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Petite histoire de l’Afrique

Petite histoire de l’Afrique

Titel: Petite histoire de l’Afrique Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Catherine Coquery-Vidrovitch
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affectées par la maladie du sommeil), le système dominant fut celui de la régénération des sols grâce à la technique du « brûlis » (ou feux de brousse, dont la cendre servait à améliorer les terres) et surtout grâce aux très longues jachères (de 15 à 25 ans). Une des conséquences de ce système était évidemment la réduction des terres cultivables à proximité des villages, toujours à la recherche de nouveaux champs. D’où une agriculture semi-itinérante, où il n’était pas rare qu’un village migrât tous les 25 ans environ afin d’investir de nouveaux terroirs.
    C’est sans doute au XIX e  siècle que se situe l’une des coupures majeures de l’évolution politique africaine. En effet, les règles anciennes de la vie rurale, hors accident climatique grave, ne posaient pas de problème majeur avant la colonisation. Au cours de celle-ci, les colons s’emparèrent des meilleures terres pour parquer les « indigènes » dans des réserves relativement inhospitalières (ce fut le cas au Kenya et en Afrique australe) ; et, d’une façon plus générale, ils s’opposèrent à la mobilité des populations qu’il fallait fixer pour les exploiter (paiement de l’impôt, cultures obligatoires de rente,recrutements forcés). Encore les densités de populations restaient-elles, dans l’ensemble, limitées en regard des immenses espaces de savane (sauf dans les réserves qui, elles, n’étaient pas extensibles). Depuis l’explosion démographique du milieu du XX e  siècle, ce fragile équilibre est mis à mal. Face à la nécessité d’accroître les rendements, l’agriculture à l’européenne et la pression démographique ont entraîné le raccourcissement des années de jachère, provoquant la stérilisation de nombreux sols : dans les années 1950, les procédés industriels de la production arachidière produisirent des catastrophes écologiques, aussi bien dans le Tanganyika britannique qu’au Sénégal.
    On comprit a posteriori que si la paysannerie ancienne s’était montrée si rétive à des innovations telles que l’adoption de la roue ou de la charrue, ce n’était pas par conservatisme obtus. De même que les paysans ont su tirer parti de la pharmacopée et des pratiques phytothérapeutiques locales, compte tenu des moyens limités à leur disposition, les cultivateurs savaient mieux que les experts étrangers comment travailler leurs terres. Chaque fois que l’occasion leur en a été donnée, ils ont d’ailleurs innové : par exemple par l’extension, dans tous les bas-fonds humides environnants, de la culture du riz pour approvisionner une ville comme Abidjan ; au Rwanda, ils choisirent de développer la culture de pommes de terre adaptées au climat tropical. Ce n’est que depuis quelques années, face à la nécessité d’approvisionner les villes en vivres frais, qu’une agriculture moderne réfléchie se met en place.
    L’évolution de la population
    Si l’agriculture se maintint si longtemps dans cet équilibre précaire, c’est aussi parce que la population africaine demeura étonnamment stable pendant des siècles. Il est évidemment difficile de savoir ce qu’il en fut vraiment avant que n’apparaissent les premières estimations européennes, aussi incertaines furent-elles à leurs débuts. Toujours est-il que l’on estime cette population à environ cent millions au début du XVI e  siècle, soit 20 % de la population mondiale de l’époque. À la fin du XIX e  siècle, elle n’était plus que de 95 millions, ce qui ne représentait plus que 9 % de la population mondiale. Ce fut seulement autour de 1950 que s’enclencha (après celles de la Chine, de l’Inde puis de l’Amérique latine) la dernière en date des explosions démographiques mondiales. En un demi-siècle, la population africaine décupla, pour atteindre plus d’un milliard d’individus en 2010 (dont 800 millions au sud du Sahara), soit 18 % de la population mondiale. Comment expliquer que cette apparente stabilité sur le long terme, qui n’exclut pas entre temps des variations parfois considérables, se soit maintenue jusqu’à il y a à peine un demi-siècle ?
    On incrimine évidemment les ravages causés par les traites négrières. Or celles-ci furent certes meurtrières, mais leurs conséquences politiques furent plus nocives que leur impact strictement quantitatif. Le déficit de population fut moins provoqué par les départs du continent que

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