Oeuvres de Napoléon Bonaparte, Tome V.
plus de douze cents voitures de blessés avaient passé par cette route.
Le roi de Prusse et l'empereur Alexandre avaient couché à Rochlitz.
Un adjudant-sous-officier du dix-septième provisoire, qui avait été fait prisonnier à la bataille du 2, s'est échappé et a raconté que l'ennemi a fait de grandes pertes et se retire dans le plus grand désordre ; que pendant la bataille les Russes et les Prussiens tenaient leur drapeaux en réserve, ce qui fait que nous n'en avons pas pu prendre ; qu'ils nous ont fait cent deux prisonniers, dont quatre officiers ; que ces prisonniers étaient conduits en arrière sous la garde du détachement laissé aux drapeaux ; que les Prussiens ont fait de mauvais traitemens aux prisonniers ; que deux prisonniers ne pouvant pas marcher par extrême fatigue, ils leur ont passé le sabre au travers du corps ; que l'étonnement des Prussiens et des Russes d'avoir trouvé une armée si nombreuse, aussi bien exercée et munie de tout, était à son comble ; qu'il y avait de la mésintelligence entre eux, et qu'ils s'accusaient respectivement de leurs pertes.
Le général comte Lauriston, de Wurtzen, s'est mis en marche sur la grande route de Dresde.
Le prince de la Moskwa s'est porté sur l'Elbe pour débloquer le général Thielmann qui commande à Torgau, prendre position sur ce point et débloquer Wittemberg : il paraît que cette dernière place a fait une belle défense et repoussa plusieurs attaques qui ont coûté fort cher à l'ennemi.
Des prisonniers racontent que l'empereur Alexandre, voyant la bataille perdue, parcourait la ligne russe pour animer le soldat, en disant : «Courage, Dieu est pour nous.»
Ils ajoutent que le général prussien Blucher est blessé, et qu'il y a cinq généraux de division et de brigade prussiens tués ou blessés.
Le 6 mai au soir.
A S. M. l'impératrice-reine et régente.
Le quartier-général de S. M. l'empereur et roi était à Waldheim ; celui du vice-roi, à Ertzdorf ; celui du général Lauriston était à Oschatz ; celui du prince de la Moskwa, entre Leipsick et Torgau ; celui du comte Bertrand, à Mittweyda ; celui du duc de Reggio, à Penig.
L'ennemi avait brûlé à Waldheim un très-beau pont en bois d'une seule arche ; ce qui nous avait retardé de quelques heures. Son arrière-garde avait voulu défendre le passage, mais s'était déployée sur Ertzdorf : la position de ce dernier point est fort belle ; l'ennemi a voulu la tenir. Le pont étant brûlé, le vice-roi fit tourner le village par la droite et par la gauche. L'ennemi était placé derrière des ravins. Une fusillade et une canonnade assez vives s'engagèrent ; aussitôt on marcha droit à l'ennemi, et la position fut enlevée : l'ennemi a laissé deux cents morts sur le champ de bataille.
Le général Vandamme avait, le 1er mai, son quartier-général à Harbourg. Nos troupes ont pris un cutter de guerre russe armée de vingt pièces de canon. L'ennemi a repassé l'Elbe avec tant de précipitation, qu'il a laissé sur la rive gauche une infinité de barques propres au passage et beaucoup de bagages. Les mouvemens de la grande armée étaient déjà connus, et causaient une grande consternation à Hambourg. Les traîtres de Hambourg voyaient que le jour de la vengeance était près d'arriver.
Le général Dumonceau était à Lunebourg.
A la bataille du 2, les officiers d'ordonnance Bérenger et Pretel ont été blessés, mais peu dangereusement.
En notre camp impérial de Goldit, le 6 mai 1813.
Lettre de l'empereur à la maréchale duchesse d'Istrie.
«Ma cousine, votre mari est mort au champ d'honneur. La perte que vous faites et celle de vos enfans est grande sans doute, mais la mienne l'est davantage encore. Le duc d'Istrie est mort de la plus belle mort et sans souffrir. Il laisse une réputation sans tache ; c'est le plus bel héritage qu'il ait pu léguer à ses enfans. Ma protection leur est acquise ; ils hériteront aussi de l'affection que je portais à leur père. Trouvez dans toutes ces considérations des motifs de consolation pour alléger vos peines, et ne doutez jamais de mes sentimens pour vous. Cette lettre n'étant à autre fin, je prie Dieu qu'il vous ait, ma chère cousine, en sa sainte et digne garde.»
NAPOLÉON.
Le 9 mai au matin.
A S. M. l'impératrice-reine et régente.
Le 7, le quartier-général de S. M. l'empereur et roi était à Nossen.
Entre Nossen et Wilsdruf, le vice-roi a rencontré l'ennemi placé derrière un
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