée pour m’occuper de mes biens ; je le détrompai. Mon congé étant de courte durée, la guerre allait se reporter en Espagne, en lutte contre l’Angleterre. J’y étais attendu.
    La veille de mon départ, je rendis visite à Jeanne Fournier et constatai que cette pauvre femme avait pris un coup de vieux. Elle se désolait de n’avoir guère de nouvelles de François : une lettre par mois tout au plus, dans laquelle il lui parlait de sa vie de garnison en Italie où, devenu adjudant commandant, pour ainsi dire colonel, il surveillait les côtes amalfiennes, dans les parages de Naples. Il allait être relevé de cette mission pour être affecté à la cavalerie légère de la division Murat, en Pologne, sur les bords de la Vistule.
    Jeanne ne me dit pas un mot d’Héloïse et je ne l’en priai pas. J’avais eu du mal à l’oublier mais c’était fait.
    Il

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