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Néron

Néron

Titel: Néron Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Max Gallo
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plus jeunes et les plus complices des débauches de Néron, mais aussi d’hommes qui étaient pires : les affranchis.
     
    Ces anciens esclaves, qu’un coup de baguette ou une phrase dans le testament de leur maître avaient rendus libres, entouraient Néron, l’enivrant de leur servilité, l’aveuglant de leurs approbations et de leur admiration démesurée.
    Ils voulaient accumuler des biens. Ils avaient un passé d’esclave à oublier. Ils ne connaissaient pas le sens du mot vertu. Et ils étaient d’autant plus méprisants et injustes envers ceux qu’ils pouvaient dominer qu’ils avaient eux-mêmes subi le mépris et l’injustice, et qu’ils continuaient de se comporter en esclaves avec plus puissants qu’eux.
    Ils étaient chargés de l’administration du palais impérial, de celle des routes et des aqueducs. Mais ils veillaient aussi sur la chambre à coucher de Néron. Ils lui proposaient de jeunes vierges et de beaux éphèbes. Ils connaissaient tous ses secrets.
    Ils courtisaient Poppée parce que Néron l’écoutait. Ils méprisaient Octavie parce que c’était encore l’épouse et qu’il fallait qu’elle disparût pour que Néron pût épouser Poppée et qu’ainsi se réalisât le vœu de cette femme intelligente, plus habile encore qu’Agrippine, et qui lui ressemblait tant.
     
    Ces affranchis, Sénèque les haïssait, et eux-mêmes le craignaient et se méfiaient de lui, s’efforçant de le tenir loin de l’empereur.
    Et comment Sénèque aurait-il pu rivaliser avec le jeune Sporus, l’« épousée » de Néron ?
    Ou bien avec Helius, Phaon, Petinus, Pythagoras, Polyclitus, Epaphrodite, tous prêts à exécuter pour Néron les crimes les plus sombres, les besognes les plus sordides, à organiser les rencontres les plus perverses, les orgies les plus folles, à s’enfermer avec lui dans le vice et la débauche sans que jamais la morale ne vînt les retenir ?
    Pour eux ne comptait que la dévotion qu’ils vouaient à Néron, mesurée par les richesses qu’ils en retiraient. Et elles étaient immenses.
    Et même quand Néron retirait sa confiance à l’un d’eux – à Pallas qui avait servi Agrippine –, sa fortune demeurait. Pallas restait ainsi l’un des hommes les plus riches de Rome.
    Qu’avait de commun Sénèque avec eux qui, désormais, formaient le proche entourage de Néron ?
    Le philosophe, lui, s’interrogeait sur les limites de la richesse dont il disait qu’elle doit être bornée par la sagesse : « Le pauvre, ce n’est pas l’homme qui possède peu, mais celui qui désire plus qu’il n’a », répétait-il.
    Mais qui pouvait encore entendre, dans le palais de Néron, une parole de sage ?

 
     
27
    Moi aussi, en ces années là, j’ai souvent oublié les leçons de sagesse de mon maître Sénèque.
    Je connaissais cependant les perversions et les cruautés de Néron. Je n’ignorais rien des crimes qu’il avait ordonnés. Et j’avais reproché à Sénèque sa complaisance, sa complicité même à l’égard d’un empereur qui révélait chaque jour davantage sa nature sauvage et ses vices. Mais j’étais jeune, le corps plein de sève. Et Néron était fils d’Apollon, prince de la Jeunesse, et sa vitalité insouciante, ses dons, son goût du plaisir m’attiraient.
     
    J’allais au palais impérial avec une inquiétude mêlée d’enthousiasme.
    J’étais comme un conducteur de char qui retient ses chevaux et les excite avant le départ de la course.
    J’attendais avec angoisse et impatience le moment de la soirée où les mots, la musique et les chants céderaient la place à l’orgie.
    Je vidais ma coupe que les esclaves de Néron remplissaient aussitôt du vin de Faleme, d’Alba, de Caecubano, ces crus de Campanie et du Latium, ou bien de ceux, plus épais, d’Étrurie et de Sicile.
    Mon regard se voilait. Mon âme s’assoupissait. Mes sens et mes désirs s’éveillaient. La salive humectait mes lèvres quand je voyais s’approcher de moi ces vierges et ces éphèbes auxquels leurs maîtres avaient appris depuis l’enfance à jouer de leurs doigts, de leur bouche, de leur sexe.
    Ils étaient roués comme de vieilles putains racolant devant la porte de leurs lupanars. Mais ils avaient la beauté de l’innocence et je m’abandonnais à leurs mains, à leurs cuisses, à leurs lèvres.
    Où étais-je ?
    Mon corps alors se moquait bien de savoir si Néron était un empereur clément, un poète ou un citharède talentueux,

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