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Nord et sud

Nord et sud

Titel: Nord et sud Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Elizabeth Gaskell
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suite. Au bout d’un moment,
elle reprit :
    — Dans ce cas, nous en reparlerons une autre fois. Mais
pas maintenant. Dites-moi, votre père s’est-il mis en grève ?
    — Eh oui, répondit Bessy sur un ton bien différent. Et il
n’est pas le seul. Tous ceux de chez Hamper sont en grève, et bien d’autres avec.
Les femmes sont aussi mauvaises que les hommes, aussi déchaînées qu’eux cette fois-ci.
Le manger coûte cher, et faut bien qu’elles aient de quoi nourrir leurs enfants,
hein. Si on leur faisait porter l’argent qu’il va coûter, le dîner des Thornton,
on pourrait en acheter, des pommes de terre et de la farine d’avoine avec, de quoi
calmer plus d’un bébé qui pleure. Ça mettrait un peu de baume au cœur des mères !
    — Ne parlez pas comme ça ! protesta Margaret. Je vais
me sentir coupable et mauvaise d’aller à ce dîner.
    — Non, dit Bessy. Y en a qui sont prédestinés à aller à
des fêtes magnifiques, à porter de la pourpre et du linge fin – et peut-être que
vous en faites partie. Y en a d’autres qui triment toute leur vie, et de nos jours,
les chiens sont moins charitables que du temps de Lazare [45] . Mais si vous me demandez
de vous rafraîchir la langue du bout de mes doigts, je traverserai l’abîme, juste
en souvenir de ce que vous avez été pour moi ici-bas.
    — Bessy ! vous êtes très fiévreuse ! Je le sais
rien qu’en touchant votre main et en écoutant les propos que vous tenez. Le jour
terrible du jugement, le fait que certains d’entre nous ont été des mendiants et
d’autres des riches ne suffira pas à faire le tri. Nous ne serons pas jugés d’après
ce misérable accident, mais d’après notre fidélité au Christ.
    Margaret se leva et alla chercher de l’eau ; y trempant
son mouchoir, elle posa sur le front de Bessy le tissu frais et humide et se mit
en devoir de frotter ses pieds gelés pour les réchauffer. Bessy ferma les yeux et
se laissa faire. Au bout d’un moment, elle dit :
    — Si vous auriez été à ma place, vous aussi vous auriez
eu la tête farcie : ça a pas arrêté de défiler ici, des gens qui demandaient
après mon père et qui restaient pour me raconter leur histoire. Y en a qui parlaient
d’une haine mortelle, même que ça me caillait le sang de les entendre dire des choses
aussi affreuses sur leur maître ; mais la plupart, c’était des femmes qui se
plaignaient – avec les larmes qui leur coulaient sur les joues, et qu’elles essuyaient
pas, parce qu’elles les sentaient même pas –, qui se plaignaient que le manger était
trop cher et que leurs petits, ils pouvaient pas dormir tellement qu’ils avaient
faim.
    — Et vous croyez que la grève arrangera ça ? demanda
Margaret.
    — C’est ce qu’ils disent. Ils disent que le commerce marche
bien depuis longtemps, et que les patrons, ils ont fait des bénéfices à n’en plus
finir. Combien, ça, mon père sait pas, mais le syndicat, il sait, bien sûr. Et c’est
normal, ils veulent leur part du gâteau, maintenant que le manger augmente. Et le
syndicat dit que les ouvriers font pas leur devoir s’ils forcent pas les patrons
à leur donner ce qu’ils leur doivent. Mais les patrons, ils ont pris l’avantage.
Comment, j’en sais rien, mais n’empêche que j’ai bien peur qu’ils le gardent toujours.
C’est comme la grande bataille de l’Armageddon, la façon qu’ils ont de se faire
face en grimaçant et en se battant, ils continuent à se battre même lorsqu’ils sont
précipités dans l’abîme.
    À cet instant précis, Nicholas Higgins entra et entendit les
derniers mots de sa fille.
    — Ah ! Eh bien moi aussi, je me battrai ; et cette
fois-ci, je gagnerai. Il faudra pas longtemps pour les faire céder, parce qu’ils
ont un joli paquet de commandes, et toutes sous contrat. Et ils vont pas tarder
à s’apercevoir qu’ils ont plus d’avantages à nous donner nos cinq pour cent qu’à
perdre les profits que ces commandes-là vont leur rapporter. A nous deux, les patrons !
Moi, je sais qui va gagner.
    À l’entendre, Margaret se dit qu’il devait avoir bu, non pas
tant par la teneur de ses propos que par la façon excitée dont il parlait. Elle
se sentit confortée dans cette idée par l’inquiétude évidente de Bessy, qui cherchait
à précipiter son départ.
    — Le vingt et un... c’est jeudi en huit. Je peux aller vous
voir quand vous serez habillée pour aller chez Thornton ? À quelle heure il
est, votre

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