Piège pour Catherine
magnifiques cheveux d'or, dont les tresses soyeuses lui faisaient une royale couronne, elle portait, posé très en arrière, un petit hennin tronqué, en satin blanc, qui servait tout juste de support à un flot nuageux de merveilleuses dentelles de Malines, présent de Jacques Cœur.
Quant aux bijoux, outre l'émeraude gravée qui brillait sur sa main, la jeune femme portait une autre pierre, à peu près semblable, sinon qu'elle était plus grosse et plus lumineuse encore, tremblant au creux de ses seins au bout d'une chaîne d'or aussi mince qu'un trait de plume. Le vert des pierres et la blancheur de l'hermine faisaient chanter le ton doré de son visage, tandis que le velours, porté à même la peau, dessinait son buste, ses épaules et ses bras avec une précision absolue.
Impressionné, émerveillé, Renaudot reculait vers l'escalier comme devant une apparition. Sans doute y eût-il chu une fois de plus si Catherine ne l'avait arrêté d'une question :
— Avez-vous vu mon page ?
— Le jeune messire Bérenger ? Non, noble dame ! Je l'ai vu sortir tout à l'heure, peu après le lever du jour, mais ne l'ai point vu revenir.
— Où peut-il être ?
— D'honneur, Madame, je n'en sais rien. Mais il semblait fort pressé...
Catherine eut un soupir de contrariété. Porter la traîne d'une dame lorsqu'elle se rend en cérémonie faisait partie des obligations d'un page. Jusqu'à présent, c'était un genre de service que Catherine n'avait encore jamais demandé à Bérenger, car, à Montsalvy, l'existence, si elle était élégante, était dépourvue de décorum. Or, juste au moment où elle allait avoir besoin de son page, celui-ci trouvait le moyen de filer sans prévenir. Et Dieu seul savait quand il rentrerait et si même il ne se perdrait pas dans ce Paris qui lui était totalement inconnu !
Résignée à se passer d'une compagnie qu'elle avait appris à apprécier, Catherine se décida à rejoindre sa bruyante escorte, un peu inquiète d'ailleurs de la figure qu'elle ferait ainsi entourée de démons déchaînés, aussi braillards que contestataires.
Richemont pouvait ne pas apprécier tellement un cortège aussi bruyant autour d'une épouse éplorée. Mais il était certain, d'autre part, qu'une escorte composée des Roquemaurel, Fabrefort, Ladinhac, Sermur et autres gens d'Auvergne, surtout mécontents, pouvait introduire dans le débat un poids incontestable. Richemont y regarderait peut-être à deux fois avant de jeter ces gens-là dans une rébellion qui ne ferait de bien à personne.
Avant de quitter sa chambre, Catherine avait fait une longue prière à Notre-Dame du Puy-en-Velay, à laquelle, depuis son départ pour Compostelle de Galice, elle avait toujours gardé une tendre vénération et une entière confiance. Forte de cette confiance, elle acheva de descendre l'escalier bruyant de Renaudot et prit pied dans la salle où un silence soudain l'accueillit.
Comme s'ils avaient été touchés par la baguette d'un enchanteur, les chevaliers demeurèrent figés dans le geste qu'ils faisaient au moment où la jeune femme était apparue : les uns la bouche ouverte, les autres gardant le gobelet plein à mi-chemin des lèvres, mais tous pétrifiés par la beauté racée de cette femme que ce décor d'auberge faisait plus précieuse et plus insolite.
Malgré la peine qu'elle avait éprouvée à revoir ainsi, réunis et joyeux malgré tout, ceux qu'elle avait vus partir avec Arnaud, elle leur sourit à tous l'un après l'autre, partageant ainsi la bienvenue collective qu'elle leur adressait.
— Je vous souhaite le bonjour à tous, messeigneurs, et tiens à vous dire la joie, le réconfort que j'ai de vous voir ici, tous réunis pour défendre ma cause...
— Votre cause, Dame Catherine, elle est aussi la nôtre ! gronda Renaud de Roquemaurel. Je dirais même qu'elle est d'abord la nôtre, gens de guerre, car, si le malheur voulait que l'on mît à mal Montsalvy, qui donc, chez nous, accepterait encore de servir un prince qui nous refuse le droit de justice... et qui paie si mal.
— Quoi qu'il en soit, je vous remercie, Renaud ! Mais qui donc vous a prévenus de mon arrivée !
— Ce grand escogriffe flamand qui sert de chien de garde au Connétable ! jeta le sire de Ladinhac avec un dédain qui déplut à Catherine.
— Messire l'Hermite est notre ami de longue date, riposta-t-elle sèchement. Votre présence ici le prouve. Et je ne saurais trop vous conseiller plus de considération,
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