Peines, tortures et supplices
scellée en terre par six gros pieux. C'est là que Damiens fut conduit escorté de dix bourreaux et de deux confesseurs. Il aida lui-même à se déshabiller, ne témoignant ni crainte ni étonnement, mais seulement envie d'en finir. On l'étendit sur cette petite table où des cercles de fer fixaient son corps: deux en travers, un en fourche laissant le cou libre, et un entre les cuisses, le tout se joignant au milieu et se serrant par de gros écrous sous la table, de sorte que le tronc est absolument fixé. On lui attacha la main droite à une menotte et on la lui brûla au feu de soufre. Le patient poussait des hurlements horribles.
On lui lia ensuite fortement les bras et les cuisses d'abord en haut, et de là en tournoyant jusqu'au poignet et au pied, et on attacha ces cordes aux harnais de quatre chevaux placés aux quatre coins de la table. Le signal fut donné, les quatre chevaux tirèrent par secousses qui n'emportèrent rien. Les cris de Damiens redoublaient et s'entendaient au loin, malgré le bruit et les rumeurs d'une foule innombrable. Pendant une heure, le patient fut ainsi tiré, on ajouta même deux chevaux aux quatre autres.
Les six chevaux partent à la fois; les membres résistent. Le bourreau ne sachant que faire, envoie demander des ordres aux magistrats qui siégent à l'Hôtel-de-Ville et qui se nommaient MM. Pasquier et Severt; on lui répond qu'il faut que le coupable soit écartelé. Les hurlements de Damiens recommencent avec les secousses, les chevaux fatigués se rebutent. Alors seulement les juges permettent qu'on le dépèce; car il n'est pas permis d'employer une autre expression. Le bourreau lui taillade les cuisses pendant que les chevaux tirent. Chose incroyable et pourtant attestée par des témoins dignes de foi, pendant que le bourreau opérait, Damiens eut la force de lever plusieurs fois la tête pour voir ce qu'on lui faisait.
«Enfin, ajoute l'auteur de ce récit, que nous abrégeons, après une heure et demie passée de ces souffrances sans exemple, la cuisse gauche partit la première, à quoi le peuple battit des mains. Jusque-là, Damiens n'avait paru que curieux et indifférent. Ensuite, à force de taillades, l'autre cuisse partit. Les cris reprirent avec une nouvelle force. Après, on taillada une épaule, qui partit; ses cris continuèrent, mais moins vifs et la tête ne cessa pas d'aller. Enfin, on taillada la quatrième partie, c'est-à-dire l'autre épaule, et ce n'est que là que la tête tomba quand elle fut emportée, ne restant que le tronc.»
XXI.
LES AIGUILLES.
Le supplice des aiguilles consistait à enfoncer des aiguilles sous les ongles du patient.
LES CROCS DE FER.
Le roi de Maroc se donnait souvent le plaisir de faire prendre un captif par quatre noirs des plus forts qui, le jetant en l'air, le laissaient retomber sur le sol la tête en avant: on recommençait jusqu'à ce que le misérable mourût.
XXII.
LA PENDAISON PAR LES AISSELLES.
Le patient était monté à une échelle posée contre une potence. On lui passait une sangle sous chaque aisselle, les deux bouts de cette sangle étant attachés au bras de la potence; deux cordes traversaient deux trous faits aux extrémités d'une planche mise à plat sous les pieds du condamné, et ces cordes tenaient également au bras de la potence. L'exécuteur relevait alors la planche, et le malheureux mourait dans cette atroce position.
XXIII.
LA POTENCE ET LE PILORI.
Le Nord donne de longs détails sur la mort de Dimitri Karakozof, ce jeune homme de vingt-cinq ans qui a tiré sur le czar le coup de pistolet détourné par Komissaroff. Le récit de cette exécution ne m'a point paru dépourvu d'une certaine grandeur.
... Au milieu de la place de Smolensk s'élevait une potence, et non loin de là un pilori avec une plate-forme à hauteur d'homme.
Quelques minutes avant sept heures, la charrette dans laquelle se trouvait le condamné, sur une banquette élevée, de manière à ce qu'il pût être vu de tout le monde, arriva, escortée d'un piquet de cavalerie. Le condamné était vêtu de noir. Il tournait le dos aux chevaux; sur sa poitrine il avait un écriteau blanc où on lisait: Karakozof, régicide . Il avait les bras liés derrière le dos, et était d'une pâleur livide. En descendant de la charrette, Karakozof chancela et fut soutenu par les aides du bourreau. Après avoir fait quelques pas, il se raffermit, toutefois, et marcha assez résolument vers le pilori.
Un secrétaire du Sénat, en
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