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Notre France, sa géographie, son histoire

Notre France, sa géographie, son histoire

Titel: Notre France, sa géographie, son histoire Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jules Michelet
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pourtant, était horrible. Il avait fallu mettre dehors tout ce qui
     ne pouvait pas combattre, les bouches inutiles, 12,000 vieillards, femmes, et
     enfants. Cette foule déplorable reçue par les Anglais à la pointe de l'épée,
     passa l'hiver sous le ciel, dans le fossé, sans autre aliment que l'herbe
     qu'elle arrachait. — Des femmes hélas ! y accouchèrent..... Alors, on
     hissait le nouveau-né par des cordes pour qu'il reçût le baptême, puis on le
     redescendait pour qu'il allât mourir avec sa mère.
    Quand ceux de la ville eurent mangé les chevaux, les chiens, les
     chats, et tout ce qui pouvait être un aliment, tant fût-il immonde, il fallut
     bien se rendre.......
    Charles VII dont le règne se définit : la victoire de la France
     sur l'Angleterre, lui arracha des dents, trente ans plus tard, cette riche
     proie. Elle perdit avec l'Aquitaine, son paradis de France, la Normandie une
     autre elle-même, une terre anglaise, d'aspect, de production, qu'elle devait
     toujours voir en face pour la regretter.
     
    Le climat de la Normandie n'est pas tout à fait celui de l'Angleterre.
     Du côté de la France, l'eau tombe en pluie plus qu'en brouillards ; c'est
     une irrigation moins parfaite, mais qui n'est pas moins pour notre pays une
     source de richesse. Si vous comparez ce Nord brumeux au Midi, sans doute vous
     trouverez que les productions y sont moins variées ; en récompense la
     nature y fait pour l'homme ce qui est en Provence, en Languedoc, son plus
     grand, son plus difficile travail : l' irrigation .
    La pluie donne à la Normandie son véritable caractère. Les animaux des
     prairies ont plutôt l'air de s'en réjouir comme s'ils prévoyaient que l'herbe
     n'en sera que plus tendre. L'humidité constante fait de cet ouest de la France
     un immense pâturage, d'une vie sans cesse renouvelée.
    Si, partant de Paris, vous prenez, à droite, par le Vexin Normand,
     vous verrez, dès Gisors, un changement subit se produire : la forte
     verdure commence, les belles carnations ; les usines se multiplient le
     long des eaux, les fermes sur la campagne. Si, au contraire, vous suivez à
     gauche, la route qui par Mantes, Vernon, Louviers et le Pont-de-l'Arche conduit
     à Rouen, la Normandie vous apparaît, à Louviers, noyée dans les canaux. La
     brique et les pommes se montrent plutôt, dès Vernon. En avançant, vous ondulez
     sur des terrains mollement accidentés, médiocrement variés par la nature, mais
     variés au contraire, par les hommes. Sur le tapis arlequiné jaune et vert, on
     admire l'extrême subdivision des propriétés. C'est presque du Lycurgue. Il
     semble que ce soit la saie bariolée des anciens Gaulois qu'on ait étendue sur
     le sol.
    Ces champs tous en parallélogrammes vous représentent le castrum romain. La division sévère du territoire ne dût commencer
     qu'avec l'établissement des légions en colonies, l'égalité est le principe de
     l'art de l'agrimensor romain. S'il ne partage d'abord que les terres
     patriciennes, c'est qu'alors il n'y a point d'autre propriété.
    Les plébéiens ne sont pas dans la cité. La loi impériale, c'est-à-dire
     plébéienne, ne fait qu'étendre cela à tous.
    Les bois, produit de la nature ou de la vieille et patiente
     aristocratie qui imitait la nature, — se croyant éternelle comme elle, — les
     bois s'en vont, pour faire place aux plantes rapides et mobiles. Sur les
     coteaux, les falaises mieux essuyées que la plaine, plus éventées aussi, vous
     voyez monter le blé comme pour témoigner que l'air de mer qui le rase, n'est ni
     froid, ni hostile.
    Malgré le déboisement progressif de la Normandie, la campagne est loin
     de se présenter dans l'état de nudité indigente qui attriste tant d'autres
     points de la France. Les longues avenues des châteaux normands, l'épais rideau
     de verdure dont s'enveloppent les grandes fermes, les arbres qu'on entretient
     soigneusement au bas des routes et le long des cavées profondes pour soutenir
     les terres, les haies, enfin, partout multipliées par crainte des empiètements
     font, de la Basse-Normandie, surtout, un véritable bocage 3 .
    Dans cet occident de la France (de même en Bretagne et en Vendée), il
     semble qu'on ait senti la nécessité de se défendre. La propriété y est plus
     divisée que dans la Haute-Normandie, précisément parce qu'elle l'était moins
     avant la Révolution. La terre, au moins en partie, a passé d'un coup aux mains
     de

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