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Noir Tango

Noir Tango

Titel: Noir Tango Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Régine Deforges
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damiers.
    — Ce n’est pas la peine, dit Léa, nous
habitons à côté. Franck va m’aider.
    — Comme vous voudrez.
    Dans la rue à peine éclairée, Franck et Léa
soutenaient Laure qui avait du mal à tenir sur ses jambes, suivis par trois
amis du jeune homme qui chantaient à tue-tête.
    — Fermez vos gueules !… On veut
dormir !
    Venant d’une fenêtre, ces cris furent
accompagnés par le jet d’un pot d’eau qui éclaboussa les fêtards.
    — Il n’y a pas de soir sans que l’un d’entre
nous ne se fasse arroser, dit Franck. Ils ne pensent qu’à dormir dans ce
quartier.
    La douche n’avait pas calmé les chanteurs
qui reprirent de plus belle. Le carrefour des rues Saint-André-des-Arts et de
Buci était sombre. Laure se faisait plus lourde. Un début de migraine rendait
Léa de mauvaise humeur. L’entrée de la rue Grégoire-de-Tours était noire comme
un four. Un des garçons alluma une lampe de poche, le faible faisceau lumineux
éclaira le bord du trottoir. Tous phares éteints, une voiture s’avança. Le
tailleur bleu de Laure faisait une tache claire. Brusquement les phares s’allumèrent.
Léa leva le bras pour se protéger les yeux.
    — Ah chouette, on voit où on met les
pieds.
    Léa laissa tomber ses clefs et se pencha
pour les ramasser… Une rafale de mitraillette crépita, ricochant sur les pavés…
Le corps de Laure fut agité de soubresauts… Elle était pesante soudain… si
pesante… elle glissa malgré les efforts de Léa pour la retenir… Le craquement d’un
changement de vitesses… le crissement de pneus… le claquement d’une portière… les
phares de la voiture éclairèrent un instant les vieilles façades puis s’éteignirent…
la voiture fila vers le boulevard Saint-Germain… Des fenêtres s’éclairèrent… s’ouvrirent…
    — Qu’est-ce que c’est ?…
    — Vous avez entendu ?…
    — J’te dis qu’c’était une mitraillette !
J’connais, quand même !
    — Viens te coucher, c’est encore ces
voyous du « Tabou » !…
    — Au secours, appelez la police !…
    Accroupie dans le caniveau, Léa soutenait la
tête de Laure qui gémissait.
    — Ce n’est rien, petite sœur, ce n’est
rien.
    Le bleu du tailleur disparaissait peu à peu
sous des taches sombres qui allaient s’agrandissant. Hébété, le front barré d’un
trait de sang, les yeux braqués sur le corps allongé, Franck tenait d’une main
tremblante la lampe électrique.
    — Éclaire-moi, cria Léa.
    Doucement elle posa la tête de sa sœur sur
ses genoux, retrouvant les gestes doux de sa mère. Laure essaya de parler.
    — Ne dis rien.
    Enfin, la sirène d’une voiture de police. La
rue, déserte un instant auparavant, se remplissait de gens en pyjama ou en
chemise de nuit, une veste ou un châle hâtivement jeté sur les épaules. Des
gardiens de la paix surgirent, portant une civière.
    — Écartez-vous… laissez passer…
    La petite foule s’écarta.
    — Rentrez chez vous… y a rien à voir…
    Personne ne bougea.
    Un policier en civil se pencha sur les deux
sœurs…
    — Que s’est-il passé, demanda-t-il ?
Éclairez-moi. Nom de Dieu, pauvre petite ! Mais… je vous connais, j’ai
pris votre déposition sur l’affaire du « Shéhérazade » cet
après-midi et… c’est votre sœur… qui avait si peur… Pauvre gosse…
    — Vite monsieur, emmenez-nous à l’hôpital.
    Avec précaution, les policiers chargèrent
Laure qui avait perdu connaissance. Léa et Franck montèrent auprès d’elle.
    Dans le couloir de l’Hôtel-Dieu, Léa
marchait de long en large, fumant cigarette sur cigarette ; bientôt son
paquet de Lucky fut vide.
    — Cela fait au moins deux heures qu’ils
l’opèrent… et toi tu es là à attendre calmement, sans bouger !
    — Que veux-tu que je fasse ? dit
Franck qui transpirait à grosses gouttes.
    — Je ne sais pas… bouge, parle-moi !
    — Pour te dire quoi ?… Tu crois
que cela a à voir avec Sarah ?
    — Je n’en sais rien, j’espère que non… Ce
ne seraient pas vos histoires de marché noir ?
    — Impossible, Laure ne traitait que de
petites affaires et nous n’avons jamais eu à faire aux gros bonnets… C’est
peut-être un accident…
    — Un accident !… une rafale de
mitraillette en plein Paris !… un accident !… tu as de ces mots !…
Docteur ! docteur, comment va-t-elle ?
    — Vous êtes de la famille ?
    — Oui, je suis sa sœur.
    — Un miracle qu’elle n’ait

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