Nos ancêtres les Gaulois et autres fadaises
contrevient doit disparaître.
Les protestants, depuis l’édit de Nantes, ont leurs « places de sûreté », des villes fortifiées. Ils y remuent souvent. Le cardinal craint qu’il ne s’y développe un « État dans l’État ». Il va les réduire les unes après les autres. L’épisode le plus atroce et le plus célèbre de cette campagne intérieure contre le « parti huguenot » est le siège de La Rochelle (1627-1628), que le belliqueux ecclésiastique vient superviser lui-même, pour être bien sûr que personne ne s’abaisse à la pitié, cette vertu des faibles. Il accueillera son roi dans la ville vaincue au milieu des cadavres et des fantômes d’humains qui ont attendu en vain l’aide des Anglais et n’ont mangé depuis des semaines que des chiens, des algues bouillies et le cuir de leur ceinture. Partout écrasés, les malheureux huguenots français gardent le droit de célébrer leur culte mais perdent tout le reste, leurs places, leurs canons, leurs droits politiques.
Ensuite il y a les grands. Ils continuent ce qu’ils font depuis des siècles, manigances et complots. Le cardinal entend, comme il l’écrira lui-même dans ses Mémoires, « abaisser leur orgueil ». Il a des espions pour le renseigner sur tout ce qui se trame, et des juges à sa main pour exécuter ses volontés de fer. Il fait tomber des têtes, même les mieux nées, même les plus joliment faites : au chapitre précédent nous avons mentionné les mésaventures du dernier favori du roi, le jeune Cinq-Mars. Convaincu de tremper dans une conjuration avec l’Espagne, il est décapité (1642).
Richelieu aime tant les nobles qu’il refuse même qu’ils se tuent entre eux. Il prend une mesure considérée par ce milieu comme très attentatoire aux libertés : il interdit le duel (1626). Si l’on veut user de son épée, on a mieux à faire que se battre entre soi, la violence privée doit désormais se fondre dans la violence d’État. Le cardinal va en effet relancer la guerre extérieure.
Le pays était en paix depuis plus de trente ans, cela commençait à faire long. À l’est, tous les pays germaniques, où, depuis la paix d’Augsbourg (1555), cohabitaient luthériens et catholiques, connaissent à leur tour la folie dévastatrice des luttes religieuses. Tous les États, duchés, principautés, villes libres, évêchés qui constituent le Saint Empire se déchirent dans un des conflits les plus atroces de l’histoire de l’humanité : la « guerre de Trente Ans » (1618-1648). Bientôt, tous les pays d’Europe vont se jeter dans la mêlée pour dépecer un empire qu’ils feront ressembler à un cadavre.
Richelieu en profite pour relancer la politique de François I er ou d’Henri II. Il entre lui aussi dans cette guerre de Trente Ans, en s’alliant avec les princes protestants. À l’intérieur, les réformés sont à combattre, à l’extérieur ils sont utiles. Ils lui permettent de reprendre la lutte contre ces vieux ennemis, les Habsbourg, dont les deux branches cousines règnent sur l’Empire germanique et à Madrid. Nous revoilà donc en guerre avec l’Espagne (1635), c’est-à-dire au sud et aussi au nord-est – les Pays-Bas lui appartiennent toujours.
Louis XIV enfant, régence d’Anne d’Autriche, gouvernement de Mazarin
En 1642, épuisé, le cardinal s’éteint. Louis XIII ne peut décidément se passer de lui, il meurt cinq mois après. Nouvelle mauvaise passe pour le royaume : le successeur, un certain Louis XIV, n’a pas cinq ans. Nouvelle régence d’une nouvelle reine mère, elle s’appelle Anne d’ Autriche , en fait elle est la fille du roi d’Espagne, c’est le charme des titulatures de l’époque. Au début tout va bien. Le premier cardinal-ministre, sur son lit de mort, en a légué un deuxième à la France, un proche qu’il a formé : Mazarin. De caractère, l’« Éminence seconde », comme on l’appelle parfois, est aussi différente de la première que l’eau du feu : il est rond, madré, sirupeux. Richelieu était d’Église par hasard. Mazarin, ancien diplomate pontifical, l’est quasiment par nature : onctueux, papelard, il campe le type même du « prélat » à la romaine. Surjouant l’humilité pour l’extérieur et jamais en reste, en privé, pour satisfaire sa noble personne : sa cupidité et son avarice deviendront légendaires. Richelieu était trop craint pour qu’on osât élever la voix contre lui de son vivant,
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