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Paris vaut bien une messe

Paris vaut bien une messe

Titel: Paris vaut bien une messe Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Max Gallo
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semblé bleue.
    Je me suis reproché à cet instant de ne pas me trouver
auprès d’elle pour lui crier à nouveau de quitter Paris avant que le mariage ne
fut célébré.
    À l’hôtel d’Espagne, j’avais entendu Maurevert s’inquiéter
de ce que certains gentilshommes huguenots, comme pressentant le péril, avaient
commencé de regagner leurs provinces.
    — Il y a toujours quelques rats pour échapper à la
noyade, avait répliqué Sarmiento. Mais les autres – Coligny, Henri, les
chefs de la secte – ne pourront pas sortir de la ville avant la fin des
cérémonies. Ils ont voulu ce mariage ? Ils n’auront pas qu’une messe
nuptiale !…
    Il s’était interrompu en me voyant, avait esquissé un geste
désinvolte, et, s’approchant de moi, m’avait pris le bras.
    Il savait que j’avais été malmené par les gentilshommes
huguenots qui gardaient cette maison du n° 7 de la rue de l’Arbre-Sec.
    — Tu seras vengé au-delà de ce que tu imagines,
m’avait-il dit.
    Puis, m’étreignant l’épaule, il avait murmuré :
    — Cette Anne de Buisson, la huguenote, tu la
veux ?
    Je m’étais écarté de lui, qui riait.
     
    La nuit est tombée et j’ai perdu de vue Anne de Buisson.
    J’étais si inquiet et il faisait si chaud que j’ai longtemps
marché parmi la foule, passant d’une rive de la Seine à l’autre.
    Toute la ville était dans les rues, sur les berges, écoutant
les prédicateurs. Depuis le parvis des églises ou juchés sur une borne, ceux-ci
annonçaient la vengeance de Dieu.
    L’un d’eux criait que le roi avait déjà détruit la Croix de Gastine,
fait pendre de bons catholiques, et qu’il livrait maintenant sa sœur Margot aux
turpitudes d’un hérétique. Il devait être puni !
    Des archers et des miliciens du prévôt s’avancèrent comme
pour s’emparer de lui, mais la foule les entoura et ils reculèrent sans
résister, complices, se contentant d’interdire à la foule de grimper sur les
échafaudages.
     
    Les jours suivants, jusqu’au 21 août, furent jours de
fête. Jamais je ne m’y sentis joyeux.
    Le roi et ses frères, la reine mère, Marguerite de Valois, Henri
de Navarre et l’amiral de Coligny, qu’ils fussent vêtus de soie bleue ou de
satin jaune, que leurs pourpoints ou leurs robes fussent on non constellés de
perles, qu’ils fussent gentilshommes huguenots, spadassins de Sarmiento ou des
Guises, déambulaient sur ces passerelles au-dessus de la foule, et je les
voyais comme des condamnés sur le point d’être précipités du haut de leurs
échafaudages, dans le grouillement des gens de rien. On se saisirait de
certains d’entre eux et on les dépècerait à la manière dont Dante décrit les
damnés livrés aux monstres infernaux.
    J’imaginais ces draperies blanc et or, couleurs des noces
des filles de France, qui masquaient les échafaudages et ornaient le portail de
Notre-Dame, déchirées, abattues, et la foule en faire des linceuls.
    Je la sentais ivre de rage. Elle montrait, bras tendu, Henri
de Navarre qui se tenait sur le parvis de la cathédrale, car il n’avait pas
voulu assister à la messe nuptiale, et c’était Henri d’Anjou, vêtu comme une
coquette, qui avait conduit Marguerite de Valois, sa sœur, à l’autel, puis,
après une cérémonie qui avait duré plusieurs heures, l’avait raccompagnée
jusqu’à son époux.
    La foule, en bas, avait hurlé. Et peut-être les huguenots
avaient-ils cru qu’on acclamait ce mariage alors qu’on le maudissait.
     
    Le 18, le 19, le 20, le 21, d’un salon du palais du Louvre à
un jardin ou à une cour de l’hôtel de Bourbon, j’ai cherché Anne de Buisson.
Partout l’on dansait, la pavane d’Espagne, le passemezzo d’Italie ou le
branle de la torche et du flambeau.
    Diego de Sarmiento s’approcha de moi pour me raconter que
l’amiral de Coligny avait blasphémé dans la nef de Notre-Dame. Il s’y était
promené non pas comme un croyant, mais comme un infidèle, disant à qui voulait
l’entendre qu’on décrocherait bientôt des colonnes et des chapelles les
étendards rappelant les victoires des catholiques sur les hérétiques, et qu’on
mettrait à leur place d’autres drapeaux plus agréables à voir.
    — Il l’a dit : il veut s’emparer des drapeaux
espagnols. Ce vieux fou continue de harceler le roi pour que se constitue une
armée de Français huguenots et catholiques qui irait combattre nos troupes aux
Pays-Bas.
    Sarmiento se pencha vers moi pour

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