Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
Nice

Nice

Titel: Nice Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Max Gallo
Vom Netzwerk:
cabrait. Il s’arrêtait à
la tuilerie, appelait le gardien, faisant un tour dans les hangars, devant les
fours rouges puis il montait à la carrière, s’allongeait, ne trouvant le
sommeil que peu avant l’aube, réveillé dès que le jour s’esquissait. Il
s’aspergeait le torse d’eau glacée, plongeant son visage dans le tonneau,
effaçant sa fatigue, se mettant au travail et les ouvriers le trouvaient
debout, appuyé au manche de la pioche, les regardant arriver, leur reprochant
d’une moue méprisante de ne pas être là, avec lui.
    Puis, un soir, il y eut une lumière sur la terrasse de la
villa Karenberg et la chaîne du portail avait été enlevée. Helena l’attendait,
serrant nerveusement les bras du fauteuil, incapable de se lever. Il apparaissait
au milieu de l’allée, il montait l’escalier, il était devant elle, elle
baissait les yeux, elle disait « allez-vous-en », mais elle se
laissait soulever, poupée qui se désarticule ; du pied, il ouvrait la
porte-fenêtre de la bibliothèque, il couchait Helena sur la bergère, il lui
tenait les poignets. Ce fut ainsi durant près de deux mois.
    Au milieu d’une nuit, alors qu’ils étaient allongés côte à
côte, qu’elle s’assoupissait détendue, que la brise se levait au point
qu’Helena avait presque froid et c’était une sensation délicieuse, ce frisson,
à peine ressenti, comme une ride sur la mer, et elle tendait la main, cherchant
le drap. Elle avait envie de s’approcher de Carlo pour trouver sa chaleur,
mettre son ventre et se jambes contre son flanc, au milieu de cette nuit, et
dans quelques jours, Frédéric et Peggy allaient revenir, Carlo près d’elle se
mit à parler.
    L’avait-elle jamais écouté ?
    — Je suis devenu riche, dit-il, avec ces mains, tu les
vois ?
    Il les posa sur elle, sur le sexe, sur les seins, et elle
s’écarta d’un mouvement brusque, instinctif.
    — Qu’est-ce que tu as ? Tu as peur de ces mains ?
    Il s’assit sur le bord du lit.
    — Je veux une maison, dit-il, je vais l’acheter, je
veux une tour, je veux qu’on voie toute la ville, tu veux ?
    Il se tourna vers elle, le profil découpé, l’épaule
anguleuse, une masse sombre qui se penchait, qui pesait. Elle le repoussa de
ses paumes ouvertes, appuyées contre sa poitrine.
    — Je serai plus que vous, dit-il.
    Il la prit par les épaules.
    — Viens avec moi, qu’est-ce que tu fais, avec eux ?
Ils n’ont rien.
    Elle sentit qu’il pesait avec son sexe sur l’une de ses
cuisses.
    — On dirait tous des femmes.
    Elle se dégagea.
    — Non, dit-elle, non.
    Elle se leva, prit un peignoir. Elle avait froid, envie de
vomir. Carlo était resté sur le lit.
    — Je suis une putain pour toi alors, dit-il, qui vient
quand tu en as envie.
    Elle secoua la tête.
    — Non, répéta-t-elle, non.
    — Qu’est-ce que tu veux d’autre ? Tu veux ça ?
    Elle imagina son geste.
    — Allez-vous-en.
    — Tu vas venir.
    Il l’allongea sur le lit, elle s’appuya à la porte, elle vit
la flamme, l’odeur du cigare lui donna un haut-le-cœur.
    — Allez-vous-en, répéta-t-elle, je ne veux plus.
    — Moi je veux. J’aurai une maison comme celle-là, dis
ce que tu veux, je l’aurai, tu seras dedans.
    Elle ouvrit la porte, se mit à courir dans le long couloir,
le bruit de ses pieds nus sur les dalles de marbre, l’effrayant, elle courait
plus vite, elle descendait dans les escaliers, sa main glissant sur le mur,
parce que l’ombre s’y collait, la nuit tombant claire par la verrière, sur la
rampe. Elle vit la silhouette de Carlo qui se penchait.
    — Allez-vous-en, cria-t-elle.
    Et son cri était si aigu qu’elle en eut peur. Elle entra
dans la bibliothèque, ferma la porte à clé, tira les volets et les vitres, les
bloquant. Il vint, elle l’entendit qui descendait l’escalier, qui frappait.
    — Ouvre-moi.
    — Allez-vous-en.
    Il donna un coup qui fit résonner la porte.
    — Ouvre-moi putana, ouvre-moi.
    Il hurlait, sa voix résonnant dans la cage d’escalier.
    — Ouvre-moi, cria-t-il encore.
    Elle entendit ses pas. Il devait s’habiller maintenant. Elle
l’imagina, ses souliers racornis, de la terre prise entre les plis du cuir, sa
chemise froissée ; il ressemblait à l’un de ces paysans de Semitchasky
qui, le dimanche, attendait debout dans l’entrée, un panier rempli d’œufs à la
main et la baronne Karenberg passait. Ils s’inclinaient, osant à peine lever
les yeux sur Helena qui suivait sa

Weitere Kostenlose Bücher