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Paris Ma Bonne Ville

Paris Ma Bonne Ville

Titel: Paris Ma Bonne Ville Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Robert Merle
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à moi,
je ne bronchai point et le saluai aussi, encore que roidement.
    — Ce
galant gentilhomme, dit l’Etoile, est sans toit.
    — Baba,
c’est différent, dit Maître Recroche, en se grattant le nez de son ongle,
lequel était fort noir. Si le gentilhomme est sans toit et de plus votre ami,
il faudrait bien l’accommoder, fût-ce d’une chambrifime. Mais le peux-je ?
Voilà le hic !
    — Je vous
requiers en grâce, Maître Recroche ! dit l’Etoile, lequel à ce que je vis,
labourait si fort à patience garder que la sueur lui coulait sur la joue, je
vous prie, décidez, il se fait tard !
    — Décider !
dit Maître Recroche. Baba ! C’est plus vite dit que fait ! Les
chambrechettes dont je parle n’étant que deux et ces gentilshommes étant
quatre.
    — Nous
coucherons deux par chambre, dis-je.
    — Baba,
dit Maître Recroche, c’est que le lit dans chaque est tant petit que pour
un !
    — Il
faudra bien, dis-je, s’y mettre deux.
    — Ho que
non ! dit Maître Recroche. Ho que non ! À deux hommes forts dans ces
petitelettes couchetimes, vous les briseriez !
    — Tant
cassé, tant payé ! dis-je incontinent.
    — Voilà
qui est parlé, dit Maître Recroche, comme à part soi, en promenant son index
dextre le long de son nez. J’augure bien de ce logé-là, si je le loge !
Cependant, Monsieur de Siorac, poursuivit-il, la fenêtre est petite à pleurer
et fermée non de verre, mais de papier huilé.
    — Je
l’ouvrirai.
    — Gardez-vous-en !
Elle donne sur le cimetière des Innocents dont le sol est si pourrissant qu’il
vous consomme un corps en neuf jours ! Et l’air, la nuit, est tant pesant,
soufré et méphitique qu’il nourrit des feux follets.
    — Maître
Recroche, dis-je, votre prix !
    — Baba !
Vous l’aurez voulu ! dit Maître Recroche avec un soupir et un brillement
soudain de son petit œil bleu. Révérend docteur médecin, vu que vous êtes l’ami
de M. de l’Etoile, ce sera pour vous trois écus par mois, que vous restiez ou
non le mois.
    — Trois
écus pour deux chambrettes ! s’écria l’Etoile en levant les bras au ciel.
    — Nenni !
Vous errez ! dit Recroche d’un air bénin, j’entends trois écus par
chambrefime et un sol par jour et par cheval, à charge pour vous d’acheter le
foin.
    — Six
écus ! cria l’Etoile. De grâce, rabattez ! Recroche, rabattez !
Il y a abus !
    — Baba !
dit Recroche, l’abus, Monsieur le grand Audiencier, est dans l’immense presse
qu’il y a en Paris de présent. Qu’y peux-je ? Il faut bien vivre. Les
chambreloches me sont plus demandées que palais en Pologne, et je ne les baille
à ce gentilhomme que pour l’amour que j’ai pour vous.
    — La
merci Dieu et à vous de ce bon sentiment, dit l’Etoile, les lèvres fort
serrées.
    — En écus
francs, non rognés, sonnants et trébuchants et à’steure, et tout d’avance, dit
Maître Recroche, baissant l’œil humblement, mais du ton le plus sec.
    Il fallut
quérir Samson qui avait le gros des pécunes et comme bien vous pensez le
malmener prou pour qu’il consentît à raquer ces six écus pour le logement et
les chevaux. Quoi fait, le commis Baragran, portant une lanterne ardente et se
mettant en croupe de Miroul nous accompagna tandis que, l’épée dégainée, nous
menions Pierre de l’Etoile en son logis et incontinent revînmes, las à mourir,
la fesse navrée d’avoir tant tapé la selle et l’âme plus navrée encore d’être
logés si mal.
    — Maître
Recroche, dis-je, les chevaux dessellés et serrés en les écuries, avez-vous du
vin à nous bailler avant de nous aller coucher ?
    — Baba !
Du vin ! dit Recroche, en levant ses longs bras. Vous ne trouverez en ce
logis vinette, vinasse ou vinillon. La merci Dieu, personne céans ne
flaconne ! C’est luxe trop dispendieux.
    — De
l’eau donc !
    — Baba !
De l’eau ! Est-ce donc de l’air que mon eau ? Laquelle pourtant n’est
pas de la vile eau de Seine comme on vous en servira à Paris dans les tavernes
et les repues, eau pourrie de bren, de pisse et d’immondices à vous donner un
flux de ventre à crever. Mon eau est de l’eau de mon puits, sans boue ni
graveau, ni sel de mer, ni soufre.
    — Bref,
de l’eau. Faut-il aussi vous la payer, Maître Recroche ?
    — Assurément !
dit Maître Recroche en se frottant le nez. Il vous en coûtera un sol par jour
pour vous quatre et deux sols pour vos montures.
    — À ce
prix, vous donnez,

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