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Nos ancêtres les Gaulois et autres fadaises

Nos ancêtres les Gaulois et autres fadaises

Titel: Nos ancêtres les Gaulois et autres fadaises Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Reynaert
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longue parenthèse par quelque action méritoire, quelque geste noble ? En général, on convoque le souvenir des deux grandes âmes chevaleresques du temps des croisades : Saladin, qui fait envoyer des médecins pour soigner ses adversaires s’il les sait malades, et Richard Cœur de Lion, impressionné par la grandeur de cet adversaire, qui rêve de lui donner sa sœur en mariage – et ne le fera pas. À dire vrai, on trouve aussi dans la biographie des deux hommes bien des épisodes autrement sanglants – massacres de prisonniers, tueries gratuites –, mais on dira que l’époque n’allait pas sans. Pour ma part, je préfère profiter de l’occasion pour vous toucher deux mots d’un personnage moins connu en France et qui est un de mes favoris dans cette période : Frédéric II de Hohenstaufen (né en 1194, règne en 1220, meurt en 1250), empereur du Saint Empire romain. Les Allemands en ont une approche prudente, car le pire nationalisme germanique chercha un peu trop, au xx e  siècle, à l’annexer. Quelle erreur ! Il n’y a pas moins national, moins étroit que ce grand esprit.
    Souvenez-vous, on l’a vu passer déjà lors du chapitre traitant de la bataille de Bouvines. Il était ce jeune candidat au trône impérial que soutenait discrètement Philippe Auguste. Il appartient, du côté de son père, à la grande famille Hohenstaufen et sera le dernier empereur de cette dynastie. Il est normand par sa mère, c’est pour ça qu’il est élevé à Palerme : dans la première moitié du xi e  siècle, un petit seigneur du Cotentin a enlevé la Sicile aux Arabes, et ses descendants y ont bâti un royaume – on l’appelle le royaume normand de Sicile. Ils le gouvernent toujours avec des principes de tolérance religieuse envers chacun, ce qui est rare à l’époque. De la Sicile normande, les musulmans n’ont pas été chassés. Chacun peut y pratiquer librement sa religion et Frédéric est l’héritier de ce principe. Il parle latin, sicilien, grec, arabe, normand, il aime toutes les civilisations, favorise les arts et la science et est fou de chasse au faucon – sur laquelle il a écrit un précieux traité. Le pape, après avoir lâché Otton, le vaincu de Bouvines, a fait son élection, mais leur belle alliance est de fort courte durée : rivalité de territoires dans le Sud de l’Italie, conflits de pouvoir comme il y en eut tant. L’empereur, comme bien d’autres avant lui, sera excommunié. Il le sera même par deux fois mais il s’en fiche bien. Il passe pour un des esprits les plus libres de son temps, et l’honorable Malet-Isaac, le plus classique des manuels d’histoire, nous dit qu’il « affirmait que Moïse, Jésus et Mahomet étaient trois imposteurs », ce qui semble presque irréel pour l’époque.
    Quoi qu’il en soit, on est sûr que la religion le souciait assez peu. C’est au moment même où il est excommunié qu’il se décide à une entreprise qu’il a repoussée dix fois : monter une croisade. La sienne sera la sixième (1228-1229). Il la mènera avec des méthodes qui scandaliseront les bons chrétiens du temps. Pour récupérer Jérusalem, ce à quoi personne n’est parvenu avant lui, il refuse de combattre et passe par la diplomatie. Il signe avec le successeur de Saladin le traité de Jaffa (1229), qui est une parfaite réussite. L’accord lui vaut même de pouvoir être couronné roi de Jérusalem. L’histoire rapporte qu’une seule chose l’ennuya, lors de la cérémonie : par courtoisie, son ami le sultan avait demandé aux muezzins de la Ville sainte de ne pas chanter la prière et cela déplut à l’empereur. Il voulait qu’à Jérusalem on continuât à entendre « la langue chaude des Arabes » qui lui rappelait son enfance.
    Jusqu’à sa mort à Lucera, la ville qu’il avait fondée dans le sud de l’Italie, sa garde, ses soldats furent musulmans. Après sa disparition, faute d’héritier, son beau royaume de Sicile et d’Italie du Sud passera pour un temps à des Français, le frère puis le neveu de Saint Louis, de la famille d’Anjou. Ils feront massacrer tout le monde.
    1 Je conseille tout particulièrement Les Croisades , compilation des articles de la revue L’Histoire , « Point », Le Seuil, 1988.
    2 JC Lattès, 1983 ; J’ai lu, 1999.

10
    Rachi
    Un vigneron nommé Salomon

    Avec les rois et les batailles, on usait naguère d’un autre bon moyen de faire entendre les grandeurs de l’histoire de France

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