Par le sang versé
à faire la R. C. 4 à quatre pattes.
– D’accord, sergent, mais cette charogne d’Arabe n’avait pas besoin de m’insulter.
– Ah ! Parce qu’elle ne s’est pas contentée de vous jeter dehors ! En plus, elle vous a chambrés.
– Tu parles ! Elle m’a dit : « Vous avez qu’à vous « niquer entre vous. »
– On n’a pourtant pas entendu de coup de feu ! Tu vieillis, Hugo !
– Je lui ai foutu une baffe, je crois qu’on est fâchés. »
Le 4 octobre, à cinq heures du matin, Forget prévient que l’on se remet en marche. Kress fait passer l’ordre qui se transmet le long de l’interminable convoi humain. La chenille géante reprend son allure traînarde. Les premiers passent Nam-Nang déserté, vers dix heures. Les éléments de tête ont recueilli quelques rares civils supplémentaires au passage.
Deux heures plus tard, la section « balai » Kress vient juste de sortir de Nam-Nang à son tour lorsque – imprévu – c’est l’arrêt.
Par radio, Kress interroge. On lui répond :
« On attend des instructions, on vous préviendra. Restez à l’écoute. »
Les ordres se font attendre trois quarts d’heure. Enfin, le contact reprend. Snolaerts réclame, par geste, un papier et un crayon. Sans lâcher l’écoute, avec une application d’élève studieux, il écrit, son papier froissé disposé en équilibre sur le genou. Enfin, il répond :
« Bien compris. Question – Unité – Alpha – Nord – Gala – Quang. Loi – Idée – Est – Taxi – Liet – Quang – Liet – Terminé.
– Qu’est-ce que c’est que cette salade ? interroge Kress.
– Il paraît que Charton et Forget cherchent une piste du nom de Quang-Liet qui doit se trouver dans le secteur, sur la droite de la route. Ils nous demandent de remonter le long des civils et de les questionner pour savoir si quelqu’un la connaît. De leur côté, ils envoient deux gus qui interrogent les Chinois de tête en descendant vers nous :
– Une piste ? Qu’est-ce qu’ils veulent en foutre ? »
Snolaerts tend le micro.
« Si ça t’intéresse, sergent, tu le leur demandes. Moi, je fais que transmettre, c’est mon boulot.
– Oh ! Ça va ! Bon, j’y vais avec Govin. Il faut commencer par trouver un interprète : neuf sur dix de ces Chinois ne parlent pas un mot de français.
– Les putes…
– Évidemment, les putes ; au moins elles vont servir à quelque chose, et c’est pour ça que j’y vais en personne. »
La présence du sergent n’était pas superflue. Il faut convaincre Aïcha que si on lui enlève quelques instants l’une de ses « protégées » c’est pour un motif noble, que ça n’est pas pour « niquer », comme elle s’acharne à se le faire jurer.
La petite Annamite qui suit les deux légionnaires parle un français parfait, et en nach, elle sait se faire comprendre. Le long de la colonne, elle ne cesse d’interroger : « Qui connaît la piste de Quang-Liet ? » Il faut plus d’une heure de recherches avant qu’un vieillard réagisse à la question. Il engage avec la prostituée un long palabre incompréhensible, avant qu’elle ne traduise :
« Il connaît Quang-Liet. C’est une ancienne piste qui mène à That-Khé par le village de Lan-Haï, mais il dit que personne ne passe plus par là depuis des années.
– Demande-lui s’il saurait reconnaître l’endroit. »
Le vieillard est affirmatif. Il fut un temps où il se rendait souvent à Lan-Haï par la piste.
Les deux légionnaires se trouvent plus près de la queue de la colonne que de sa tête. Ils décident de redescendre et de contacter le P. C. par radio. Ils emmènent avec eux le vieillard et déposent la putain au passage.
Le commandant Forget est prévenu. Un quart d’heure plus tard il arrive en jeep, accompagné de son chauffeur et d’un interprète. De nouveau le vieillard est interrogé, puis il est invité à prendre place dans la jeep qui disparaît dans un nuage de poussière, remontant la colonne.
Forget, nerveux, a à peine répondu aux questions de la section arrière.
« Et voilà, déclare Kress, pour les explications on repassera !
– Tu crois qu’ils ont l’intention de nous faire prendre cette piste ? interroge Maggioli.
– S’ils la cherchent avec tellement d’insistance c’est sûrement pas pour aller y cueillir des fraises. »
Kress a sorti de son képi une carte imprégnée d’humidité et de sueur, il
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