Nos ancêtres les Gaulois et autres fadaises
à 1316. Le propre fils de celui-là vient au monde après sa mort, c’est pour cela qu’on l’appelle Jean I er le Posthume, mais il meurt bébé, quelques mois après son père. On fait donc appel au frère de Louis : Philippe V le Long (qui règne de 1316 à 1322), puis encore à l’autre frère : Charles IV le Bel (règne de 1322 à 1328). Et c’est tout. Aucun n’a d’héritier mâle. La belle mécanique de transmission du père au fils qui avait permis aux Capétiens de se maintenir sur le trône depuis 987 s’est enrayée. Les grands du royaume choisissent pour succéder à Charles IV un de ses cousins. Il sera couronné sous le nom de Philippe VI (règne de 1328 à 1350), il inaugure une nouvelle branche dynastique de la famille capétienne : les Valois.
Repères
– 1337 : Édouard III se proclame roi de France
– 1356 : bataille de Poitiers, défaite du camp valois, Jean le Bon prisonnier
– 1364 : mort de Jean le Bon, Charles V roi de France
– 1380-1422 : règne de Charles VI, le roi fou
– 1429 (juillet) : Charles VII sacré à Reims
– 1453 : victoire de Charles VII à Castillon, bataille qui met fin à la guerre de Cent Ans
Un autre candidat au trône était possible. Philippe le Bel, outre ses trois fils, avait une fille, Isabelle, mariée au roi d’Angleterre Édouard II. Étant femme, elle ne peut prétendre régner 1 : bientôt leur fils Édouard III estimera que lui le peut, et que sa filiation lui donne, à lui aussi, des droits sur le trône de son grand-père. À dire vrai, l’Anglais se décidera bien tard, et il faudra, pour qu’il arrive à faire valoir cette prétention, des années de querelles avec son parent Valois. Les sujets de discorde ne manquent pas. Il y a l’alliance que les Français ont tissée avec l’Écosse, avec laquelle il est lui-même en guerre. Il y a surtout une succession de brouilles qui ne cessent de s’envenimer à propos de la Guyenne – toute cette large partie du Sud-Ouest de la France d’aujourd’hui, dont la capitale est Bordeaux. Les Plantagenêts la possèdent depuis le mariage d’Aliénor d’Aquitaine et d’Henri II, en 1152, mais, selon les lois du monde féodal, ils n’y sont qu’au titre de vassaux du roi de France et cela crée d’interminables conflits de préséance. Un vassal, on s’en souvient, est tenu de s’incliner devant son suzerain et de mettre ses mains dans les siennes, en signe de soumission, lors de la cérémonie d’hommage. Est-il si convenable qu’un roi ait ainsi à se soumettre à un autre roi ? L’Anglais le supporte de plus en plus mal. De son côté, le Valois ne fait rien pour adoucir la situation, bien au contraire. En 1337, sous de sombres prétextes, il confisque la Guyenne. Exaspéré, Édouard III joue son va-tout : il se déclare lui-même roi de France et débarque bientôt sur le continent avec son armée pour faire valoir concrètement cette prétention.
Nous voici donc avec deux monarques pour un seul trône : c’est le début d’un conflit qui verra se succéder d’innombrables batailles, des successions de traités plus ou moins appliqués, des trêves plus ou moins longues, et durera en tout plus d’un siècle. Il a commencé vers 1340. La dernière bataille – la victoire des Français de
Charles VII à Castillon (dans l’actuelle Gironde) – aura lieu en 1453. L’ultime traité est signé – entre Louis XI et Édouard IV – à Picquigny (dans la Somme) en 1475. C’est pour cette raison qu’au xix e siècle les historiens ont baptisé cette longue querelle « la guerre de Cent Ans ».
Ce qui a changé
Il nous faut être clair : dans une des perspectives qui nous occupent dans ce livre, c’est-à-dire la lente construction des identités nationales, l’événement représente une étape majeure. Avec ces histoires d’hommage, ces querelles de vassalité qui opposent le Plantagenêt et le Valois à propos de la Guyenne, on voit que cette longue affaire prend racine dans le monde féodal. Nous sommes encore dans ce Moyen Âge déjà décrit, la notion de pays au sens moderne, d’État, n’a encore aucun sens. Édouard III est roi d’Angleterre, pour autant lui assigner cette « nationalité » est absurde : comme tous ses prédécesseurs Plantagenêts, il est, tout autant que son parent Valois, de langue et de culture françaises.
L’aspect militaire des affrontements nous renvoie lui aussi au monde ancien, au
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