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No Angel

Titel: No Angel Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jay Dobyns
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cigarettes sur la paume de ma main. J’allumai une clope avant de démarrer.
    On roula encore une heure et on s’arrêta à Munds Park. En bas de la bretelle, Rudy se tourna vers moi.
    — Ça va pas. Vous avez intérêt à accélérer, putain. Je veux pas que mon club roule comme des gonzesses.
    — Le club de qui  ?
    — Slats m’a dit de vous secouer. Vous êtes censés me suivre. Je suis votre président.
    — On n’est pas arrivés au rassemblement. Et je croyais qu’on se débrouillait très bien.
    — On a peut-être fait des pointes à cent dix. C’est trop lent. Si vous voulez que les Angels vous prennent au sérieux, montez d’un cran, ou de vingt.
    — D’accord, président Kramer, la prochaine fois, tu seras fier de nous, monsieur.
    — Bien.
    Il se tourna à nouveau vers la chaussée et partit en trombe. On le suivit, mais à distance, pour l’emmerder.
    On roulait sur un terrain plat, en direction de montagnes bleues qui se dressaient à l’est. De part et d’autre de la route, de vastes étendues d’herbe vert-jaune alternaient avec des forêts immenses de pins ponderosa. Le trajet n’était pas désagréable.
    Arriver à un rassemblement de motards avec un insigne en trois parties revient à entrer nu dans la cafétéria d’un collège. Ça ne fut pas différent à Too Broke. J’étais nerveux, avant d’y arriver, mais une fois sur place je fus terrifié. C’était une sensation dont j’avais l’habitude. Lorsqu’on est infiltré, une part importante du travail consiste à cacher la peur et à la reporter sur des pensées stimulantes. Chaque personne qu’on croisa nous dévisagea. Je décidai d’y voir du respect, et non une accusation. Mon ego s’empara de cette idée avec gourmandise. J’acceptai la peur, et l’intérêt que je semblais susciter me fit plaisir.
    Rudy accéléra à l’approche de l’entrée. Nous aussi. Il fonça sur l’employé, lui fit signe de s’écarter et cria :
    — LES SOLOS PAIENT JAMAIS.
    Cela aussi me fit plaisir.
    On se gara sur le parking et on fit un tour. Rudy nous entraîna jusqu’à un groupe de Red Devils et nous présenta Tony Cruze. Cruze ressemblait à Jerry Garcia, sans le sourire. Il ordonna à un prospect d’aller chercher de la bière, et Rudy ordonna à Timmy de l’aider. Rudy lui cria ensuite de lui en apporter deux et de veiller à ce qu’elles soient « comme des glaçons ». Timmy partit à grands pas. Carlos, Pops et moi restâmes derrière Rudy pendant qu’il parlait avec Cruze. Rudy raconta la création du nouveau chapitre, ne manqua pas une occasion de mettre en valeur son aptitude à emporter l’adhésion des Angels. Cruze me demanda si c’était moi qui faisais des affaires au Mexique. Je répondis que oui. Il dit qu’il fallait qu’on se voie et Rudy ajouta que l’un d’entre nous le contacterait. Deux femmes, une petite maigre et une grande enveloppée, rejoignirent Cruze. Il posa la main sur les fesses de la grande et les secoua. Elle se pencha vers lui et lui mordilla l’oreille. La petite adressa un clin d’œil à la nana de Rudy, qui avait eu la bonne idée de garder le silence. Les femmes s’en allèrent. Il n’y avait, sur le dos de leur blouson, qu’un insigne indiquant : PROPRIÉTÉ DES RED DEVILS. Cela s’appliquait aux vêtements et aux femmes.
    Timmy revint avec une brassée de Silver Bullets {19} . J’en pris deux. J’en ouvris une et fourrai l’autre dans une poche revolver. J’ai toujours bu en amateur, mais je compris qu’il faudrait que je sois très vite au mieux de ma forme. La bière glacée emporta la poussière soulevée par les motos et le vent. Timmy se planta entre Cruze et Rudy pour donner ses bières à son président.
    — Prospect, je parle avec ce mec et tu me gênes !
    Timmy jeta un coup d’œil par-dessus l’épaule. Cruze le fixait, le vent faisant voler ses longs cheveux bouclés. Le prospect de Cruze avait donné la bière sans se faire remarquer.
    Timmy se tourna vers Rudy.
    — Désolé, président. Ça arrivera plus.
    — Y a intérêt, sinon ta carrière de motard sera la plus courte de l’histoire.
    Timmy pivota sur lui-même, fit deux pas et roula des épaules. S’il l’avait fait face à Rudy, cela aurait constitué un défi. Mais, dans ces conditions, le mouvement pouvait passer pour une tentative de détendre des muscles ankylosés.
    Rudy laissa courir.
    On resta là à déconner. Les Red Devils fréquentaient d’autres gangs de

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