Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
Nice

Nice

Titel: Nice Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Max Gallo
Vom Netzwerk:
continuait ses leçons d’anglais, parlait de Sam.
    — Vous ne voulez pas d’enfant ? interrogeait miss
Russel. Trente-trois ans ? Il ne faut pas attendre trop.
    Désir incertain.
    Un matin, sur la plage, une voiture qui s’arrêtait, deux
enfants presque nus, la peau brune, potelés, ils couraient vers la mer, et, derrière
eux, une jeune femme, la robe de plage s’ouvrant sous l’effet du vent. « Michel,
Jacqueline. »
    Elle n’avait pas dit un mot, Violette, tout le long du
trajet vers Saint-Paul, ces prénoms, ces visages d’enfants en elle. Peur de
dire. Peur du refus de Sam.
    — Cinquante-deux, avait-il dit en sortant de la
voiture. Je trouve que c’est un peu vieux.
    Il avait attiré Violette contre lui.
    — Beaux, ces gosses.
    Peur de vouloir en ce moment.
    Sam se rendait à Paris pour un vernissage, Violette l’accompagnait
à la gare, mais les employés du Train bleu étaient en grève, les cheminots
avaient envahi le hall, certains, debout sur les chariots à bagages, lançaient
des slogans, levaient le poing : Front populaire, Front populaire.
    Sam balançait sa valise à bout de bras : « Chance,
je pars pas, bonne excuse. » Il dressait le poing : « Vive le
Front populaire. »
    Ils descendaient l’avenue de la Victoire, cherchaient en
vain un taxi. « Les tramways sont en grève, alors les taxis et eux aussi… »
Eclairage réduit, grève perlée dans les centrales, à l’usine à gaz. « En
19, disait Sam, j’étais à Berlin. Tu sens, l’air n’est plus le même quand il se
passe quelque chose. Un peu le même air qu’à Berlin. Les désirs, ça rayonne. Tu
as vu une fourmilière ? Quand tu plonges un bâton, elles deviennent folles,
partent dans tous les sens. Les hommes, ces élections, c’est un début, c’est le
bâton. Maintenant ça grouille, ça va grouiller. »
    Ils étaient devant les Galeries Lafayette occupées par les employées.
Chants. Danses. Peut-être, à cette fenêtre, Madeleine Vial. Violette retenait
Sam, elle écoutait les badauds : « Ils jouent aux boules sur les
toits, et ils ont élu la reine des employées ! » Rires ou bien
masques hostiles des passants. Des groupes de jeunes gens grimpaient aux
grilles, appelaient les employées par leur prénom, entonnaient la Jeune
Garde. Prenez garde, prenez garde…
    Violette fredonnait dans la voiture.
    Peur de vouloir en ce moment, et pourtant l’envie de sentir
naître d’elle, en ce moment, la vie.
    Le soir, elle entraînait Sam : « Allons-y, disait-elle,
je veux voir. » Ils prenaient au passage Nathalie et Alexandre. Nathalie
enthousiaste, le teint carmin :
    — À l’hôtel, ils se sont tous mis en grève. Papa a cédé
tout de suite. Le père d’Alexandre…
    Carlo Revelli avait fermé lui-même la porte des entrepôts.
Il refusait de recevoir les délégués grévistes.
    — Qu’ils se remettent au travail d’abord, disait-il à
Giaume. Qu’ils travaillent. Après, on discutera.
    Les terrassiers descendaient des chantiers, rejoignaient les
chauffeurs de camion, les carreleurs. Des dockers se mêlaient à la foule qui
stationnait devant les entrepôts Revelli. Des cris : Les soviets
partout, les soviets partout. Les mêmes chants… lutte finale… genre
humain. Barnoin, qui, au nom des partis du Front populaire, prenait la
parole, debout sur le toit d’une voiture : « Camarades, notre force
est immense, maintenant… »
    — Il a finalement, continuait Nathalie, comme tout le
monde, Carlo Revelli, comme tout le monde. Ça a dû le changer.
    Carlo avait été convoqué par le préfet. « Monsieur Revelli,
je sais bien, mais le nouveau gouvernement… Il faut lâcher la bride, les
directives du président du Conseil, sinon…
    — Sinon quoi ?
    Carlo refusait de s’asseoir.
    — Le gouvernement est juge de l’ensemble de la
situation.
    — Vous baissez le froc ?
    Il claquait la porte en sortant. Ils baissaient le froc pour
rien. Lui, il aurait tenu et donné après. On lâche jamais un cheval qui s’emballe.
Quand il était de leur côté, aux autres, les régiments tiraient sur les
grévistes. Tout ça c’était devenu mou. Sans goût, comme du tabac blond. De la
piquette. On donnerait un peu. Ils prendraient pas grand-chose. Fini le temps
du refuser tout et du prendre tout. Et Carlo avait reçu la délégation.
    — Allez, dites.
    Ils exposaient leurs revendications, une heure en moins pour
cette catégorie-là, une prime pour ceux-ci, et les

Weitere Kostenlose Bücher