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Paris vaut bien une messe

Paris vaut bien une messe

Titel: Paris vaut bien une messe Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Max Gallo
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par Jean-Baptiste Colliard, l’un des gardes de Coligny,
que l’on avait retrouvé une deuxième balle sur le sol de la rue des Poulies.
Mais l’émotion était trop grande pour que l’on prêtât attention à ce détail.
    Les gentilshommes huguenots s’étaient précipités vers la
maison d’où le tireur avait fait feu. J’ai vu l’arquebuse encore fumante, la
fenêtre grillagée derrière laquelle le tueur s’était tenu à l’affût, dissimulé
par des draps pendus devant la croisée, comme si la demeure avait été habitée
par quelque honorable famille soucieuse de faire sécher son linge au soleil du
matin.
    En interrogeant les domestiques, on a su que la maison
appartenait à l’un des précepteurs du duc de Guise. Les Guises ont dont été
aussitôt accusés d’être les ordonnateurs de l’attentat.
     
    Je me suis rendu au milieu de l’après-midi à l’hôtel
d’Espagne pour recueillir les propos des ennemis jurés de l’amiral de Coligny
que sont Enguerrand de Mons, le père Veron et Diego de Sarmiento, conseiller de
Philippe II, envoyé à Paris pour influencer la cour de France et la
surveiller.
    L’endroit était rempli d’hommes en armes qui m’ont entouré,
bruyants, soupçonneux et menaçants. Ils craignaient une attaque des
gentilshommes huguenots et imaginaient que je pouvais être l’un de leurs
espions.
    On m’avait vu penché sur Coligny, rue des
Fossés-Saint-Germain. J’avais conversé avec Guillaume de Thorenc et
Jean-Baptiste Colliard : cela suffisait à me rendre suspect.
    Je me suis fait connaître, mais, s’ils ont accepté de me
laisser traverser la cour, ils n’en ont pas moins continué à m’accuser d’être
l’ambassadeur d’une république qui avait traité avec les Turcs.
    Pour ces hommes-là, l’Espagne est le seul pays digne de
respect. Ils méprisent tous les autres.
     
    J’ai rencontré Bernard de Thorenc, frère de Guillaume le
huguenot. Assis sur l’une des marches de l’escalier, il m’a chuchoté le nom du
tueur à l’arquebuse, un certain Maurevert, familier de l’hôtel d’Espagne.
Maurevert aurait agi autant par foi que par esprit de lucre, la tête de Coligny
étant depuis plusieurs années mise à prix cinquante mille écus.
    — Maurevert est un loup, a lâché Bernard de Thorenc d’un
ton las.
    Il m’a cité plusieurs noms de ceux qu’il appelle les “hommes
sombres”, spadassins, gens de sac et de corde au service de Diego de Sarmiento,
des Guises et même de Henri d’Anjou et de la reine mère.
    Thorenc avait besoin de se confier. Il m’a paru plus
désespéré qu’indigné. L’accouchement prochain de jours sanglants lui semble
fatal, et l’attentat manqué contre Coligny est à ses yeux un premier frisson
annonçant les douleurs de cet enfantement.
    Il m’a longuement parlé d’Anne de Buisson. Il craint pour la
vie de cette jeune femme.
    — Nous allons revivre un massacre des Innocents, a-t-il
dit. Rien ne peut plus l’empêcher. Le sang appelle le sang. La mort se répand
plus vite que la peste. Ce sera une épidémie.
    J’ai deviné qu’il souhaitait que je lui propose d’accueillir
à l’hôtel de Venise cette “innocente”, Anne de Buisson. J’ai fait mine de ne
pas comprendre, lui rappelant que la Sérénissime ne pouvait prendre parti dans
les guerres intestines.
    Je l’ai laissé en plein désespoir.
     
    Diego de Sarmiento, Enguerrand de Mons et le père Veron, que
j’ai vus peu après dans la grand-salle de l’hôtel d’Espagne, ne m’ont pas caché
qu’ils souhaitaient une grande lessive de l’hérésie.
    Le peuple de Paris la réclamait. Il avait accueilli
l’annonce de l’attentat par des cris de joie et des prières.
    Les boutiques avaient fermé comme pour un jour de fête. On
disait dans les rues qu’il fallait en venir aux mains et aux couteaux afin de
tuer ces huguenots qui empoisonnaient l’esprit du roi, voulaient changer la religion
du royaume. L’insolence de ces “hommes noirs”, de ces huguenots de guerre,
était insupportable.
    Quand le peuple avait appris que Coligny n’avait été que
blessé, sa colère avait redoublé.
    Veron a rapporté qu’on l’avait acclamé, à Saint-Germain-l’Auxerrois,
lorsqu’il avait déclaré en chaire : “Dieu dresse toujours des obstacles
sur la route des croisés afin de soupeser le courage des combattants de la
Croix.”
    Sarmiento et Enguerrand de Mons n’ont pas parlé religion,
mais politique. Ils redoutent le

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