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Par le sang versé

Par le sang versé

Titel: Par le sang versé Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Paul Bonnecarrère
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difficulté, il débite les litanies rituelles.
    « Ici, Na-Cham, je vous passe mon Autorité.
    –  Ici, Mattei, commandant le poste de Na-Cham. Je désire obtenir un échange avec le général Alessandri, question prioritaire, caractère d’urgence absolue.
    –  Reprenez le contact dans un quart d’heure, nous transmettons votre message au général. »
    À cinq heures trente, Mattei obtient en personne le général Alessandri.
    « Mon général, j’ai besoin d’obus de 105 et de 75. Tout ce que vous pourrez me larguer. J’installe un appui de feu sur la R. C. 4 qui assurera le passage du col de Lung-Vaï.
    –  Vous avez combien de pièces, Mattei ?
    –  Deux 105, et deux 75, mon général.
    –  Je l’ignorais.
    –  Je vous raconterai tout ça un de ces jours, mon général.
    –  Mais Lepage est déjà passé au col de Lung-Vaï ?
    –  C’est à son retour que je pensais, mon général. »
    Sciemment, Alessandri ignore la dernière phrase du capitaine, il reprend :
    « Quel est votre plafond ?
    –  Hélas ! Très bas. Il faudrait me larguer ça pratiquement en rase-mottes.
    –  Je vais voir si je peux foutre la main sur Fontange. J’essaie de vous donner satisfaction en tout cas.
    –  J’avoue que j’avais pensé à lui, mon général, merci. »
    Mattei repose le micro et se tourne vers Klauss :
    « Vous voyez bien que tous les généraux ne sont pas des abrutis comme vous sembliez le penser, Klauss.
    –  Bien sûr, mon capitaine, et le fait que vous soyez Corse n’a rien changé à la situation.
    –  Pas d’insolence facile, Klauss, et surtout foutez la paix aux Corses.
    –  Excusez-moi, mon capitaine. Au fait, qui est-ce fameux Fontange auquel a fait allusion le général ?
    –  Le capitaine de Fontange, Klauss. C’est un ivrogne chronique qui se sert d’un Junker comme d’un Piper-Cub.
    –  Ah ! Oui, j’en ai entendu parler. C’est le pilote qui fait du rase-viet en Chine, chaque fois qu’il est bourré.
    –  On le prétend, Klauss. On prête au capitaine de Fontange un certain nombre d’extravagances de cet ordre. Les gens sont médisants. En tout cas, bourré ou pas, si un aviateur est capable de nous survoler par cette crasse, c’est lui et pas un autre. »
    À dix heures du matin, on entend le Junker sans le voir. Le capitaine de Fontange a établi un contact radio.
    « Je suis en pleine purée, il faut me guider, quelle est votre visibilité ?
    –  Cent mètres maximum. Et attention à vous, Fontange, autour, ça n’est pas plat.
    –  Je connais l’approche par le sud. Si je passe, je vous balance les caisses sans parachutes. Gare à vos gueules ! »
    Quand le gros Junker apparaît, ses trois moteurs au ralenti, Mattei pense qu’il va s’écraser sur eux. L’avion lâche une dizaine de caisses qui tombent échelonnées sur trois cents mètres, puis il effectue un ahurissant virage sur l’aile, frôle littéralement le toit du poste, reprend péniblement de l’altitude et va se perdre de nouveau dans l’épaisseur de la brume poisseuse. Fontange n’a pas interrompu son contact.
    « Ça va, Mattei ? »
    Le capitaine reprend le micro.
    « Bravo, Fontange ! Pas une bavure !
    –  Tant mieux, je rentre. La plus petite caisse, c’est du Champagne, j’ai enveloppé les bouteilles moi-même dans de l’ouate, elles doivent être intactes, mais laisse-les quand même reposer une heure avant de les siffler !
    –  Compris, merci.
    –  On fait une drôle de guerre, Mattei ! En tout cas, le petit Corse d’Hanoï va être content. Ça lui a remonté le moral de te donner un coup de main, et crois-moi, il en avait besoin.
    –  Alors, merci aussi pour lui, Fontange ! À bientôt !
    –  Qui sait ?… »

39.
     
     
     
    C AO -B ANG , 1 ER octobre. Charton a mis en place le dispositif qui lui permettra de faire sauter la ville entière dès qu’il recevra l’ordre d’évacuation. Cet ordre, il le reçoit dans la soirée : l’abandon de Cao-Bang est prévu pour le lendemain, 3 octobre à minuit.
    Par radio, Charton hurle sa désapprobation. Il est absurde de fixer une date précise ; l’évacuation ne doit avoir lieu qu’en fonction des conditions atmosphériques ; l’appui de l’aviation et donc un temps clair sont, selon lui, la seule chance de succès.
    La réponse est non : le 3 octobre à minuit, pas une seconde avant, pas une après. D’ailleurs la colonne Lepage progresse sans incident, elle a

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