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Nice

Nice

Titel: Nice Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Max Gallo
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Russe
naturalisé Français, Frédéric Karenberg, résidant à Nice. Il ressort de ces
différentes informations, que la réunion d’une conférence internationale des
socialistes hostiles à la guerre, est probable. Il est de la plus haute
importance que dans chaque département, les individus suspectés d’être opposés
à la politique de défense de la patrie, soient soumis à une surveillance
renforcée. »
    Un matin, Ritzen décida de se rendre compte par lui-même. Il
se fit conduire à la villa Karenberg, et accompagné d’un inspecteur, demanda à
voir Karenberg.
    Frédéric Karenberg les reçut dans sa bibliothèque, les
portes-fenêtres ouvertes sur la terrasse, un garçon d’une douzaine d’années
s’éloignant comme ils entraient, Karenberg le rappelant :
    — Jean, je continue ce soir, je ne suis pas battu !
    Il montra à Ritzen un échiquier.
    — Mon fils me tient tête !
    La même morgue qu’il y a vingt ans. Cette assurance des
riches, faite de dédain, de nonchalance.
    — Que puis-je pour vous, messieurs ?
    L’ironie aussi. Ritzen s’assit sans qu’on l’y invite.
    — Vous n’ignorez sans doute pas que nous sommes en
guerre, monsieur Karenberg.
    Karenberg avait pris place derrière son bureau, ne regardant
pas le commissaire, repoussant des papiers, fermant des livres qu’il posait en
pile sur le bord de la table.
    — Vous êtes de nationalité française, notre hospitalité…
    Karenberg leva la tête.
    — Si vous alliez directement au but ?
    — Vous avez reçu un Italien, Morgari, il y a quelques
mois, vous fréquentez les émigrés russes, vous avez essayé de passer en Italie,
puis en Suisse.
    — Tout à fait officiellement.
    — Écoutez, ne jouons pas au plus fin, des Français
meurent chaque jour par milliers.
    — Je sais, dit Karenberg, des Français, des Russes, des
Allemands…
    — Je pense aux Français, monsieur, aux Français d’abord
parce que je suis français et je vous dis simplement ceci : soyez prudent
dans vos relations. Nous sommes en guerre. La justice militaire est sévère.
Votre fortune…
    — Je pense aux hommes qui meurent, monsieur, dit
Karenberg l’interrompant.
    Ritzen montrait la bibliothèque, reprenait comme s’il
n’avait pas entendu.
    — Votre fortune ne servira à rien, soyez prudent.
    Il se retourna, une femme se tenait dans l’embrasure de la
porte-fenêtre. Une silhouette vigoureuse.
    — Qu’est-ce qu’il y a Frédéric ?
    Karenberg se leva, s’approcha d’elle.
    — Deux policiers, dit-il.
    Le mépris aussi.
    — Madame, dit Ritzen en prenant congé, conseillez à
votre mari la prudence. On fusille les espions en temps de guerre.
    Il avait été excessif, et, dans le grand salon des Merani,
écoutant le député lui vanter les mérites de la sœur de Karenberg, il s’était
souvenu du malaise qu’il avait éprouvé durant plusieurs jours, chaque matin,
quand arrivaient les listes des tués, dont la préfecture, il ne comprenait pas
à quelles fins, lui faisait remettre un double. « Je pense aux hommes qui
meurent. » Il ne pouvait douter de la sincérité de Karenberg. Le fils du
maire d’Antibes, Guidicelli, vingt-sept ans, sous-lieutenant au 8 e tirailleurs indigènes, tué le 9 décembre 1914. Tant d’autres, dont les noms se
succédaient, date de naissance, grade, date et lieu de décès. Une phrase lue
dans le rapport d’un indicateur sur les propos tenus par « le socialiste
Sauvan », lui revenait aussi : « Leur société, avait dit Sauvan,
au cours d’une réunion de bureau des syndicats, c’est un abattoir. »
    — Ces blessés, disait Merani, Helena je vous assure,
admirable.
    Le neveu de Ritzen, Julien Sardou, ces jambes cisaillées. Il
se tenait dans la pharmacie à Antibes, une couverture jetée sur les moignons.
    — Je ne sais pas, commençait Ritzen.
    Il hésitait mais c’était le devoir, le métier. Le travail
sale, ingrat du chirurgien.
    — Soyez prudent, monsieur le Député.
    — Avec qui, Ritzen ? avec qui ?
    — Par les blessés, on connaît le front, n’est-ce pas ?
Le mari d’Helena est autrichien, il est en Suisse. Par Karenberg, on touche les
milieux internationaux qui n’ont pas renoncé à saboter notre effort de guerre,
tout est possible.
    Merani s’exclamait.
    — Mon cher Ritzen, vous passez d’un extrême à l’autre.
Vous m’assurez que le patriotisme l’emporte et maintenant, vous découvrez une
conspiration, des espions. Je me

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