Paris, 1199
de
cathares ici ! Ou alors, que le Seigneur nous vienne en aide !
— Ces cathares sont ceux qui honorent
Belzébuth, n’est-ce pas ? demanda Cadoc avec brusquerie.
— Pas exactement, répondit le prévôt.
— Ils croient simplement que notre monde a
été créé par Belzébuth, ce qui revient au même, corrigea frère Guérin.
— Sont-ils riches ? s’enquit Cadoc.
— Au contraire, ils méprisent les richesses,
répliqua le prévôt en dissimulant un sourire.
— Je ne peux y croire ! Mais c’est sans
importance, pour l’instant. Avez-vous trouvé cet Anglais ?
— Hélas, non, seigneur, je le cherche toujours.
J’ai seulement découvert qu’il logeait à la Corne de Fer, mais il n’y est pas
revenu depuis qu’il a libéré ce tisserand cathare. En revanche, j’ai trouvé
dans sa chambre un équipement de chevalier. Ce Robin n’était pas un simple
archer.
— Cela prouve bien qu’il était envoyé par le
prince Jean, opina le frère hospitalier.
— Qu’est devenu cet équipement ? demanda
Cadoc.
— Il y avait un camail, des armes, des
éperons, un gambison et quelques vêtements. Ainsi que le harnachement de son
palefroi qui est toujours à l’écurie. J’ai tout laissé pour qu’il revienne les
prendre, auquel cas l’aubergiste me préviendra aussitôt.
— C’est absurde ! Ces biens
appartiennent désormais au roi ! J’irai les chercher.
Et ainsi ils seront à toi ! persifla
intérieurement le prévôt Hamelin. Il hésita alors à parler des Templiers, de
Malvoisin et de Beaumanoir, puis il se dit que la mort du sergent Templier tué
par Robin était sans rapport et qu’il était inutile de compliquer les choses.
— Tant que je n’aurai pas saisi cet archer, il
serait prudent que le roi ne se montre pas en public, suggéra-t-il.
— Il restera à Vincennes jusqu’à l’Ascension,
dit frère Guérin. Mais pour cette fête, il sera de retour ici, car il s’est
engagé auprès de l’évêque à assister à la messe à Notre-Dame.
— C’est dans dix-neuf jours ! Hamelin,
c’est plus qu’il n’en faut pour trouver ce Robin, décida Cadoc. Faites crier
son nom à son de trompe partout devant les églises. Annoncez que ceux qui le
protégeront seront pendus. Cela devrait suffire.
Frère Guérin opina du chef.
— Je vais le faire, seigneurs.
— Je resterai à Paris jusqu’à ce que vous le
trouviez, décida Cadoc. Je logerai au Louvre. Le roi m’a demandé d’aller voir
où en sont les travaux de l’enceinte.
— Ils sont bien avancés, assura Hamelin qui
en était le responsable. Soyez assuré que, terminé, le Louvre sera un château
imprenable.
En sortant du Palais, le prévôt de Paris se rendit
chez son frère, à l’abbaye Saint-Éloy qui était à quelques pas. Il avait hâte
de lui raconter ce qu’il avait appris. Son frère connaissait tous les
paroissiens de Saint-Gervais. Par lui, il saurait ceux qui étaient proches
d’Étienne Le Trébuchet. Maintenant qu’il y avait urgence à trouver cet
archer, il n’hésiterait pas à les arrêter et à les interroger au Grand-Châtelet,
y compris sous la torture.
Il trouva son frère cadet seul dans la grande
cellule où il vivait et travaillait. Une pièce austère meublée seulement d’une
table et d’un grand coffre, sans oublier le crucifix sur un mur. Robert était
assis sur son lit et son visage contracté reflétait les noires pensées qu’il
paraissait ruminer.
Ses traits se détendirent en voyant entrer son
aîné et il laissa filtrer un sourire sans joie.
— Je viens de rencontrer frère Guérin et je
voulais te faire part de ce que j’ai appris, dit le prévôt de Paris, mais tu
m’as l’air en plein désarroi…
— Je le suis, mon frère. L’abbé Isembard
vient de m’annoncer que je n’ai plus à m’occuper de l’archer anglais.
— Quoi ?
— Tu as bien compris ! L’abbé venait
lui-même de recevoir la visite de l’official qui lui retirait l’affaire.
— Pourquoi ?
— L’official était très mécontent de ne pas
en avoir été informé. C’est lui qui s’occupe des affaires d’hérésie, a-t-il
rappelé.
Songeur, Philippe Hamelin se passa la main sur le
menton. Était-ce une coïncidence ? L’official et l’évêque savaient-ils
quelque chose du complot cathare ou des funestes projets du nouveau roi
d’Angleterre ?
— Moi qui venais te demander ton aide…
— Raconte-moi au moins ce que t’a dit
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