Nostradamus
redoutable bandit.
Lorsque Gaétan de Roncherolles, sous le règne
d’Henri II, fut fait grand-prévôt de Paris, en récompense de
ses services secrets, son premier soin fut d’essayer de débarrasser
Paris du truand qui mettait le guet sur les dents. Une expédition
fut organisée et le chevalier du guet, messire de Montander, en
prit le commandement. L’expédition échoua.
Le lendemain matin, Roncherolles vit une
potence dressée dans la rue. À cette potence un cadavre se
balançait. Roncherolles examinant le cadavre, reconnut messire de
Montander.
Roncherolles ne dit rien. Mais aux apprêts
qu’il fit, Brabant comprit que les choses allaient se gâter pour
lui.
– Myrtho, dit-il, je crois que les
cordiers royaux sont en train de me tresser leur plus belle cravate
de chanvre. Or je hais les honneurs, et j’ai la prétention, entre
ces honneurs et mon cou, de mettre la distance de quelques
centaines de lieues.
Myrtho approuva fort ce projet de fuite.
D’ailleurs, Brabant voulait voir du pays.
– C’est bien, fit-il, prépare les hardes
de mon petit Royal.
– Quoi ! Tu prétends emmener le
Royal ?
Et Myrtho éclata en sanglots. L’enfant de
Marie, celui qu’elle avait nommé Royal, était devenu son enfant au
même titre que sa fille Myrta. À cette époque, il allait sur ses
treize ans. On lui en eût donné quinze. Pour la vigueur et la
souplesse, il l’emportait sur tous les enfants de la Cour des
Miracles, dont il était la terreur. Myrtho l’adorait pour ses
qualités et pour ses défauts pêle-mêle. Quant à la petite Myrta, le
Royal, qui la protégeait, était son Dieu.
Myrtho pleura, menaça, mais rien n’y fit.
Brabant demeura inflexible, et, expliqua à Myrtho que l’enfant
savait déjà manier une rapière, détrousser un bourgeois, aider à
rosser les gens du guet, qu’en conséquence, il promettait de
devenir un gentilhomme accompli – mais qu’il était ignorant de
l’équitation.
– Écoute, mon petit Royal, ajouta-t-il,
veux-tu, avec moi, voir tous les pays connus, inconnus et les
autres encore ?
Le Royal enthousiasmé jura que rien ne
l’empêcherait de suivre Brabant sur un grand cheval. Et comme il
était plutôt dur de cœur, c’est à peine s’il fit attention aux
larmes de Myrtho. Pourtant, il l’embrassa en lui disant :
– Songe donc que plus je verrai de monde,
plus j’aurai de bourgeois à dévaliser, et, par conséquent, plus
riche je reviendrai !
Puis à la petite. Myrta, il adressa à peu près
les mêmes consolations. La fille n’eut pas une larme. Mais elle
était très pâle.
Le même jour, Brabant et le Royal,
s’enfoncèrent dans l’inconnu. Brabant trottait. Le Royal le
suivait.
En quelques années, Le Royal parcourut le
monde côte à côte avec Brabant, tantôt se battant sous une
bannière, tantôt sous une autre, tantôt, enfin, pour son propre
compte. Il fut au siège de Metz, à la bataille de Rentzy, devant
Civitella, à la prise de Calais. Il fut partout où il y avait des
horions à donner. C’était vers la vingtième année un terrible
pourfendeur de crânes, un troueur de poitrines réputé. Lui-même
avait, le corps couturé d’entailles. Ses duels furent
innombrables.
Il avait inventé un coup irrésistible de la
rapière jetée de revers au visage de l’adversaire qu’il cinglait
ainsi avant de lui porter la botte fatale. Ses admirateurs, gens de
sac et de corde appelaient cela
le coup de beau revers.
Peu à peu, de la chose, le nom remonta à son inventeur. Il fut dès
lors
Le Royal de Beaurevers.
Ce jeune homme de vingt ans semblait avoir
vécu cinquante ans dans les camps et les corps de garde. Pas un
maître en fait d’armes n’eût pu lui en remontrer ; escrime
française, escrime italienne, escrime espagnole, il savait toutes
les passes ajoutées à son terrible coup de revers. Il était
redoutable et redouté ; irascible, rude, infatigable… Myrtho
l’avait dit : il était fait en pur acier de Tolède.
Il était féroce, sans pitié. Il n’avait de
confiance qu’en sa rapière, d’estime que pour Brabant. Il était
beau, élégant. Dans la mêlée, ses yeux flamboyaient. Quand il avait
été payé pour une besogne, il se ruait avec la puissance d’une
force de la nature, et le meurtre, l’incendie, le pillage
l’escortaient.
Il était orgueilleux, jaloux de son
indépendance. À la prise de Calais, le duc de Guise étonné de sa
bravoure, le fit appeler, et lui dit :
– Je te
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